BAI : Une trêve réclamée sur le front social

D’ici fin juin, période à laquelle les Special Administrators de la BAI Co (Mtius) Ltd Mushtaq Oosman et Yogesh Basgeet devront se prononcer sur le sort d’Iframac, de Courts et d’Apollo Bramwell, une trêve sur le front social pourrait être observée. Ainsi, le gouvernement, après les délibérations du conseil des ministres de ce matin, pourrait transmettre officiellement le souhait que le duo Oosman/Basgeet se concentre davantage sur les procédures pour l’adjudication de ces trois entités à la suite de l’Expression of Interests au lieu de poursuivre l’étape de dégraissage du personnel. De son côté, Reeaz Chuttoo, de la Confédération des Travailleurs du Secteur Privé (CTSP), réclame une réunion d’urgence avec les ministres des Services financiers Roshi Bhadain et du Travail et des Relations industrielles Sudesh Callichurn en début de semaine prochaine pour établir une stratégie afin de faire face à la vague de licenciements économiques après l’écroulement de l’empire de Dawood Rawat. Dans le camp des Special Administrators, la préoccupation majeure concerne le paiement des salaires des employés du groupe BAI encore en poste aussi bien que ceux qui ont accusé réception de lettres de licenciement en ce début de semaine.
Des recoupements d’information effectués par Le Mauricien de sources concordantes indiquent que  « le volet social de la BAI Mega-Financial Scam will be high on the agenda ». le ministre du Travail et des Relations industrielles, qui a eu des séances de travail avec des syndicalistes, dont Reeaz Chuttoo et Jane Ragoo (de la CTSP) et Ashok Subron (General Workers Federation), aussi bien qu’avec le Special Administrator Mushtaq Oosman, devra présenter à ses collègues ministres un état de situation par rapport aux licenciements déjà sanctionnés et aux prévisions établies.
Ainsi, ce matin, 122 employés de la clinique Apollo-Bramwell avaient déjà été limogés suite à une communication officielle, signée du Chief Financial Officer Taher à la demande des Special Administrators. On dénombre également 80 licenciements à la Bramer Asset Management Ltd sans compter les 70 autres de GRNW Boat Yard Ltd. Des craintes sont entretenues par rapport à quelque 200 emplois manuels au sein d’Ireko Cleaning. Cette dernière compagnie, qui fait partie du groupe BAI, a des contrats pour le nettoyage des bureaux et autres enceintes des related companies.
« Ce délai expire ces jours-ci »
Avec la fermeture de ces différentes compagnies pour des raisons économiques, les contrats d’entretien et de nettoyage devraient devenir caducs, quelque 200 employés risquant de finir sur le pavé d’un moment à l’autre. Les cas de la Quincaillerie Centrale, avec une cinquantaine d’emplois, et de la BA Logistics, avec une dizaine d’employés, sont suivis avec la même inquiétude. En revanche, du côté d’Iframac, avec 367 postes à différents niveaux en jeu, et de Courts, où le nombre d’employés serait d’un millier, aucune indication officielle n’a filtré jusqu’ici, même si la menace de licenciements se fait de plus en plus pressante. Conscient du coût social et du traumatisme de la perte d’emplois dans de nombreuses familles à travers l’île, le gouvernement a décidé de se pencher lors des délibérations du conseil des ministres de ce matin sur les mesures à prendre en vue de faire face à la situation. L’Insolvency Act prévoit que le Special Administrator dispose d’un délai de 21 jours pour entériner des décisions, ce qui explique la multiplication des initiatives depuis le début de cette semaine car la Financial Services Commission (FSC) a procédé à la nomination de Mushtaq Oosman et Yogesh Basgeet avec effet à partir du 1er mai. Ce délai expire ces jours-ci. L’une des options qui pourrait tenter le gouvernement est une trêve sur le front de l’opération de dégraissage du personnel tout en demandant aux Special Administrators de faire diligence par rapport aux procédures pour l’adjudication des fonds de commerce de Courts, d’Iframac et d’Apollo-Bramwell. Cette étape devra être franchie dans un délai maximum de six semaines. « Mais il faudra attendre la fin de la réunion du conseil des ministres du jour pour en savoir plus », laissait-on entendre à l’hôtel du gouvernement ce matin. D’ailleurs, dans certains milieux, on prêtait l’intention au ministre des Finances Vishnu Lutchmeenaraidoo avec les Special Liquidators en présence de son collègue du Travail et des Relations industrielles de décider conjointement de la marche à suivre en tenant en ligne de compte les desiderata du conseil des ministres. « À ce stade, je ne suis pas encore en présence d’une invitation pour rencontrer le ministre des Finances. Si tel est le cas, je m’y rendrai pour prendre connaissance des points de vue exprimés », a déclaré ce matin Mushtaq Oosman au Mauricien.
« Nous ne pouvons rien »
Les Special Liquidators tentent également de relancer les activités au niveau d’Iframac et de Courts. Des négociations ont été ouvertes avec le constructeur automobile allemand Mercedes-Benz en vue d’avoir accès à la cargaison de voitures bloquées à la douane, faute de règlements des factures par l’ancienne administration d’Iframac. « Nous prévoyons d’obtenir une réponse de Mercedes-Benz à ce sujet en cette fin de semaine. À partir de là, nous déciderons de la marche à suivre », déclare Mushtaq Oosman. Dans le cas de Courts, certains fournisseurs étrangers ont fait preuve d’inflexibilité : le paiement avant d’avoir accès aux conteneurs. « Dans ces cas, nous ne pouvons rien. Par contre, d’autres fournisseurs ont accordé des “discounts” », ajoute-t-il. Pour ce qui est du paiement des salaires des employés du groupe BAI, l’entourage des Special Liquidators affirme que « tout a été mis en oeuvre pour que les employés de la BAI, en poste ou licenciés, obtiennent leur salaire à la fin de ce mois ». À l’hôtel du gouvernement, on fait comprendre que pour assurer le paiement des salaires, les Special Administrators pourront puiser dans un compte de Rs 95 millions pour faire le nécessaire. « De ce que nous comprenons, l’ancien administrateur de la BAI avait puisé de ce compte le mois dernier », laisse-t-on entendre dans ces mêmes milieux. Dans cette même conjoncture, Reeaz Chuttoo et Jane Ragoo de la CTSP sont montés au créneau pour encadrer les efforts des employés du groupe BAI. De prime abord, Reeaz Chuttoo a tenu à mettre en garde « les charlatans, qui procèdent à des collectes de fonds auprès des employés affectés, pour assurer les honoraires de conseils légaux ». Et de poursuivre : « A la CTSP, nous avons pour principe de défendre des employés licenciés, qu’ils soient syndiqués ou non. Mo dire bann travayer BAI pena ene sou pou paye. Pa rantr dan okenn piez de bann qui pe rode profite de zott faibless. » Sur le fond du problème, Reeaz Chuttoo a formulé une demande de rencontre d’urgence avec les ministres Bhadain et Callichurn, probablement pour le début de la semaine prochaine. « De notre point de vue, il y a trois propositions fondamentales à discuter. Nous avons besoin de connaître l’identité des éventuels acquéreurs. Nous avons appris qu’il y en a 18. Quels sont leurs projets et plans avec l’acquisition de ces compagnies ? Ensuite, avec les licenciements, nous nous attendons à voir le gouvernement venir de l’avant avec une stratégie pour le redéploiement de ces employés avec, notamment, une liste prioritaire au ministère de l’Emploi. Ensuite, le gouvernement devra se munir d’un “Certificate of Urgency” pour des amendements à l’Insolvency Act. C’est la première fois qu’un empire économique s’écroule avec des conséquences collatérales sur d’autres compagnies. Il y a urgence à revoir la situation », souligne le syndicaliste Chuttoo. Faisant preuve de réalisme, les dirigeants concèdent que la question de la compensation pour « licenciement abusif et sauvage » pourrait passer au second plan. Mais ils insistent sur le fait qu’un engagement formel doit être pris pour une Ex-Gratia Compensation aux employés licenciés, dont le paiement pourrait se faire ultérieurement. La proposition pour un paiement de Rs 30 000 en guise de compensation à chaque licencié est jugée nullement suffisante.
Un autre point de discorde entre l’hôtel du gouvernement et les Special Administrators de la BAI Co (Mtius) Ltd concerne le maintien de Swadeck Taher à la tête de la clinique Apollo Bramwell. « Les Special Administrators essaient de nous faire comprendre que cet employé est incontournable pour la gestion de la clinique. C’était la même chose avec Brian Burns chez Iframac. Finalement, celui-ci a été remercié. Il ne faut pas oublier que l’empire de Dawood Rawat s’est écroulé avec ces mêmes directeurs », lance un des ministres suivant le dossier BAI de très près, et qui se dit nullement satisfait de cet état de choses.

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