Olivier Baissac : « Optimiser les rendements aux champs et réduire les coûts de production »

Olivier Baissac, Chief Executive Officer (CEO) d’ENL Agri, évoque , dans l’entretien qui suit, la stratégie agricole du groupe ENL, qui gravite notamment autour de deux grands axes : réduire les coûts de production et optimiser les rendements. ENL Agri déploie des technologies agricoles modernes, telles que l’intégration de systèmes de gestion agricole basés sur l’Internet des objets, l’utilisation de drones et la mise en place de capteurs pour le suivi des conditions agroclimatiques.

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ENL Agri est l’un des plus gros producteurs de canne à sucre de Maurice. Quelle est son importance au sein du groupe ENL ?
Au sein du groupe ENL, le pôle agricole représente une contribution de 5% au chiffre d’affaires. Il emploie environ 700 personnes, avec la responsabilité de la production annuelle de 200 000 tonnes de canne à sucre, 1 850 tonnes de légumes et 3 300 tonnes de poulet. Nous sommes un acteur majeur dans le développement agricole du pays, et ce rôle nous tient à cœur.

Vous avez pris vos fonctions en juillet 2021 dans le but de moderniser le pôle agribusiness d’ENL. Où en êtes-vous à ce niveau ?
La canne contribue à plus de 50% du chiffre d’affaires d’ENL Agri et, jusqu’à récemment, les conditions de marché ne justifiaient pas des investissements dans ce domaine. Une rémunération plus adéquate de la bagasse, couplée à de meilleurs prix prévalant sur le marché sucrier international, nous permet désormais d’envisager l’avenir avec plus de confiance.
Nous avons ainsi lancé plusieurs projets visant à moderniser nos pratiques, et ce, conformément à notre Business Plan pour les trois ans à juin 2026. Nous employons des technologies agricoles avancées, telles que l’intégration de systèmes de gestion agricole basés sur l’Internet des objets (IoT), l’utilisation de drones pour la cartographie et la surveillance des cultures, la mise en place de capteurs pour le suivi des conditions agroclimatiques en temps réel, ainsi que l’utilisation de logiciels de gestion agricole pour la planification et l’analyse des données.
Nous avons également mis en œuvre des techniques agricoles de précision, comme l’intégration de la technologie GPS pour la gestion précise des champs et l’adoption de la plantation en doubles rangs. Nous avons aussi investi dans des machines agricoles modernes et efficaces pour améliorer nos opérations.

A ce stade, la canne à sucre est cultivée sur quelque 60% des terres agricoles du groupe. Quelle est votre stratégie pour les prochaines années en termes de production sucrière ?
Notre stratégie consiste à optimiser les rendements dans les champs existants tout en réduisant nos coûts de production et en optimisant la mécanisation. Nous avons mis en place un programme de replantation de quelque 430 hectares par an, et nous misons sur une meilleure sélection variétale. Nous allons sélectionner des variétés de cannes qui sont mieux adaptées à nos conditions, aux maladies et aux ravageurs présents dans la région.
La baisse des coûts de production se fera essentiellement à travers le réaménagement des parcelles avec l’épierrage afin de rendre la récolte mécanisable. Nous nous attendons à voir une augmentation en productivité avec la mise en œuvre de ces actions.

Savannah vient de décrocher la certification Bonsucro. Qu’est-ce que cela implique ?
La certification Bonsucro est une réalisation importante pour Savannah. Elle témoigne de notre engagement envers la durabilité dans la production de sucre. Cela signifie que nous avons des pratiques agricoles et de gestion qui minimisent notre impact sur l’environnement, en réduisant notre utilisation d’eau et de produits chimiques, en protégeant les écosystèmes locaux et en favorisant la biodiversité. Cette certification atteste aussi du fait que nous respectons des normes en matière de durabilité, de gestion des ressources naturelles et de conditions de travail équitables pour nos employés.

Quels sont les enjeux rattachés à cette certification vis-à-vis des acheteurs mondiaux ?
Certains marchés internationaux, en particulier en Europe et en Amérique du Nord, exigent de plus en plus que les produits agricoles, y compris le sucre, soient certifiés conformes à des normes environnementales et sociales strictes. La certification Bonsucro peut ouvrir des portes aux producteurs mauriciens en leur permettant d’accéder à certains de ces marchés et, éventuellement, de bénéficier des prix préférentiels. Nous anticipons aussi une hausse au niveau des demandes de la part des acheteurs dans le futur pour des certifications de ce type.

La forte hausse de prix du sucre sur le marché mondial apporte un bol d’air au secteur, mais cette tendance va-t-elle durer ?
Nous avons effectivement dû subir pendant les six dernières années des prix de marché très bas. Parfois si bas qu’ils étaient en dessous du coût de production. La situation de marché actuelle est donc bien sûr un soulagement pour toute l’industrie. Il est difficile de faire des prévisions précises à ce stade, car le prix est lié à une multitude de facteurs ainsi qu’à l’évolution de différents événements mondiaux majeurs.

Le changement climatique est malheureusement devenu une réalité, avec un changement notable sur les saisons, la pluviosité et les températures. Dans quelle mesure ces changements majeurs affectent-ils déjà la culture de la canne ?
Nous ne pouvons affirmer pour le moment que le changement climatique a ou aura un effet sur la culture de la canne, car nous n’avons pas encore assez de recul pour en évaluer l’impact. Nous constatons des tendances au niveau de nos données climatiques, telles qu’une augmentation de la température moyenne et des saisons pluvieuse ou de sécheresse qui ne se ressemblent pas d’une année sur l’autre. Certains changements, comme l’augmentation des amplitudes de température, c’est-à-dire la différence journalière entre le minimum et le maximum des températures, peuvent avoir un effet bénéfique sur le taux de sucre à l’hectare, alors que d’autres changements pourraient avoir un effet néfaste.

Le recrutement de travailleurs étrangers fait débat. L’économie locale ne peut plus fonctionner sans main-d’œuvre étrangère. C’est aussi le cas pour le secteur cannier, qui fait face au vieillissement des travailleurs, à l’abandon des champs et à une baisse dans la production de sucre. Quelle approche préconisez-vous?
Le problème de main-d’œuvre affecte plus la communauté des petits planteurs que les gros opérateurs. Les petits planteurs rencontrent davantage de contraintes à mécaniser leurs champs et sont par conséquent plus dépendants de la main-d’œuvre. À notre niveau, nous avons opté pour une stratégie sur le long terme, qui consiste à diminuer la dépendance sur la main-d’œuvre à travers l’aménagement de parcelles et la mécanisation.

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