Archipel des Chagos : Témoignages en kreol des Chagossiens à La Haye

  • Des dispositions en discussions avec le secrétariat de la CIJ pour faciliter une traduction simultanée du récit des exilés, le ministre mentor, sir Anerood Jugnauth, assurant le volet politique des revendications
  • L’hôtel du gouvernement accélère la dernière étape de “lobbying” diplomatique sur le plan international en prévision du rendez-vous du 3 septembre devant la Cour internationale de Justice de l’Onu
  • Le tête-à-tête SAJ/Sushma Swaraj de la fin de semaine axé sur la coopération maritime dans l’océan Indien et des derniers échanges avec New Delhi sur le dossier des Chagos

En marge de la présentation du Budget 2018/19, l’hôtel du gouvernement se préoccupe d’un autre important dossier politique dans la conjoncture, à savoir l’échéance du 3 septembre devant la Cour internationale de Justice à La Haye. La Chagos Cell au Mentor’s Office, dont la coordination est assurée par Sattiaved Seebaluck, ancien secrétaire au cabinet, met actuellement la dernière main aux préparatifs pour les prochaines auditions sur la demande d’avis consultatif (“Advisory Opinion”) de la Cour internationale de Justice sur les effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965. Tout un chacun s’accorde à dire que cette démarche devant cette instance judiciaire des Nations unies en vue de condamner diplomatiquement et juridiquement la Grande-Bretagne pour le démembrement unilatéral de la République constitue « l’une des plus importantes étapes politiques au cours des 50 premières années de l’indépendance ». La présence de l’ancien Premier ministre et ministre mentor, sir Anerood Jugnauth, est acquise. Dans les milieux proches du gouvernement, on apprend que la délégation officielle comprendra des représentants de la communauté chagossienne. Mais ces derniers n’effectueront pas le déplacement à La Haye pour faire de la figuration. Au cours des 75 jours qui restent jusqu’au 3 septembre, les contacts avec les alliés de Maurice, dont l’Union africaine, l’Inde de même que d’autres pays iront en s’accélérant en vue de constituer le bloc nécessaire pour parachever le processus de décolonisation de Maurice.

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Avec la décision d’inclure des représentants des Chagossiens, probablement menés par Olivier Bancoult, du Groupe Réfugiés Chagos, comme cela avait été le cas lors des précédentes sorties diplomatiques relatives au dossier de la souveraineté, le gouvernement prévoit des interventions des Chagossiens devant la Cour internationale de La Haye après l’Oral Submission formelle de sir Anerood Jugnauth. Les indications recueillies de sources officielles font état d’un projet de témoignages Viva Voce de Chagossiens devant le Full Bench de la Cour internationale de Justice.

En principe, les Chagossiens évoqueront en kreol morisien leur exil et leur revendication pour le droit de retour dans leur archipel natal. Des dispositions devront être prises en vue d’assurer une traduction en simultané de ces interventions. Ces mêmes sources avancent que “needful is done” à cet effet et qu’il ne devrait pas y avoir de difficultés pour ces arrangements d’ordre pratique. Dans le camp des militants pour la promotion du kreol morisien, cette démarche est favorablement accueillie car ce sera l’une des rares fois où le kreol morisien sera autorisé dans des instances internationales. Ils n’hésitent pas à parler de « grande première » pour la République de Maurice, et ce avec l’appui des Chagossiens.

Pour ce qui est de la teneur de l’Oral Submission, la pièce maîtresse de Maurice en compléments aux “Written Submissions” et “Counter-Submissions” déjà soumises au secrétariat de la Cour internationale de Justice, les consultations avec les membres du panel légal, dirigé par Philippe Sands, SC, ont déjà atteint un stade avancé. De par les réactions à la suite du délai du 15 mai pour les “Counter Written Submissions” des différentes parties, à l’hôtel du gouvernement, on se dit sûr que « le coup de la Cour internationale de Justice avec le dossier des Chagos est jouable ».

Toutefois, d’ici le 3 septembre, Maurice maintiendra le travail de “lobbying” diplomatique auprès de ses alliés. Il n’est pas à écarter qu’en prélude aux auditions de La Haye, la délégation mauricienne se mettra à table avec l’équipe du Legal Counsel de l’Union africaine pour un exercice de “comparing of notes” sur le volet du processus de décolonisation. Jusqu’ici, la contribution de l’Union africaine en matière d’arguments à ce dernier chapitre est considérée comme étant des plus déterminantes.

Pour le gouvernement, l’appui de l’Inde à la cause de Maurice sur les Chagos comporte « une prime politique à valeur inestimable » dans la conjoncture internationale. Les dernières rencontres entre la ministre des Affaires étrangères, Sushma Swaraj, et le Premier ministre, Pravind Jugnauth, lors de son voyage en Afrique du Sud, et avec sir Anerood Jugnauth lors de son transit retour, vendredi dernier, sont diversement commentées. Force est de constater que New Delhi, par voie de Tweet, s’est fait un devoir de confirmer que « la coopération maritime était au centre des échanges » avec sir Anerood Jugnauth. D’autres sources à Maurice ajoutent que les Chagos faisaient également partie du “Speaking Brief” du ministre mentor.

Par ailleurs, les récentes visites de courtoisie des ambassadeurs des Pays-Bas, Jeroen Verheul, en marge du dialogue politique entre Maurice et l’Union européenne, et de l’Espagnol Carlos Enrique Fernandez-Arias Minuesa ont valeur de symbole. Le siège de la Cour internationale de Justice est basé aux Pays-Bas, avec Pravind Jugnauth ayant déjà engagé un “lobbying” au niveau de son homologue néerlandais. Ensuite, l’Espagne, avec le litige sur le rocher de Gibraltar, ne devrait pas forcément être dans le camp des Anglais sur l’excision de l’archipel des Chagos du territoire de la République de Maurice.

Néanmoins, le suspense à La Haye durera jusqu’à avril 2019, date à laquelle l’Advisory Opinion contre Londres est attendue…

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