Cour internationale de justice – Chagos : UA « L’accord du 5/XI/1965 nul et non avenu »

– Namira Negm de l’Union Africaine : « La CIJ est invitée à recommander à l’Assemblée générale de l’ONU de prendre des mesures pour garantir le respect par la GB de l’avis consultatif »

- Publicité -

Tout en faisant l’exégèse des obligations juridiques sur le plan de l’autodétermination et le droit à l’intégrité territoriale, l’Union africaine remet en cause le fondement du détachement de l’archipel des Chagos du territoire mauricien avant l’indépendance.
Dans les observations écrites en date du 15 mai dernier et répondant aux points avancés par la Grande-Bretagne et les États-Unis principalement, Namira Negm, conseillère juridique de l’organisation panafricaine, s’appesantit sur le fait que l’accord du 5 novembre 1965, en l’occurrence la décision adoptée lors de la réunion des ministres, présidée par le gouverneur britannique, sir John Shaw Rennie, est nul et non avenu. Le représentant de l’Union africaine, qui interviendra cet après-midi devant la Cour internationale de justice de La Haye en clôture des auditions publiques sur l’“Advisory Opinion” sur le démantèlement des Chagos, devra réitérer ce point fondamental en faveur de Maurice.

D’autre part, dans ce même document, mention est faite que « l’Union africaine invite respectueusement la Cour internationale de justice à recommander à l’Assemblée générale de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir le respect par le Royaume-Uni de l’avis consultatif ». À noter que le Premier ministre, Pravind Jugnauth, qui est arrivé à La Haye, hier, a participé aux consultations au sein du “Legal Panel” de Maurice en vue de répondre à la question du juge italien Giorgio Gaja sur la volonté des Chagossiens dans la conjoncture. Il sera au Palais de la Paix pour la dernière séance des auditions publiques du jour.

Dans son analyse des faits historiques et des dispositions juridiques, notamment par rapport aux Nations unies, au chapitre de l’autodétermination et de l’intégrité territoriale, l’Union africaine maintient que « l’accord du 5 novembre 1965, par la voie de laquelle le Conseil des ministres de Maurice a convenu du détachement par le gouvernement britannique de l’archipel des Chagos en contrepartie de certains engagements, et sur lequel se fonde largement le Royaume-Uni pour justifier un soi-disant titre territorial sur les Chagos, est nul et non avenu en droit international général, ainsi qu’il procède de l’article 53 de la convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, puisque le Royaume-Uni a manifestement violé le droit du peuple de Maurice, y compris de la population chagossienne, à exercer pleinement son droit à l’autodétermination conformément au droit international. »

Commentant le contexte politique de l’époque avec le déroulement de la conférence constitutionnelle de Lancaster House de 1965 au sujet de l’indépendance et les pressions exercées par Londres pour l’excision de l’archipel des Chagos, l’Union Africaine ajoute que concernant « l’accord de 1965, il convient de se poser la question de savoir comment une colonie peut assumer, sous l’autorité d’une puissance coloniale et si elle a été menacée, d’accepter soit le détachement d’une partie de son territoire, soit de demeurer indéfiniment une colonie. L’Union africaine ne demande pas à la cour d’examiner la validité de l’accord de 1965, puisque celui-ci ne relève pas de la question qui lui est posée. Au contraire, l’exploitation de pareil accord devrait être limitée aux faits nécessaires pour s’assurer que les représentants de Maurice ou le peuple des Chagos n’ont pu exercer ni leur libre volonté ni leur droit à l’autodétermination en 1965. »

L’Union africaine réitère le fait que « la décolonisation de Maurice n’a pas été validement menée à bien en 1968 », ajoutant que « l’accord du Conseil des ministres de Maurice ne pouvait satisfaire aux critères de l’autodétermination, en ce que Maurice n’avait de fait aucun choix ». Et pour cause, « Ni le Royaume-Uni ni les États-Unis n’ont cherché à établir que pendant la décolonisation de Maurice, le Royaume-Uni avait respecté le droit à l’autodétermination, et ont compris le droit à l’intégrité territoriale. Ils se sont contentés de faire valoir que la résolution 2066 ne procédait pas d’une obligation impérative. Les États-Unis ont, en outre, soutenu que des États étaient en net désaccord avec les termes employés dans le cadre des résolutions 2332 (XXI) et 2357 (XXII), laissant entendre que, dès lors, elles ne représentaient pas l’opinio juris à l’époque. »

Poursuivant son analyse par rapport à la validité de la résolution des Nations unies 15 14 (XV), l’Union africaine se permet de prendre à contre-pied la Grande-Bretagne, qui soutient dans le cas des Chagos qu’il n’y avait aucune obligation juridique par rapport au respect de l’intégrité territoriale des colonies. « En réalité, le Royaume-Uni contredit ses propres positions. Le 7 décembre 1967, lors des débats de la Quatrième Commission sur la mise en œuvre de la résolution 1514, le Royaume-Uni a souligné l’importance du principe d’intégrité territoriale au paragraphe 6, en déclarant ce qui suit : « L’expression “intégrité territoriale”, telle qu’elle est employée au paragraphe 6 du dispositif de la résolution 1514 (XV), entend l’intégrité et l’indivisibilité d’un territoire qui formait un tout sous une administration antérieure : par exemple l’ancien Congo belge, le Kenya, etc. C’est le concept que l’Organisation de l’unité africaine (OUA) a eu la sagesse d’accepter, en reconnaissant toutes les frontières coloniales antérieures, aussi absurdes qu’elles soient », note-t-on au paragraphe 207 de ce document.

Dans ses conclusions, l’Union africaine accuse la Grande-Bretagne de violation d’une série de règles fondamentales du droit international, notamment le droit du peuple mauricien, en particulier des personnes d’origine chagossienne à l’autodétermination ; l’inviolabilité de l’intégrité territoriale des États ; le respect de la souveraineté de l’État ; les résolutions contraignantes, pertinentes et applicables des Nations unies ; les dispositions pertinentes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; et les dispositions pertinentes du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -