EN MARGE DE LA RENTRÉE : Countdown politique !

Depuis bientôt un mois, Vishnu Lutchmeenaraidoo, présenté par Lalyans Lepep comme « le probable faiseur du second miracle économique », est hors de course. Après la sévère bronchite annoncée sur sa page Facebook, le 2 mars, l’ancien ministre des Finances, muté aux Affaires étrangères, doit faire face à des enquêtes de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC), notamment pour une affaire d’emprunt de 1,1 million d’euros, soit Rs 45 millions, à des taux d’intérêts de 1,5% de la State Bank of Mauritius. Son fils, Ashwin Lutchmeenaraidoo, directeur de la société Infozen Consulting Ltd, actuellement en Europe, devra se préparer à répondre à des questions de cette même ICAC sur un contrat de Consultancy pour l’e-Health Platform obtenu de la State Informatics Ltd sans passer par les appels d’offres. Puis, il y a encore l’enquête sur le projet de Pailles Smart City avec un partenariat entre la Yihai International et la State Investment Corporation (SIC), soit le détonateur des malheurs politiques de Vishnu Lutchmeenaraidoo. L’ex-Premier ministre, Navin Ramgoolam a ajouté, jeudi, son grain de sel en alléguant qu’un des protagonistes professionnels aurait bénéficié de Rs 60 millions dans cette affaire.
Dans 48 heures, sonnera la reprise des travaux à l’Assemblée nationale. Difficile à dire si le nouveau chef de la diplomatie sera à ce rendez-vous politique d’autant plus qu’au cours de la semaine écoulée, l’ICAC, à la lumière d’un 2e Judge’s Order dans le cadre de l’Euro-Loan Saga, a mis les bouchées doubles pour fragiliser davantage sa position sur l’échiquier politique. Du côté du Réduit Triangle, le décryptage des mouvements indique que les limiers de l’ICAC seraient déjà prêts pour enclencher l’étape de l’interrogatoire Under Warning du 2e ministre de Lalyans Lepep en moins d’une semaine. À condition que Vishnu Lutchmeenaraidoo soit rétabli vu que depuis dimanche dernier, il a été de nouveau admis en clinique.
Deux semaines après la publication dans la presse écrite et virtuelle du Loan Document en date du 11 septembre 2015 de 1,1 million d’euros obtenu par l’ancien ministre des Finances, des développements allant dans le sens d’un Prima Facie Case sont confirmés avec, très probablement, la convocation du ministre des Affaires étrangères pour interrogatoire Under Warning uns fois que son état de santé le permettra. Toutefois, dans ce cas de figure, et comme ce fut le cas avec l’ancien ministre de l’Environnement, Raj Dayal, mercredi dernier, le PM sir Anerood Jugnauth n’aura d’autre choix que de sommer Vishnu Lutchmeenaraidoo de « step down », le temps de l’enquête de l’ICAC. À moins que d’ici mardi, jour de la rentrée parlementaire, des décisions sont prises Proprio Motu au cas où l’équation deviendrait intenable.
L’enquête de l’ICAC, qui a enregistré des progrès au cours de la semaine écoulée, a permis d’établir des faits dans cette affaire de prêt de Rs 45 millions à des taux d’intérêts fixes de 1,5% annuellement alors que des maillons manquants sont raccordés par des Whistleblowers, qui sont venus de l’avant de leur propre gré pour collaborer et faire progresser l’enquête de l’ICAC.
À ce stade, un premier élément de controverse dans l’Euro-Loan Saga a été réglé avec les documents fournis par la State Bank of Mauritius dans le sillage de la levée du secret bancaire. La question de l’emprunt à 400 000 euros, détail qui a fait l’objet d’un Posting sur sa page Facebook par Vishnu Lutchmeenaraidoo, a été « brushed aside » d’un revers de la main. Le prêt, qui a été versé, est bel et bien sur le compte du ministre le 11 septembre 2015 et est de 1,1 million euros.
Mais le détail encore plus intéressant porte sur la demande initiale d’emprunt logée auprès de la State Bank of Mauritius depuis juillet 2015. Le montant réclamé par le ministre était d’un million d’euros avant de passer à 1,1 million. La demande avait été formulée initialement au nom du SVL Trust, probablement pour éviter toute attention spécifique. Mais très vite, il devait se raviser pour des raisons jusqu’ici connues en proposant que le nom du SVL Trust soit remplacé par ceux du ministre et de ses enfants.
Depuis la confirmation de l’existence de ce SVL Trust, un intérêt particulier se fait sentir quant aux transactions opérées au nom de ce Trust. Difficile à dire si le 2e Judge’s Order obtenu, mardi, par l’ICAC après celui du juge Iqbal Maghooa, vise à lever le voile du secret sur les opérations bancaires et autres sous ce Trust. En dernier lieu, un autre changement a été exécuté quant à l’identité officielle du bénéficiaire avec des instructions données dans la matinée du 11 septembre 2015 pour que le prêt soit octroyé au nom de l’ancien ministre des Finances et déboursé le jour même. Jusqu’ici, le ministre bénéficiait des facilités de crédits bancaires pour un montant de Rs 5 millions seulement.
Le montant de 1,1 million d’euros est en nette contradiction avec les Regulatory Requirements et autres Prudential Measures préconisés par la Banque de Maurice. En principe, la banque apporte 70% du capital et les 30% sont fournis par le client dans une transaction normale. Or, tel n’est pas le cas dans l’Euro-Loan Saga avec le LPV représentant le double des 70%, soit exactement 139% selon des sources bancaires autorisées. Un détail qui aurait échappé à la vigilance de la Banque Centrale dans ce cas précis.
Entre juillet et septembre 2015, d’autres modifications ont été apportées aux conditions et modalités de ce prêt. D’abord, pour les intérêts, la State Bank of Mauritius avait proposé un taux d’intérêts de 1,9% mais par la suite ce taux fut ramené à un taux fixe de 1,5%  par an avec la banque encourant tous les risques en terme de mouvements du taux d’intérêt ou de change. Tout comme dans le volet du SVL Trust, l’ICAC tentera de mettre un nom sur celui qui a tiré les ficelles derrière ces changements de nature cruciale.
Le chapitre du Purpose of the Loan constitue un terrain fertile d’investigations pour l’ICAC. Ces 1,1 million d’euros devaient servir pour financer des investissements. Toutefois, le Loan Agreement contredit cette dernière thèse dans la mesure où mention est faite que « the borrowers have requested the bank to grant to the borrowers banking facilities and other financial accommodation including but not limited to loans, bank overdrafts, credit cards, opening letters of credit, import loans, etc. »
Toutefois, dans le dossier, qui devait être piloté devant le Credit Committee, selon les procédures en place, une entrée en manuscrit laisse de plus en plus perplexe, soit « No details provided on the investments. » Techniquement, toute demande d’emprunt doit être accompagnée de détails précis au titre du Purpose of Loan en vue de ne pas porter préjudice aux intérêts de la banque. En tout, des recoupements d’informations indiquent qu’à ce jour, il n’y a pas eu achat de lingot d’or, comme annoncé sur Facebook.
Néamoins, il n’y avait que ces modifications qui ont été apportées. Les Fixed Charges imposées au début ont été tout simplement substitués par cette condition des plus exceptionnelles, soit « the charge shall be unregistered at the discretion of the bank. » La conséquence de cette décision est un manque à gagner pour les fonds publics représentant 2,5% du montant du deal au titre des frais d’enregistrement.
Mais la question-clé est : comment ce dossier a pu traverser les différentes étapes sans soulever des objections de base à la SBM Tower? Des sources bien informées avancent que « la responsabilité de pilote de ce dossier avait été confiée à un membre du conseil d’administration nommé par le ministre et politiquement proche du ministre. » D’ailleurs, pour éviter que des objections soient soulevées lors de l’examen du dossier par le Credit Committee, vu que des conditions imposées au début ont été modifiées au détriment de la banque, ce directeur aurait inscrit au préalable « Loan Approved » sur le dossier de l’Euro-Loan avec le Clearance obtenu comme une lettre à la poste.
Le principal concerné pourrait être convoqué incessamment à l’ICAC en vue d’élucider son rôle dans ce dossier avant que le commissaire de police, Karl Mario Nobin, ne soit appelé à déléguer son Power of Arrest aux limiers de l’ICAC pour le délit de « Public official making use of his position for a gratification » contre l’ancien ministre des Finances…

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