Central Electricity Board : Ces ampoules qui brûlent…

  • Le fournisseur historique d’énergie devra passer à la caisse et verser Rs 32 millions à la Standard Bank
  • Ainsi en a décidé la Cour commerciale jeudi au terme d’une saga qui aura duré 10 ans
  • C’est sous le tandem Patrick Assirvaden — Chavan Dabeedin que cette affaire d’achat d’ampoules économiques s’était déroulée

La Cour commerciale siégeant sous la présidence de la juge Rehana Mungly-Gulbul a, jeudi, le 24 janvier, définitivement fermé le dossier des fameuses ampoules économiques du Central Electricity Board (CEB) qui traîne depuis bientôt 10 ans. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que ces ampoules ont brûlé le CEB, qui devra passer à la caisse et verser Rs 32 millions, le total des sommes dues et des intérêts qui les accompagnent à la Standard Bank, qui avait honoré le paiement, à même hauteur, à Alternative Power Solutions (APS), le fournisseur des 660 000 ampoules dont le CEB avait éventuellement découvert qu’elles étaient contrefaites et qui décida de ne pas décaisser la somme déjà payée par la banque.
Si le juge Paul Lam Shang Leen, siégeant en Cour commerciale, avait donné gain de cause au CEB le 21 décembre 2010 et qu’il avait ordonné à la Standard Bank de ne pas payer APS et que cette décision avait même été transformée en ordre interlocutoire ensuite, le plaignant avait d’abord interjeté un appel auprès de la Cour suprême. Le chef juge Bernard Sik Yuen et le Senior Puisne Judge Keshoe Parsad Matadeen avaient, le 14 août 2012, confirmé la décision du juge Paul Lam Shang Leen, ordonnant à la Standard Bank de ne pas payer APS en raison des objections du CEB et des allégations de faux et de fraude pour obtenir le contrat.

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La compagnie APS, représentée par Mohammad Dookhee, un homme d’affaires que l’on avait souvent vu dans l’ombre de Navin Ramgoolam lors des sorties publiques du Premier ministre d’alors, avait ensuite recherché un recours auprès du Privy Council qui, dans un arrêt rendu le 9 septembre 2014, avait renversé les décisions de la Cour suprême et ordonné le paiement dû au fournisseur.

Le 17 septembre 2014, la Standard Bank a bien effectué le paiement de Rs 27 millions à Alternative Power Solutions, sauf que le CEB a refusé d’honorer cet engagement auprès de la banque qui, à son tour, a cherché réparation auprès de la Cour commerciale. Celle-ci lui a donné gain de cause jeudi et a ordonné au CEB d’honorer ses engagements auprès de cette banque. Le CEB aura donc à casquer Rs 32 millions, soit plus de $ 800 000 au taux courant du billet vert, plus les intérêts qui sont dus sur cette somme bloquée par le CEB depuis plus de quatre ans.

Chavan Dabeedin: le protégé permanent

Les procédures d’appel d’offres pour l’achat de ces ampoules économiques débutèrent en 2009 et, en 2010, la compagnie Alternative Power Solutions fut retenue pour la fourniture de 660 000 ampoules économiques au CEB pour une somme de Rs 25 millions. Le 24 septembre 2010, le CEB s’était tourné vers la Standard Bank pour l’émission d’une lettre de crédit en faveur d’APS comme garantie du paiement de Rs 25 millions, soit le coût des 660 000 ampoules économiques.

Tout allait comme sur des roulettes jusqu’à ce que le commanditaire, le CEB, finit par découvrir que les ampoules qui devaient lui être fournies n’étaient pas d’origine mais des articles contrefaits de la marque Philips fabriqués en Chine. Le CEB saisit alors la justice en novembre et en décembre 2010 pour que la lettre de crédit ne soit pas honorée. La suite fut une succession de procédures judiciaires longues de huit ans qui ont connu une conclusion ce jeudi devant la Cour commerciale.

Au coeur de cette affaire, un cadre, Chavan Dabeedin, celui qui régnait en maître au CEB sous le gouvernement travailliste et qui avait fait partie du triumvirat, avec Shamshir Mukoon et Kesnalall Balgobin, qui avait assuré la suppléance à la direction de décembre 2016 à juin 2017 à la suite de la demande de congé pour des raisons de santé du titulaire Gérard Hébrard. Sa nomination au poste de directeur général en 2008 avait soulevé un tollé dans l’opinion. Elle était tellement scandaleuse qu’elle avait même été évoquée à l’Assemblée nationale.

C’était en décembre 2008 qu’avaient été révélées les conditions, pour dire le moins inhabituelles, de l’arrivée de Chavan Dabeedin à la direction du CEB. C’était suite à une Private Notice Question du leader de l’opposition d’alors, Paul Bérenger, qu’il fut confirmé que ce n’est que sur une simple proposition du président du conseil d’administration, le nominé politique travailliste Patrick Assirvaden, que Chavan Dabeedin atterrit au commandement du CEB le 20 novembre 2008.

Week-End avait, en décembre 2008, reproduit un extrait du procès-verbal de cette réunion du 20 novembre en ces termes : “The Chairman further informed Board members that a letter has been adressed to his person by Mr. C. Dabeedin showing interests in the post of General Manager.” Et c’est sans discussion aucune que le président proposa qu’il soit nommé et qu’il le fut.

Chavan Dabeedin était 7e dans la hiérarchie du CEB et comptait seulement 16 ans au sein de l’organisme lorsqu’il fut nommé directeur. Celui qui était le plus qualifié pour le poste était Gérard Hébrard, avec 42 ans de service. L’ironie a voulu que cette nomination intervienne en pleins débats sur l’Equal Opportunities Bill. C’est à partir de cette époque et, dans un souci d’économie d’énergie, que le tandem Assirvaden-Dabeedin s’embarqua dans une campagne d’acquisition d’ampoules pour être revendues aux consommateurs.
L’affaire des ampoules prit une telle proportion qu’elle avait occupé les grands titres des journaux pendant des semaines et que l’ICAC s’en mêla. Chavan Dabeedin, qui avait piloté le dossier brûlant des ampoules, dut, sous la pression, soumettre sa démission de la direction du CEB le 10 novembre 2010, deux ans seulement après avoir été propulsé au sommet de la hiérarchie.

Il faut dire que le protégé du PTr qui faisait campagne à Quatre-Bornes notamment, avait été souvent dénoncé pour son côté frimeur et son goût du cliquant. Si ce n’est l’acquisition d’un modèle unique de Mercedes, ce sont les notes de restaurant allant jusqu’à Rs 10 000 que dénonçaient les employés du CEB, alors que Chavan Dabeedin avait la main haute sur l’organisme.

Tout cela n’a pas empêché un come-back remarqué de Chavan Dabeedin au CEB en 2015 après que le ministre Ivan Collendavelloo eût fait revenir Gérard Hébrard, celui à qui le poste de directeur qu’il méritait avait toujours été refusé.

Celui qui avait été contraint de démissionner avec fracas en novembre 2010 a profité d’un appel de candidatures pour décrocher le poste de Transmission and Distribution Manager. Malgré les contestations en interne et des doutes émis sur son éligibilité à ce poste, fort d’on ne sait quelle protection, il obtint le poste. Il ne respectait pourtant pas un des critères de l’appel de candidatures qui était un diplôme en génie électrique, son certificat d’ingénieur étant celui de mécanique.

S’il fallait vérifier que plus ça change plus c’est la même chose et que la gestion PTr et celle du MSM se ressemblent comme deux gouttes d’eau, ce cas d’ampoules et des protagonistes impliqués serait la plus parfaite des illustrations.

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