Matériel scolaire et uniforme : L’éducation à prix fort

Les élèves, primaire et secondaire, ont repris le chemin de l’école la semaine dernière. La plupart arboraient des uniformes, chaussure, sacs, livres et cahiers flambants neufs. Une normalité pour beaucoup, histoire de commencer l’année avec de bonnes bases, et bien dans son uniforme. Si les parents sont fiers de voir leurs petits se rendre à l’école, leur porte-monnaie, lui, fait grise-mine… Pour cause, cette année, les prix ont doublé. Tant et si bien que les dépenses pour le matériel scolaire et les uniformes ont dû être scindées. Certaines ont été faites en décembre, d’autres la semaine dernière. Et d’autres encore attendent pour la fin du mois de janvier. Dépités «du prix de l’éducation gratuite», des parents témoignent.

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Pour bien équiper son enfant qui entre en Grade 10, cette année, après que la petite Nazmy ait bien réussi ses examens du NCE, l’année dernière, Anza avait prévu un budget de Rs 6,000. Elle voulait lui faire plaisir avec l’achat, notamment, de nouvelles baskets qu’elle lui a offertes en guise de cadeau de Noël : Rs 2,500 débitées du budget. Les Rs 3,500 restantes devaient servir pour le sac et les uniformes, ainsi que pour quelques livres qu’elle n’avait pu trouver à la fin de l’année. Mais la semaine dernière, Anza a déchanté. “Monn sonné !”, raconte-t-elle.

Une seule blouse au lieu de deux
La cherté des prix du matériel scolaire et des uniformes a pillé son porte-monnaie. Il ne reste plus un sou et encore, elle n’a pu tout acheter. “Trop trop cher ! Nous avons dû prendre l’essentiel”, explique Anza. Ainsi, contrairement à son habitude et la nécessité par mesure d’hygiène, cette mère de famille a pu acheter une seule robe d’uniforme à Rs 495. Et parce sa fille fait une petite taille. Pour les grandes, c’est une centaine de roupies de plus. Du coup, après avoir acheté deux douzaines de cahiers à Rs 800, deux de ses derniers livres à presque Rs 1000, il ne restait que Rs 1000 dans le budget prévu pour qu’Anza puisse acheter l’uniforme de Nazmy. Pour faire une petite économie, elle n’a pas acheté de blouse, cette année, estimant que Nazmy pourrait porter ses anciennes blouses d’école. Il a fallu acheter le sac à dos. “Heureusement que pour la grande sœur, l’école c’est fini pour le moment. Elle attend ses résultats du HSC ; donc, pas de dépenses pour les uniformes et livres. Mais fouf, qu’est-ce qu’on a casqué pour la petite !”, dit Anza.
Et pourtant, sachant depuis des années que le matériel scolaire requiert un budget conséquent, elle s’y est prise à l’avance. “Il y a certaines choses que nous n’avions pu avoir l’année dernière. C’est pourquoi la semaine avant la rentrée, on a dû débourser encore”, explique la maman, dépitée de la cherté de l’éducation. “Aurapavant, on pouvait utiliser les livres des grands frères, grandes sœurs, mais aujourd’hui, les éditions changent presque chaque année. Des fois, si on s’y prend très à l’avance, on arrive, dans certaines librairies, à obtenir un livre de seconde main. D’ailleurs, j’en ai profité l’année dernière. Mais il y a aussi des livres qui doivent impérativement être achetés neufs, car ils changent les éditions des fois à l’école”, explique Anza. Dans un soupir elle laisse échapper: “Et c’est pas fini. Il faut maintenant prévoir pour les leçons particulières. Il y a des profs qui demandent une avance sur les frais. Dire que l’éducation est gratuite, mon œil ! Nous payons le prix fort”, dit-elle, alors que dans trois mois, il faudra un autre budget pour les uniformes d’hiver, car la petite blouse ne suffira pas pour protéger son enfant du froid. “Il faudra acheter le jogging et le polo de l’école. Et c’est pas donné !”, dit Anza.

“Heureusement que les chaussures ont été offertes comme cadeau de Noël !”
Comme elle, d’autres parents se plaignent de la cherté du prix des uniformes et matériel scolaire. “Même si j’ai prévu mon bonus pour ces achats, j’ai été dépassé lorsque je ne suis rendue en boutique”, confie Jenny. Cette maman a trois fils. Heureusement, dit-elle, que le plus grand ne va plus au collège. “Ça, c’est une autre histoire… Quand viendra le moment, je vais devoir m’occuper de lui. Pour l’instant, je me concentre sur les deux petits. Et franchement, les prix m’ont estomaquée !”, dit-elle. Faisant le compte, elle indique qu’elle a déboursé pour son fils, qui est en Grade 5 cette année, un minimum de Rs 1750, notamment pour une  chemise (Rs 175), un short (Rs 225), une douzaine de cahiers (Rs 300), du matériel comme gommes, crayons, plumier (Rs 250) et un sac d’école (Rs 800. C’est sans compter les chaussures qui lui ont heureusement été offertes, précise Jenny.
Pour son deuxième fils qui est en Grade 9 au collège, les frais s’élèvent également à environ Rs 1800 avec un polo shirt (Rs 425), un short (Rs 475), une douzaine de cahiers (Rs 400) et le matériel scolaire (Rs 500). À lui aussi, ses chaussures ont été offertes par un proche comme cadeau de Noël. Jenny ne le cache pas : “On devra se contenter du strict minimum pour rester dans mon budget déjà serré.” Raison pour laquelle, au lieu de deux shorts et chemises, elle a dû acheter une seule rechange (une chemise et un short) par enfant. “Les années précédentes, je leur achetais au moins deux rechanges pour l’année, mais cette année, on utilisera les uniformes de l’année dernière pour compenser”, souligne la jeune maman.

“Avec deux enfants scolarisés, c’est encore plus compliqué !”
C’est ainsi un bugdet de Rs 3500 prévu par enfant qui a été dépensé avant la rentrée 2023 pour être sûr qu’il ne manque rien à ses enfants, dit-elle. “Et le casse-tête est loin d’etre fini puisqu’avec la rentrée, je m’attends à recevoir une nouvelle liste bien fournie des enseignants”, confie Jenny. D’ailleurs, depuis jeudi, le prof de Design et celui d’Art ont déjà demandé à prendre des accessoires qui serviront dans la classe. “Ces matériels coûtent cher. Il faudra  attendre fin janvier pour se lancer dans cette nouvelle course”, dit-elle, toujours sous le choc de la cherté des prix des accessoires et autres matériels scolaires. “C’est pas donné d’envoyer son enfant à l’école. Et quand on en a au moins deux, cela devient compliqué. La chance, cette année, c’est que nous habitons non loin de l’école. Du coup, pas besoin de van pour les enfants”, dit-elle.

Sandhya abonde dans le même sens. Sa fille, Julia est en Grade 6. L’achat de trois blouses et deux pantajupes lui a coûté environ Rs 1300. Les nouvelles chaussures Rs 900. “Heureusement que les livres sont offerts par le ministère”, dit la maman, ajoutant que “globalement, en raison de la hausse du coût de la vie, on a préféré se concentrer sur l’essentiel des achats, c’est-à-dire prendre les uniformes en quantité juste, et après, au courant de l’année, s’il faut acheter d’autres uniformes, on le fera.” Il faudra tout de même qu’elle débourse encore dès la fin de ce mois, car le Grade 6 est une année décisive et il faudra investir dans les leçons particulières, dit Sandhya. “On a approché quelques professeurs et les coûts mensuels des leçon tournent autour de Rs 500 à Rs 700 pour toutes les matières”, lâche la maman dans un soupir. Si les tracas pour le matériel scolaire sont pour l’instant finis, il faudra une nouvelle organisation à la famille pour le transport à l’école.

Transport scolaire : une réorganisation
“D’habitude, Julia voyage par le van scolaire, mais on a coupé cette dépense parce que la vie est devenue trop chère. On préfère limiter nos dépenses”, explique Sandhya. Du coup, comme sa petite Julia a grandi, elle voyage désormais par le métro l’après-midi, et le matin, sa mère sort plus tôt de la maison pour pouvoir l’accompagner à l’école. “Nous sommes obligés de nous réorganiser, qu’il s’agisse de nos habitudes d’achats ou de vie, pour que notre enfant puisse aller à l’école dans de bonnes conditions car aujourd’hui, tout est devenu extrêmement cher et l’éducation avec”.

KESHINI CHINARASSEN ATTEINTE DE SURDITÉ PROFONDE : Une rentrée spéciale pour une petite fille spéciale

Cette semaine a été marquée par la grande rentrée scolaire, après deux ans de grosses turbulences ! Ainsi, des milliers d’enfants mauriciens, cartables sur le dos, ont repris le chemin de l’école, contents de revoir leurs camarades et de rattraper le retard accumulé durant la pandémie. Idem pour les centaines d’enfants aux besoins spéciaux admis en écoles Special Education Needs (SEN). Eux aussi, contraints de rester à la maison pendant la pandémie, ont repris le chemin des classes, tout aussi heureux. Keshini Chinarassen (14 ans), atteinte de surdité profonde, a fait ses premiers pas dans sa nouvelle école, l’Allée Brillant Special Education Needs Resource and Development Centre. Sa mère, Simi Chinarassen, nous raconte cette première journée d’école spéciale.

« Keshini s’est réveillée à 5h du matin pour se préparer. À 7h pile, elle était déjà prête pour prendre son van scolaire », nous confie Simi Chinarassen. Cette année sera une année spéciale pour la petite Keshini. En plus d’avoir changé d’école après avoir passé toute sa scolarité à l’Association des parents de déficients auditifs (APDA) à Eau Coulée, « elle prendra part aux examens du PSAC. Nous avons attendu ce jour-là avec tant d’impatience », dit Simi Chinarassen. « Keshini a toujours aimé aller à l’école, surtout pour voir ses camarades de classe. Heureusement que pour cette rentrée dans sa nouvelle école, elle sera accompagnée de sa Miss et de quelques-unes de ses camarades de classe d’avant. »

Première de sa classe pour le Modular Primary School Achievement Certificate (PSAC), Keshini Chinarassen, dotée d’un implant cochléaire depuis presque 10 ans, est une petite boule d’énergie. « Elle s’impatientait tellement pour retourner à l’école. Elle s’ennuie à la maison, même si elle a de quoi s’occuper avec sa petite sœur Nandini. Elles font tout ensemble. » Keshini Chinarassen, en plus d’aimer les études, est une « petite alerte ». Passionnée de danse et de sport, elle ne laisse pas son handicap la freiner. « Je le redirai autant de fois qu’il le faudra. Nos enfants sont des enfants comme les autres. Ils ont peut-être quelque chose en moins, mais cela ne fait pas d’eux des enfants à mettre à l’écart. Il ne faut pas les isoler et les laisser s’épanouir », explique Simi Chinarassen.
Ainsi, pour cette rentrée scolaire, Keshini Chinarassen n’était pas trop contente d’apprendre qu’elle était reportée à cause de l’alerte de grosses pluies. « Keshini s’était réveillée très tôt et quand je lui ai annoncé qu’il n’y avait pas d’école, elle m’a dit “Fouf !” » se souvient Simi Chinarassen. « Keshini sait que 2023 est une année importante, mais nous ne voulons pas lui mettre la pression.

L’année dernière pour les examens du Modular PSAC, elle s’était évanouie et je ne veux plus qu’elle revive cela. Si elle réussit, tant mieux, si elle ne réussit pas, ce n’est pas grave, on réessaiera. » En attendant, Keshini Chinarassen réapprend à apprécier les petits plaisirs de l’école, des jeux à l’heure de la récréation et des devoirs à faire à la maison. « Vous savez, moi aussi je n’échappe pas à la fameuse phrase des enfants tard le soir, à la veille d’un jour d’école : “Maman, j’ai besoin d’un cahier ou autre” ! Un enfant qui va à l’école reste un enfant, tout court. Rien ne change », confie Simi Chinarassen.

 

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