Le soutien populaire à la démocratie s’effrite également dans plusieurs pays d’Afrique
Le dernier sondage d’Afrobarometer de Straconsult dresse un état des lieux de la démocratie en Afrique et à Maurice. La tendance générale, qui se dégage, est un effritement dans le soutien à la démocratie. Les résultats de ce sondage sur le terrain ont été diffusés simultanément à travers l’Afrique hier après-midi, y compris à Maurice par le directeur de Straconsult Amédée Darga qui avait à ses côtés Preesha Ramtohul Auchoybar, Research Manager à Straconsult lors d’une rencontre avec la presse.
Concernant la démocratie à Maurice, il ressort que 66% des personnes interrogées préfèrent la démocratie à tout autre système politique contre 85% en 2012. 91% rejettent le parti unique, 90% s’expriment contre la dictature et 77% s’élèvent contre le régime militaire.
Le rapport souligne également que 86% de la population sont d’avis que les médias devraient être libres de tout contrôle du gouvernement. 68% apportent leur soutien à la compétition multipartite, 64% se prononcent en faveur d’une limitation du mandat du Premier ministre à la tête du pays.
Ainsi, seulement 51% de la population se dit satisfaite avec la démocratie à Maurice contre 76% en 2012, soit une régression de 25 points. Seulement 39% affichent une entière satisfaction avec le fonctionnement de la démocratie. D’autre part, seulement 17% des sondés estiment que les élus écoutent les citoyens alors que 21% reconnaissent que les conseillers locaux écoutent leurs mandants.
Finalement, 53% de la population affirme être satisfaite que le Premier ministre ignore rarement les lois et les tribunaux et toujours 53% des personnes interrogées estiment que le Premier ministre ignore rarement le Parlement.
Dans son analyse le rapport avance que les dirigeants africains utilisent des moyens plus subtils pour éroder la démocratie, en affaiblissant les contrôles exercés sur leur autorité et en harcelant l’opposition politique. Le non-respect par les États membres contrecarre les progrès de l’Union africaine dans l’application des normes démocratiques.
« Ces revers éclipsent le succès des élections, les transitions entre les partis au pouvoir, l’éviction de présidents au pouvoir depuis longtemps, la solide performance du pouvoir judiciaire dans les conflits électoraux et d’autres progrès démocratiques – bien réels – et alimentent les avertissements désastreux des parties prenantes selon lesquels la démocratie perd du terrain sur le continent », soutient le rapport.
Les données révèlent systématiquement que même s’il existe encore un profond soutien démocratique sur le continent, celui-ci n’est pas sans fond. Le fait que même des démocraties éprouvées, comme le Botswana et Maurice, ne parviennent pas à répondre aux attentes de leurs citoyens, doit être considéré comme un signal d’alarme précoce important.
L’incapacité des gouvernements à assurer une gouvernance démocratique et responsable menace de saper le projet démocratique sur le continent et de laisser les citoyens de plus en plus déçus et en désaccord avec les autorités politiques dans les années à venir.
En moyenne dans 39 pays, le soutien à la démocratie reste solide : les deux tiers (66 %) des Africains déclarent préférer la démocratie à tout autre système de gouvernement, et de larges majorités rejettent le régime d’un homme (80 %), le régime d’un parti unique (78 %) et le régime militaire (66 %).
Mais dans 30 pays étudiés régulièrement au cours de la dernière décennie, le soutien à la démocratie a régressé de 7 points, dont de 29 points en Afrique du Sud et de 23 points au Mali.
L’opposition au régime militaire s’est affaiblie de 11 points dans 30 pays, de façon plus spectaculaire au Mali et au Burkina Faso (de 40 et 37 points respectivement).
Plus de la moitié des Africains (53 % dans 39 pays) sont prêts à accepter une prise de pouvoir militaire si les dirigeants élus « abusent du pouvoir à leurs propres fins ». Des majorités croissantes réclament la responsabilité du gouvernement et l’État de droit, et le soutien à d’autres normes démocratiques est resté stable au cours de la dernière décennie, notamment la responsabilité présidentielle devant le Parlement, la concurrence multipartite, la limitation du mandat présidentiel et la liberté des médias.