Athlétisme – A neuf mois des JIOI Difficile de faire mieux que 12 médailles d’or

« Si les Jeux se tenaient aujourd’hui même, nous n’aurions pas eu plus de huit médailles d’or comme en 2011 aux Seychelles ». Ces propos, lourds de sens, sont ceux de l’entraîneur national Joël Sévère tenus le dimanche 28 septembre dernier lors du premier grand rassemblement des 67 athlètes présélectionnés pour les Jeux des Iles de l’océan Indien de 2015 ( du28 juillet au 7 août), à La Réunion. Connu pour son franc-parler, Joël Sévère n’avait pas hésité à dire le fond de sa pensée devant le parterre d’invités présents, dont le ministre de la Jeunesse et des Sports, Devanand Ritoo. Ces propos sont certes très durs, mais reflètent la réalité. « Ceux qui me connaisse le savent très bien. Je ne suis pas de ceux qui vont dire le contraire des choses rien que pour faire plaisir », a-t-il précisé. Pour lui, il n’y a pas de doute: Maurice est bien loin par rapport à l’île de La Réunion et Madagascar. Car sur les 56 médailles d’or en jeu, il sera très difficile pour Maurice de faire mieux que 12 médailles d’or. Soulignons qu’en 2011, Maurice avait obtenu huit médailles d’or, alors qu’en 2007 à Madagascar, elle en avait remporté 13. Lors des Jeux de 2003, à Maurice, les locaux avaient obtenus 20 médailles d’or.
Joël Sévère est un des rares entraîneurs mauriciens à avoir suivi l’évolution de sa discipline depuis la tenue des 2èmes Jeux des Iles tenus en 1985 à Maurice. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il  n’a rien laissé au hasard. Hormis les statistiques du journaliste français Yves Pinaud – qu’il considère comme étant le plus grand et le plus crédible en Afrique – Joël Sévère a aussi conservé précieusement les statistiques annuels de la Fédération Française d’Athlétisme, sans oublier les rapports des associations et ligues d’athlétisme de l’océan Indien publiés dans les journaux des pays respectifs. C’est justement à la base des données compilées que l’entraîneur national a suivi cette évolution au cours de ces 29 dernières années. D’où justement sa prise de position du 28 septembre dernier pour tirer la sonnette d’alarme.
Les faits le prouvent, a fait remarquer Joël Sévère et pour lui il n’y a aucun doute: les médailles vaudront très chères dans neuf mois à l’île  soeur. Car selon lui, les Réunionnais et les Malgaches ont pris beaucoup d’avance sur Maurice dans pas mal de spécialités. Et pour lui, il y a une explication très claire à cela. « Depuis plusieurs années, les Réunionnais participent aux championnats de France cadets, juniors et seniors, en passant par les championnats scolaires français. Cette situation leur a permis  de participer à beaucoup de compétitions de très haut niveau et de progresser », a-t-il expliqué. Les Malgaches se sont également retrouvés, au fil des années, dans une situation similaire, tout comme la communauté comorienne basée à Marseille. « Ces athlètes ont régulièrement l’opportunité de côtoyer des athlètes de haut niveau. Ce qui n’est pas notre cas à Maurice », a indiqué Joël Sévère.
Stage en France et en Afrique du Sud
En 2012 toutefois, Joël Sévère a sollicité de l’Association mauricienne d’Athlétisme (AMA) de pouvoir rechercher l’aide du ministère de la Jeunesse et des Sports, du comité olympique Mauricien (COM) et du Trust Fund for Excellence in Sports(TFES). « L’objectif était très clair: il fallait impérativement permettre à nos athlètes de se perfectionner à l’étranger à travers des stages et compétitions. Moins de deux ans après, je peux dire que nous avons évolué dans la bonne direction », a-t-il affirmé. Car désormais, les sprinteurs et les lanceurs (garçons ou filles) ont la chance de participer à des stages et compétitions en France et en Afrique du Sud.
Le sprint et les lancers demeurent, à ce jour, les principales forces de l’athlétisme mauricien. Sur le sprint d’abord, Jonathan Permal peut s’imposer sur 100m et 200m et probablement sur 4x100m. Jöel Sévère est cependant d’avis qu’il faudra tout de même garder un oeil sur les Seychellois, dont le relais 4x100m hommes s’était qualifié pour la finale des récents Championnats d’Afrique au Maroc. Il est aussi d’avis qu’il faudra se méfier des Comoriens sur le sprint et ce, pour les raisons citées plus haut. Par contre au 100m haies féminin, tout comme sur 110m et 400m haies hommes, Maurice aura fort à faire dans le sens où Madagascar a prouvé qu’elle sera un os très dur sur les haies, mais aussi dans les relais masculins et féminin.
Au triple saut, Maurice possède de très bonnes chances de médaille d’or avec Jonathan Drack. Ce dernier, qui étudie et vit en France, a d’ailleurs réalisé une grosse performance lors des derniers jeux du Commonwealth avec un saut de 16m13. Les autres possibilités de médailles d’or sont Sylvain Pierre Louis (poids), Elvino Pierre Louis (disque), Nicolas Li Yun Fong (marteau) et Jessika Rosun (javelot).  Idem pour la marche masculine et féminine, le marathon masculin et le décathlon avec Guillaume Thierry. « Les statistiques prouvent que nous pouvons remporter plus de huit médailles. Nos athlètes ont un mental très intéressant, mais pour être performant, il faudra continuer à travailler très dur », a-t-il indiqué.
Ce sera très dur dans plusieurs épreuves
En revanche, dans les épreuves de fond et de demi-fond, Maurice accuse un très gros retard. « Je pense que l’absence d’un travail de groupe fait défaut. Je suis aussi d’avis que nous devrions aussi être plus entreprenant dans le travail », a expliqué Joël Sévère, tout en précisant que ce ne sont pas là des critiques négatifs. Pour preuve, il cite l’exemple de Paramasiven Samynaden qui a couru le 1 500m en 3.57:71 lors des Jeux de 2011 aux Seychelles. Quatre ans après, le principal concerné tourne autourdes  4.01. Il est donc très clair, selon Joël Sévère, que la tâche des locaux sera très dure face aux Réunionnais et aux Malgaches. Même sur 800m, il dit falloir s’attendre à des difficultés dans le sens où le meilleur junior de l’île soeur a les qualités pour taquiner les seniors mauriciens. « Il faut reconnaître qu’il y a un problème et qu’il est temps de trouver des solutions. »
C’est ainsi que depuis le début de la saison, soit au début du mois, les présélectionnés ont été regroupés sous la direction de l’entraîneur responsable des athlètes de fond et de demi-fond, nommément Frankie Lebon, lequel a nommé l’ancien champion Mike Félicité comme son assistant. Dans la même foulée, ces athlètes auront la possibilité de participer à un stage de haut niveau, le mois prochain, à  Nairobi, Kenya, dans le centre de haut niveau de la International Association of Athlectics Federations (IAAF). Ils profiteront d’une autre sortie semblable en juin de l’année prochaine.
Les sprinteurs et lanceurs continueront eux à bénéficier des stages et compétitions en France et en Afrique du Sud. Reste maintenant à décider pour le groupe de sauteurs où la situation n’est pas plus rose dans la mesure où chez les hommes comme chez les dames, nos voisins de l’île soeur, aussi bien que les Seychelles, sont nettement au-dessus. Chez les hommes d’abord, Widley Ravane saute à 2m à la hauteur, alors que les minima imposés par La Réunion est de 2m08. Chez les dames, la Seychelloise Lisa Labîche saute à 1m86, alors que trois Réunionnaises sautent au-delà de 1m70. Quant à la meilleure mauricienne, elle est à 1m60.  
Selon Joël Sévère, ce constat négatif s’oriente beaucoup plus du côté féminin et ce n’est un secret pour personne que l’athlétisme mauricien a accumulé autant de retard depuis de nombreuses années. A titre d’exemple, aucune lanceuse de disque ne lance actuellement à 40m, alors que personne n’a pris la main à Jenna Rima qui sautait régulièrement à 5m70 ou plus à la longueur.  « Comme vous pouvez le constater, nous sommes vraiment très loin dans certaines spécialités par rapport aux Réunionnaises et autres Malgaches et même Seychelloises. Cela fait que notre tâche sera très compliquée au niveau féminin aux Jeux « , a-t-il fait ressortir.

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