BRUTALITÉ POLICIÈRE : Séance cruciale mardi dans l’enquête judiciaire

L’audition de la Star Witness, un habitant de Rivière-Noire âgé de 58 ans, qui s’est signalé avec un affidavit juré, mardi après-midi (voir fac-simile plus loin) viendra relancer, mardi prochain, la controverse sur les actes de brutalité policière. Cet agent de sécurité, affecté à un chantier de construction à côté du poste de police de Rivière-Noire, affirme avoir été le témoin oculaire des actes de violence commis par les cinq officiers de police sur la personne d’Iqbal Toofany, 42 ans, habitant Vacoas, placé en état d’arrestation suite à un contrôle de police. Toujours, lors de cette même séance de l’enquête judiciaire présidée par le magistrat Daniel Dangeot du tribunal de Bambous, la police a été sommée de soumettre des enregistrements de caméras CCTV opérés à Cascavelle entre 22h le 1er mars et 11h le lendemain pour confirmer la chronologie des faits autour des actes de brutalité policière dont a été victime Iqbal Toofany.
Auparavant, soit dès demain matin, les cinq policiers, interpellés et remis en liberté provisoire, soit le sergent Parsand et les constables Laboudeuse, Ragoo, Gaiqui et Nouma, ont été convoqués au QG du Central CID pour de nouvelles séances d’interrogatoire et de confrontation avec la version des faits de la Star Witness. Témoin qui a passé plus de quatre heures et demie, vendredi soir, à consigner formellement sa version des faits en présence de son homme de loi, Me Assad Peeroo. Il s’est ensuite rendu en compagnie des enquêteurs de la police pour participer à une descente des lieux dans les environs du poste de police de Rivière-Noire.
Du côté des Casernes centrales, même si l’on concède le fait que sur la base de ces nouveaux éléments, le délit de Torture by Public Officials, logé initialement contre les policiers, pourrait être modifié en homicide, l’on préfère attendre le rapport complet de l’autopsie sur la cause du décès d’Iqbal Toofany. Le Chief Police Medical Officer, le Dr S. K. Gungadin, avait attribué le décès à un oedème pulmonaire, écartant du même coup toute relation de cause à effet entre les ecchymoses sur la victime et le décès. Tout changement dans les accusations retenues n’interviendra qu’à la lumière de ce rapport officiel.
Les hommes de loi des policiers incriminés, dont Me Samad Goolamally, comptent mettre à rude épreuve la version de ce témoin. Ils comptent s’appuyer sur une affaire de Bad Blood entre le Star Witness et les membres du CID de Rivière-Noire, avec une affaire de perquisition remontant à 2012, pour tenter de le déstabiliser.
À ce jour, le témoin-vedette tient à sa version des faits élaborée dans l’affidavit juré par les soins de  Me Kaviraj Bhokoree, avoué. Il a fait la démonstration, lors de son passage au Central CID, vendredi, compte le rééditer lors de son audition, demain, devant la Commission Nationale des Droits de l’Homme, et mardi, dans le box des témoins, devant le magistrat Dangeot. Ces détails s’annoncent compromettants pour les policiers concernés.
Un autre élément majeur devra être versé dans le dossier de cette enquête judiciaire, ordonnée par le Directeur des Poursuites Publiques (DPP), Me Satyajit Boolell, Senior Counsel, au terme des dispositions de la loi. Suite à une motion présentée par Me Erickson Monneapillay, qui représente les intérêts de la famille Toofany, la police devra fournir à la Cour des enregistrements vidéo des mouvements de véhicules à la jonction de Cascavelle entre 22h le 1er mars et 11h le lendemain. Ce document devra établir des détails d’envergure quant aux déplacements d’Iqbal Toofany sur la route de Rivière-Noire avant les incidents et également des véhicules de la police. La victime avait quitté son domicile à Vacoas vers les 20h pour se rendre à Rivière-Noire à bord d’un véhicule.
Ces détails devront suppléer l’absence d’entrées officielles dans les Log Books de la police. Ainsi, lors de sa déposition devant le tribunal de Bambous, le chef inspecteur Roshan Kokil a indiqué que la victime en état d’arrestation avait été transportée dans un véhicule du CID de Rivière-Noire aux postes de police de Rose-Hill et de Bambous sans qu’aucune entrée ne soit inscrite en ce sens. Il y a encore la disparition troublante de la Casualty Card et du CCTV Footage des Urgences de l’hôpital de Candos. Techniquement, ces enregistremets s’éliminent automatiquement après cinq jours.
Interrogé par le représentant du ministère Public, Me Roshan Santokee, l’enquêteur principal, a déclaré qu’il s’était rendu à La Balise Marina, le lieu où Iqbal Toofany avait fait l’objet d’un contrôle policier. Il a fait état de la chronologie des faits à partir de 1h du matin le 1er mars. Lors de ce contrôle se déroulant à l’opposé de l’entrée principale de La Balise Marina, les policiers de l’Emergency Response Service (‘ERS) se sont rendus compte que la vignette d’assurance du véhicule, une Toyota Vitz de couleur blanche, comportait le 3565 alors que la plaque d’immatriculation affichait le 3166ZM00. Selon les entrées de la police, Iqbal Toofany n’avait pu fournir d’explications plausibles à ce sujet.
En procédant à une fouille corporelle du chauffeur, les membres de l’ERS ont récupéré plusieurs objets, dont une scie, un canif, une lampe torche, trois téléphones portables, des gants ainsi qu’une somme de Rs 344 en pièces de monnaie. Iqbal Toofany n’aurait pu fournir d’explications, préférant garder le silence.
Vers 1h45, Iqbal Toofany a été emmené au poste de police de Rivière-Noire. À ce stade, les premières contradictions sont relevées. Une explication fournie par le CI Kokil serait que certaines entrées ont été faites manuellement alors que d’autres par voie informatique.
Une entrée inscrite par un policier de l’ERS vers 2h indique qu’Iqbal Toofany a été remis au DCP Laboudeuse de Rivière-Noire avec « no visible marks of violence and made no complaints. » De 2h à 5h du matin, Iqbal Toofany est maintenu Under Custody au poste de police de Rivière-Noire.
L’enquête du Central CID révèle qu’Iqbal Toofany avait été transporté à partir de 5h30 aux postes de police de Rose-Hill et de Bambous. Cependant, aucune entrée dans les livres de la police ne mentionne le fait qu’il était bien présent dans l’enceinte de ces deux postes. Iqbal Toofany n’aurait été transporté au Princess Margaret Orthopaedic Centre que vers 8h le matin.
Le témoignage de l’Acting Senior Health Records Clerk, Leckram Gobhin et celui d’un officier des services administratifs du PMOC, Jayshree Chuckoree n’ont pas été d’une grande utilité pour confirmer la séquence des faits. La Casualty Card d’Iqbal Toofany avait déjà été remise à un officier de police par une Charge Nurse non-identifiée. Les enregistrements vidéo ont été détruits automatiquement après cinq jours, soit le 7 mars. Le Central CID n’a soumis une demande pour ce document que le 11 mars.
À la remarque de Me Mooneeapillay à l’effet que des dates manquaient lors d’une comparaison des  documents originaux et des copies des Diary Book et Occurence Book fournis par le chef inspecteur Kokil, le magistrat Dangeot s’attend à des explications officielles, lors de la séance de mardi prochain.
Affaire à suivre…

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