BARKLY : Evacuation d’urgence de ministres, hier soir

Au lieu d’éviction des occupants des maisons sur le tracé du Metro Express dans la région de Résidence Barkly, des ministres, et non des moindres, avec le Deputy Prime Minister et leader du Muvman Liberater, Ivan Collendavelloo, ont dû être évacués d’urgence, hier soir. En effet, une réunion de consultation coordonnée par le Père Eddy Coosnapen, curé de Sacré-Coeur, a tourné en eau de boudin avec des habitants de la région, laissant voir clairement leur exaspération devant l’attitude adoptée par le gouvernement en ce qui concerne la libération des terrains sur le corridor urbain entre Curepipe et Port-Louis. Le ton est monté d’un cran lors de l’intervention du porte-parole du gouvernement, Etienne Sinatambou, et la réunion devait prendre fin prématurément.
Les membres du gouvernement présents au Centre of Learning à Résidence Barkly, en l’occurrence Ivan Collendavelloo, Etienne Sinatambou, Anil Gayan, également député de Beau-Bassin/Petite-Rivière (No 20) et Alain Aliphon, Parliamentary Private Secretary (PPS), ont quitté la salle sous protection de la police et des membres de la VIPSU. Ivan Collendavelloo et Etienne Sinatambou se sont engouffrés en urgence dans une seule grosse cylindrée, qui a démarré avant même que le ministre Sinatambou ait le temps d’y prendre place. Pour la communauté des habitants de Résidence Barkly, la présence des ministres n’a fait qu’envenimer la situation.
L’on notera qu’un autre ministre du gouvernement, initialement chargé de piloter le projet Metro Express, préfère adopter un Low Profile, pour ne pas dire être évincé. Dans l’entourage de Nando Bodha, on laisse entendre que le principal concerné « inn plein ». Après des séances de la fin de la semaine dernière et des échanges au conseil des ministres vendredi dernier, il semblerait que le courant ne passerait plus sur ce dossier. Cet urbaniste de formation avait d’ailleurs été destitué du dossier consacré à l’impact du Metro Express sur l’industrie du transport en commun. Le comité interministériel est présidé par le Deputy Prime Minister Collendavelloo.
L’objectif de la réunion d’hier, avec comme facilitateur le père Eddy Coosnapen, avait pour but de donner la parole aux habitants de Barkly qui ont été touchés par les événements de vendredi dernier lorsque leurs maisons ont été détruites pour faire place au projet de Metro Express, et d’entamer le dialogue avec les trois ministres présents. Le ton est toutefois monté d’un cran du fait de l’insatisfaction de la foule présente des explications des ministres, et ces derniers ont dû évacuer la salle sous les huées de l’assistance, chez qui les traumatismes de ces derniers jours d’agitations sont encore visibles et indélébiles.
Hervé Coosnapa, du comité pastoral de Barkly, a tenu à faire état du « manque de communication du gouvernement envers les habitants de Barkly » et ajoute que ces derniers sont désormais dans le flou quant à leur avenir et attendent des réponses du GM. Ranini Cundasawmy, athlète de haut niveau dans les sports de combat ayant vécu à Résidence Barkly durant son enfance alors que sa famille y est toujours, a également pris la parole. La maison de son frère a été démolie pour faire place au tracé du Metro Express. Prise par les émotions et ayant besoin de reprendre son souffle pour s’adresser aux ministres présents, elle devait raconter « le calvaire » qu’a enduré sa famille lors de la démolition des maisons. « Mo mama sourde-muette. Li ti dan lakaz ek li ti kapav mor si pa ti aret sa bulldozer-la », déplore-t-elle. Le projet Metro Express, poursuit-elle, a été « imposé par le gouvernement alors que les habitants n’ont pas eu droit à la parole ». Elle déplore aussi le fait que des maisons ont été démolies « alor ki ti gagn papie ki ti interdi demolision ».
« Mo garson ti kapav perdi enn lizie »
Un des intervenants devait s’écrier : « Pa kapav less lepep soufer koumsa. Nou an 2017 ! Pa vinn fer polemik, les nou viv trankil. Pa kapav an 2017 nou vinn pass bann moman koumsa ». Un autre devait ensuite indiquer aux ministres : « Mo ti al kit mo garson lekol kan mo madam inn apel mwa pou dir mwa ki pe kraz nou lakaz. »
Jonathan Gafoor, habitant de Résidence Barkly, a soutenu que les habitants de la localité n’ont pas été avertis des développements qui prendront place dans leur quartier avec ce projet de Metro Express. « Pann averti nou ki deviasion pou fer. Nou ti pe atann bann repons ek zot inn reponn par bulldozer », déplore-t-il. Il devait de plus demander aux ministres présents de rendre publique la liste de ceux qui ont obtenu une compensation, « parski li pa kler ki sertin inn gagne alor ki ena ki pe krwar ki tou inn gagne ek pa pe rod ale ». Il a de plus soutenu que son fils « ti kapav perdi enn lizie » lors des travaux de démolition.
Le Premier ministre adjoint Ivan Collendavelloo, le ministre de l’Environnement, Etienne Sinatambou, et le ministre du Tourisme, Anil Gayan, ainsi que le PPS Alain Aliphon, le maire de Beau-Bassin/Rose-Hill, Ken Fong, son adjoint et des conseillers étaient présents pour écouter les doléances des habitants. Etienne Sinatambou s’est dit « surpris » par les propos des habitants, soutenant « ne pas avoir eu les mêmes informations sur ce qui s’est passé » et qu’il n’était « pas au courant que des enfants étaient traumatisés » par ces événements. Il a ensuite demandé aux habitants « d’agir de façon constructive » et de « privilégier le dialogue afin de trouver une solution aux problèmes ». À peine avait-il prononcé ces quelques mots que la foule a commencé à s’échauffer, certains vociférant des hurlements à l’encontre des ministres, accusés d’être responsables d’un manque de communication.
L’avoué des habitants de Barkly, Me Khaviraj Bokhoree, a demandé de « prôner avant tout l’intérêt des habitants » de Barkly. Il soutient que « les incidents de vendredi auraient pu être évités » et considère primordial d’« éviter tout dérapage car notre but est de trouver une solution pour ces habitants, et non de mettre des bâtons dans les roues du gouvernement pour ce projet de Metro Express ».
Toutefois, la foule n’a pu retenir son calme lors de l’intervention d’Etienne Sinatambou. Après quelques minutes d’arrêt pour apaiser les tensions, Ivan Collendavelloo s’est entretenu avec la foule, rappelant que le gouvernement a « accepté l’arbitrage de la cour ». « Après la décision qui sera prise, quelle qu’elle soit, je prends l’engagement d’ouvrir le dialogue avec les habitants de Résidence Barkly ». L’assistance n’a toutefois pas été convaincue par les dires des ministres présents, ne manquant pas de montrer son agacement de même que ses craintes. Les ministres, entourés de policiers, ont ainsi dû couper court à la réunion et ont dû être évacués de la salle, sous escorte policière, pour regagner leurs véhicules sous les huées du public.

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