Ashish Beesoondial : «La création artistique doit être le pilier et le moteur des événements culturels»

Il y a les manifestations ponctuelles: les célébrations, les fêtes culturelles, les lectures dans les écoles, etc. Si toutes ont un apport artistique, certains événements marquent plus que d`autres, nourrissent l’imaginaire et s’installent dans le temps. Un festival peut investir la place publique et servir d’élément déclencheur pour les artistes, le public, le milieu social. En marge du Festival de théâtre pour jeunes Oye, qui aura lieu en mars 2021, Ashish Beesoondial, directeur artistique du Caudan Arts Centre, évoque l`importance de la créativité et l’accès à la culture pour tous..

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Est-ce que les festivals et autres événements culturels jouent un rôle important dans l’accès de tous à la culture ?

— Les festivals font partie des nombreux types d’événements culturels. Ils portent en eux un sens du dynamisme, de la célébration, un bourdonnement, le tout provenant d’une énergie collective entre les artistes et le public, et aussi entre les spectateurs eux-mêmes. Les festivals sont différents dans leur portée — ils sont destinés à attirer un plus grand nombre de personnes afin de devenir un lieu de mélange et d’interaction. Donc, oui, les festivals ont un rôle important à jouer pour ouvrir l’accès à la culture.

La création artistique est-elle centrale dans l’événement culturel?

— La création artistique est fondamentale et fait partie intégrante de tout évènement culturel. J’irai même jusqu’à dire que la création artistique doit être le pilier et le moteur de tous les événements culturels. Un événement culturel doit être divertissant et engageant, mais en même temps, il se doit d’être un espace de découverte, c’est ce qui aidera les artistes et l’art à grandir. Et nous avons besoin d’un public qui soit conscient du fait qu’assister à un événement signifie également encourager la créativité ou l’expérimentation créative. C’est là que le fait d’attirer un public curieux aide vraiment. Bien sûr, ce n’est pas toujours le cas. Les gens préfèrent assister à des événements culturels pour différentes raisons, pour passer un bon moment par exemple. Les événements doivent donc tenir compte de cet aspect également. En fin de compte, il s’agit de donner à un public ce qu’il aime, mais quelque part, sans vouloir être condescendant, il s’agit aussi de donner à un public ce dont il a besoin, ce qui profiterait à l’art, aux artistes et à la société dans son ensemble.

Le Caudan Arts comme lieu artistique, de par son identité, participe au développement de l’esprit de l’événement ?

— C’est, à bien des égards, notre mission. L’espace et les installations dont nous disposons, qui en toute humilité sont exceptionnels, nous permettent de travailler dans ce sens. Bien entendu, notre espace définit la manière dont nous abordons les événements culturels et développe notre identité en conséquence. C’est là que le Caudan Arts Centre est différent de tous les autres espaces culturels de l’île. Du marketing à la billetterie, en passant par l’apport technique et créatif d’une équipe dévouée, nous sommes en mesure de proposer une offre complète au mieux de nos capacités. Nous pouvons avoir l’espace, mais c’est ce que nous en faisons qui compte le plus. Notre objectif est donc de travailler sur trois fronts, les trois «A» comme on dirait en anglais : Art, Artistes, Audience. En gardant cela à l’esprit, nous essayons de développer un secteur culturel qui a beaucoup de potentiel, et de créer un certain dynamisme et un intérêt pour les arts et les événements culturels, en commençant par les enfants et les jeunes.

En quoi le Festival Oye est un instrument de valorisation du talent des jeunes artistes locaux?

— Je pense que les jeunes de ce pays ont beaucoup à offrir en termes de créativité et de talent. Il est de la responsabilité de chacun d’entre nous d’offrir une plateforme qui aide à valoriser ce potentiel. Et c’est dans ce cadre que nous avons imaginé le Festival Oye. Nous voulons donner aux jeunes une plate-forme pour s’exprimer de manière créative, par le biais du théâtre, dans un espace qui a été conçu pour les performances live. Nous avons mis en place un processus d’accompagnement et nous travaillons en étroite collaboration avec les participants pour les aider à donner le meilleur d’eux-mêmes sur scène. Le point fort d’Oye est aussi la variété des spectacles que nous cherchons à attirer : non seulement des performances longues, mais aussi de courtes représentations de 10 minutes dans un style fringe et expérimental. Nous avons eu une réaction très positive au festival et je tiens à remercier les parents et surtout les enseignants et les écoles qui ont manifesté leur intérêt à participer au festival.

Est-ce qu’il s’agit de soutenir les arts de la scène (assurer la visibilité et la viabilité du jeune théâtre) pour garantir leur diversité, dans un but éducatif, d’émancipation ou d’épanouissement personnel ?

— Absolument! C’est exactement ce que nous voulons faire. Il y a deux mots clés ici : visibilité et viabilité. Nous commençons quelque chose maintenant, et nous voulons le voir grandir, année après année. Le spectacle vivant a quelque chose que seuls un artiste et un public peuvent comprendre. Et ce moment de «liveness» est un moment d’interaction et d’épanouissement. Souvent, un artiste doit faire face à ses démons pour affronter ce moment de vérité sur scène : un acte de don de soi et de partage. La façon dont on négocie ce moment est un moment clé pour tous les artistes. Oye est un festival ouvert à différentes langues également, nous espérons donc qu’il deviendra une plateforme d’échange et d’interaction entre les différentes traditions culturelles que nous avons à Maurice. C’est un rôle fondamental que jouent les arts : rassembler des gens de différentes origines. Avec Oye, nous voulons faire la même chose, sauf que c’est la jeunesse qui en est le moteur. Je pense que les jeunes ont beaucoup à dire et que nous devrions les écouter, voir ce qu’ils peuvent faire et offrir. C’est notre façon de contribuer à la construction d’un avenir créatif. Nous voulons aussi qu’Oye soit une chance de créer et construire des communautés créatives et culturelles. Nous remarquons qu’il y a de plus en plus ce processus qui se met en place au sein des différentes troupes de théâtre qui vont participer, ce qui est formidable.

Est-ce que le Festival vise aussi la recherche théâtrale, les écritures actuelles, la diffusion d`œuvres de jeunes auteurs?

— Oye va, grâce au soutien de tous, devenir un grand festival dans le futur. Et c’est là où nous voulons aller: que ce festival qui promeut de nouveaux styles et genres devienne un espace d’expérimentation. Pour la première édition en 2021, il y a de nouveaux styles que nous allons voir, en termes de mise en scène. Certains spectacles sont basés sur le concept de théâtre verbatim, ce qui est nouveau et très encourageant. Plus nous aurons d’expérimentations, plus le festival sera riche.
La Nuit des idées sur fond de pandémie

La 6e édition de la Nuit des idées se déroulera le 28 janvier 2021 à l`IFM. Thème: «Proches» en France et sur tous les continents, dans les grandes écoles et les universités, dans les instituts de recherche, dans les associations, les Instituts français et les Alliances françaises, avec les musées, les théâtres et les bibliothèques, proposent des rencontres et des débats festifs et participatifs, où se mêlent conférences et forums, tables rondes et ateliers, créations artistiques, projections, concerts et théâtre. L’idée derrière le thème «permettre la transformation de nos rapports à l’espace et aux mobilités, les nouvelles solidarités que la crise de nos modèles économiques et sociaux appelle à construire, ou encore la place du numérique dans nos sociétés, qui façonne plus que jamais notre rapport au monde». La Nuit des idées a été confiée à Move For Art pour une grande fête des voisins.

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