MARCHANDS AMBULANTS : Les autorités prônent la fermeté

Depuis lundi dernier, 18 avril,  aucun marchand ambulant n’est autorisé à opérer dans les rues de la capitale. Un projet de relogement leur est proposé à la rue Decaen et à la place de l’immigration. Les marchands ambulants se verront par la suite accorder la priorité des étals lorsque les autorités auront achevé le projet de reconstruction de deux nouvelles gares au nord et au sud de Port-Louis.  Cette interdiction a entrainé un mouvement de protestation de la part des marchands ambulants qui cherchent à tout prix un moratoire alors que les autorités prônent cette fois la ligne dure comparativement aux précédentes fois quand la mise à exécution des décisions d’interdiction  avaient échoué. Pour leur part, les marchands ambulants brandissent la menace d’une grève de la faim.
Après cinq jours de sit-in sans succès devant le Renganaden Seeneevassen Building et la Municipalité de Port-Louis, Hyder Raman, président du Front commun et les marchands ambulants de Port-Louis ont  accordé un délai de 48 heures, hier, aux autorités avant d’entamer une grève de la faim qui devrait débuter demain. Cette décision a été prise suite à la conversation téléphonique qu’il a eue, hier matin, avec  la Secrétaire Parlementaire Privée (SPP) Rubina Jaddoo-Jaunbaccus, deputée de Port-Louis Sud/Port-Louis Central, qui a-t-il dit, «lui a promis  qu’elle fera le nécessaire pour établir une ligne de communication avec une personnalité dans la haute hiérarchie du MSM».
Pas de retour dans les rues
Contacté par Week-End, Anwar Husnoo, le ministre des Collectivités locales, devait rétorquer : «C’est vous qui m’apprenez la nouvelle qu’Hyder Raman a eu une conversation téléphonique avec la PPS Roubina Jadoo-Jaunbocus. En ce qui concerne les marchands ambulants, le Premier ministre, qui a présidé le cabinet ministériel, vendredi, en présence de tous les ministres, a pris la décision qu’ils ne retourneront plus dans les rues. Le gouvernement ne va pas céder. Au cours d’une discussion avec Mario Nobin, le Commissaire de Police, je lui ai fait part de cette décision et il m’a donné l’assurance que tout sera fait pour respecter les directives du Premier ministre».
Hyder Raman avait demandé aux marchands ambulants qui s’étaient réunis, vendredi, devant le bâtiment Emmanuel Anquetil, où ils avaient passé leur première nuit en plein air, de s’opposer à l’interdiction d’opérer dans les rues de Port-Louis.  «Noun perdi lespwar. Nous pa pu reculé devant narien. Alle zot travail normalement demain»(NdlR samedi matin). Contactée par Week-End à plusieurs reprises, hier, pour obtenir sa version des faits, la PPS Roubina Jadoo-Jaubbocus est, pour sa part, restée injoignable. Vers 17 h hier, Hyder Raman, accompagné du Malauna Shamin Khodadee, le président  du Sunnee Oolama Council et  I’Imam Mustakin, secrétaire de ce conseil, s’étaient rendus à Decaen pour une visite. Arrivé sur place, le Président des Marchands Ambulants a déclaré : «Decaen, c’est l’endroit idéal pour caser les marchands ambulants. Mais il faut l’aménager avec toutes les facilités. Au cas contraire  nous allons rester sur notre position»  Après la visite, le Maulana Shamin Khodadee a souhaité que le Premier ministre organise une rencontre  comme il a l’habitude de le faire avant les élections générales, pour écouter les doléances des marchands ambulants.
Vers 7h, hier matin, un groupe de marchands ambulants s’était mobilisé à la gare Victoria avec la ferme intention de défier les autorités et reprendre le travail malgré l’opération Tornado que la force policière a mise en place pour les en empêcher. «Si fallait alle dans cachot mo pou allé. Mo travail lor sa la gare avec mo papa depi ki mo ena huit ans. Zordi mone marier, mo ena grand zenfan ki pe etudier l’iniversité. Sa faire six zours ki pas travail. Couma mo pou faire?», se demande Marie-Claude Baptiste, sous le regard vigilant des éléments de la Special Support Unit, postés sur place pour parer à toute éventualité. Faizal,  qui occupait un étal à quelques mètres de celui de Marie-Claude, n’est pas du tout satisfait de l’espace que le ministère des  collectivités locales leur a accordé à la rue Decaen : «Nous sommes prisonniers dans cet espace de 1 m40. Nous sommes très inconfortables. Nous demandons au ministre Husnoo de se rendre sur place pour voir dans quelles conditions il nous force à travailler». Fazila, mère de famille, raconte comment elle a vécu les six jours durant lesquels elle n’a pas travaillé. «Mo dilo ek la limière pre pu coupe. Couma mo pu faire si gouvernement pas change so position?», s’interroge-t-elle.
Le gouvernement félicité
Il était environ 11h30 lorsqu’un groupe de colporteurs s’est dirigé tout droit vers la place de taxi de la gare Victoria où se tenait debout Rafick Bahadoor, le président de la Taxi Propriétors Union (TPU), qui a, en plusieurs occasions, dénoncé le ‘chaos’ régnant dans les rues et sur les  trottoirs où opèrent les marchands ambulants, dans l’illégalité et dans des conditions déplorables. «Li meme ti mette case la Cour contre marchands», criait à haute voix une maraîchère visiblement hors d’elle.
Les policiers sur place réagissent.Ils demandent aux deux parties de se calmer pour ne pas envenimer la situation. Quelques minutes après, la petite foule s’est dispersée et tout est rentré dans l’ordre. «Je félicite le Gouvernement. C’est une très bonne décision. Il faut  absolument un plan pour libérer les rues de Port-Louis, qui n’arrivent plus à respirer, car les piétons sont obligés de marcher sur la chaussée, mettant ainsi leur vie en danger», déclarait le président de la TPU avant de  prendre  sa voiture, remplie des turfistes, pour se   diriger vers le Champ-de-Mars.
À la gare du Nord, aucun incident n’était à déplorer. Les marchands ambulants semblaient obéir aux directives des autorités policières, qui insistaient pour rendre les rues aux piétons. «Ban missie la mauvais kot zot ete la, prefère leve pake allé», plaisante un marchand qui file à toute vitesse dans le couloir d’un magasin, situé à la rue Farquhar, à proximité du marché central avec des vêtements sur les bras.  À la rue, John Kennedy et à la rue Celicourt Antelme, en face du bâtiment d’Air Mauritius et de l’Ambassade de l’Inde, des marchands ambulants ont préféré rester à l’intérieur de leur fourgonnette remplie des vêtements et d’autres articles qu’ils ont l’habitude d’exposer sur les trottoirs. «Nous préférons ne pas prendre de risques et attendre que la situation se décante et puis on verra», explique un colporteur.
Depuis lundi dernier, les marchands ambulants et le  ministère des Collectivités locales, campent chacun sur leur position. Plusieurs députés du gouvernement, comme de l’opposition, notamment Shakeel Mohames, Reza Uteem, Veda Balamoody, Mohamed Osman, Jean-Claude Barbier, Aadil Ameer Meean, Danielle Selvon et les PPS  Roubina Jadoo-Jaunbocus et Salim Abbas Mamode, ont rendu visite aux marchands ambulants devant la municipalité pour écouter leurs revendications. Mercredi, au troisième jour du sit-in des colporteurs, le ministre des Collectivités locales ne comptait toujours pas céder. Malgré l’intervention de la députée Danielle Selvon qui a soumis un dossier complet pour la relocalisation des marchands ambulants.

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