Grit Women Property Network | Femmes hauts cadres —Bronwyn Corbett: « To make women feel they have a voice »

Faudrait-il se prendre au sérieux au même titre qu’un homme quand on est femme et qu’on est perçue comme une “big boss”? Cette question peut faire sourire ou susciter un débat sur les femmes qui ont choisi d’être carriéristes tout en menant de front leur rôle d’épouse et de mère. Elles étaient une bonne trentaine de femmes hauts cadres à avoir répondu à l’invitation de Grit Women Property Network, mardi au Courtyard, autour d’un pot d’amitié pour des échanges d’idées sur le combat d’une femme au quotidien. Le thème était “The glass ceiling effect”. 

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Chose intéressante, contrairement à leurs collègues mâles, ici pas de “formal attitude” ou de « pause machiste ». Ces “big boss » au féminin gravitent dans le milieu des finances, dans les banques, le secteur immobilier, la construction, le marketing. Elles n’endossent bien sûr pas le costard cravate, se la jouent féminines avec talons aiguilles, tailleurs. Elles ont su défier le temps, affûter leurs meilleures armes basées sur leur professionnalisme, le respect et convaincre leurs collègues mâles que l’égalité des sexes se joue à armes égales dans le contexte professionnel.

« Talking about women empowerment is to make women feel they have a voice. We are here to create something and to deal with new perceptions, new challenges », confie Bronwyn Corbett, 37 ans, CEO de Grit Real Estate Income Group. Tournée vers le reste de l’Afrique, une région où la plupart des fonds immobiliers cotés en Afrique du Sud craignent de s’aventurer, Bronwyn Corbett a construit un groupe d’investissement immobilier panafricain qui gère un portfolio d’une valeur de USD 700 millions en quatre ans à peine. En tant que directrice financière puis directrice de l’exploitation de Delta Property Fund, elle a joué un rôle déterminant dans son inscription à la Bourse de Johannesburg et dans la croissance de l’actif de USD 2,2 milliards à USD 11,8 milliards. « Sur les quelque 36 sociétés immobilières cotées en Bourse, il y a deux femmes PDG. Nous travaillons dans un environnement très dominé par les hommes et il y a des obstacles à surmonter au quotidien. »

« Dépasser le glass ceiling »

La rencontre entre ces femmes hauts cadres prend toute sa dimension lorsque Corinne Robert, directrice de com chez Grit, demande à l’auditoire de prendre pour exemple le livre de Sheryl Sandberg, directrice d’exploitation de Facebook et qui s’intitule : Lean In. Women, work, and the will to lead. Un bouquin qui a été un best-seller et qui marque bien cet écart d’ambition en matière de leadership, conviant les femmes présentes à donner leurs opinions sur leur choix de carrière. Belinda Wong-Vacher, directrice des investissements chez Grit, dira que « Clear vision mind and to be able to reach the top you must have a plan. » Le but ultime est d’encourager les femmes à accéder à des postes de leadership et, en ayant plus de voix féminines aux postes de pouvoir, on créera des possibilités plus équitables pour tous.

Il y a aussi ces interrogations générées sur ce qui peut pousser une femme à mettre entre parenthèses sa carrière pour se consacrer à son foyer. Belinda Wong-Vacher répond : «There is no harm not being a professional woman and choosing having a family life. » Il y a aussi cette idée reçue que l’ambition est une qualité négative chez une femme et positive chez l’homme. Anne-Sophie Julienne, avocate, réagit en précisant : « La femme doit travailler plus dur pour aspirer à être au sommet. Pour progresser dans sa carrière, elle doit faire des choix. Certaines choisissent aussi de travailler à partir de la maison et avoir une famille signifie aussi mettre ces progrès en attente. Tout dépend du conjoint aussi, il y a des maris qui sont “very supportive” et d’autres non. »

Stéphanie Serret, directrice de marketing chez Winner’s, explique que dans certaines familles, les filles ont été éduquées pour avoir les mêmes chances que les garçons. « Nous ne devons pas être limitées dans ce que nous pourrions devenir. Aujourd’hui, dans certains bureaux, les femmes dirigent et nous devrions apprendre à nos filles à se donner les outils nécessaires pour atteindre leurs objectifs. » Elle raconte une anecdote amusante. Elle avait alors 20 ans et on lui a demandé de porter d’autres vêtements pour qu’elle paraisse plus âgée en vue de donner plus confiance à la clientèle. « J’étais outrée même si cela avait marché. Les compétences d’un jeune ne devraient pas se limiter à son âge. » Il y a aussi un mythe à briser selon lequel on dit toujours à une femme comment elle parvient à tout gérer : travail, maison, enfants, mari. « C’est inadmissible cette manière qu’ont certains de penser qu’une femme qui réussit en affaires ne doit pas avoir du temps pour consacrer à sa famille. Il y a aussi cette tendance à cataloguer la femme comme étant plus faible. L’autre jour, ma fille disait qu’elle voulait faire décoller une fusée et mon fils a dit : “Ce n’est pas fait pour les filles, car tu peux te faire mal”. Quand on parle d’égalité des genres, il faut aussi inculquer dès un jeune âge à un garçon et à une fille les mêmes discours sur les chances de réussite et qu’importe le métier choisi. »

Ces discussions animées par les femmes remettent aussi en question le concept de l’échelle d’entreprise en suggérant que l’ascension vers le succès est plus une confrontation de survie en pleine jungle avec de multiples chemins à contourner pour atteindre le sommet… Ainsi Shilpa Hirgi Nahaboo, qui évolue dans la construction et qui trouve difficile de faire entendre sa voix dans un milieu fait d’hommes, affirme qu’elle a réussi à dépasser ce “glass ceiling” en occupant un poste à haute responsabilité.

« L’égalité se jouera sur la parité des salaires hommes/femmes »

Pour Belinda Wong-Vacher, il y a aussi cette conception que les femmes sont dans la société représentées comme celles qui élèvent des enfants. « ll faut affirmer notre caractère et montrer qu’on est capables de gérer une entreprise aussi bien qu’élever son enfant ou tenir un foyer. C’est inadmissible cette manière qu’ont certains de penser qu’une femme qui réussit en affaires ne doit pas avoir du temps pour consacrer à sa famille. Il y en a aussi qui croient qu’une femme est née pour mettre au monde des enfants. Une femme qui travaille ne doit pas perdre ses repères. Certes, elle a son travail, sa famille, mais aussi ses parents, ses beaux-parents. Ce sont sur ces trois piliers que la femme se construit. Il faut avoir ce soutien pour ne pas sentir cette pression au boulot. Une femme doit être soutenue dans son travail et sa vie privée. »

Parmi les autres questions débattues, il y a celle de la femme qui renonce à sa carrière professionnelle pour sa famille. « Il ne faut pas transgresser les lois sur la discrimination à l’égard des femmes qui auront besoin de s’absenter du travail pour avoir des enfants, mais il faut plutôt amener ces mêmes femmes à se sentir à l’aise à prendre position même lorsqu’elles sont sur le point d’avoir un enfant. Go wherever you want to go and give yourself the tools to reach it », soutient Anne-Sophie Julienne. 

Olivia Bathfield, directrice de l’agence immobilière Fine and Country, trouve pour sa part que certaines femmes chefs d’entreprises ont aussi ce sentiment de culpabilité d’abandonner leurs enfants en occupant des postes à responsabilité : « We are torn between a career and this idea of bringing up a child. If we can’t choose, just hold your career for a while, when there is time you achieve the rest. » Dans le même ordre d’idées, Aruna Radhakeesoon, Chief Legal Executive chez Rogers & Co. Ltd, soutient : « Don’t feel guilty. Mon enfant est habitué à ce que sa mère aille travailler. Il s’agit pour nous, femmes, de nous affirmer. Parfois quand je peux et quand c’est permis, je l’emmène dans mes cocktails. C’est une manière de lui prouver qu’en dehors d’être sa maman, il y a aussi mon travail qui me permet de l’élever et de lui pourvoir une meilleure éducation. »

Et quid des réunions sociales ? Ce qui amène Bronwyn Corbett à se demander : « Why do only man have their club? What about us ladies? We should be able to be among ourselves having a nice dinner, a good wine and be able to have our space. Il devrait y avoir plus d’initiatives pour mettre les femmes en réseau, plus de reconnaissance de la part de la société sur la valeur ajoutée des femmes. En tant que femmes, on n’a pas besoin de copier les hommes pour réussir. Aujourd’hui les femmes peuvent accéder à des postes de haute responsabilité au sein des entreprises mauriciennes grâce au combat mené par les deux dernières générations de femmes pour ouvrir les portes à la nouvelle génération. Le changement viendra avec l’accession de plus de femmes à des positions stratégiques au sein des entreprises et cette révolution, voire évolution, est en marche. Le coaching des jeunes talents semble être une solution pour mettre en lumière les talents au féminin mais l’égalité qui reste à conquérir se joue désormais sur le plan de l’égalité entre les salaires hommes et femmes. »

Ce débat poussant la femme à voir au-delà de sa bulle de verre peut parfois générer des frustrations, comme l’indique Shyama Soondur, directrice de communication au sein du groupe ENL, qui parle d’inégalité de salaires entre l’homme et la femme. 

« When you step forward and claim your space you find the way. It’s a wide world, go where there is no glass ceiling. On est dans un système d’hommes fait par les hommes. It’s all about how we tackle it. À quand cette parité entre les salaires ?»

Suneeta Motala, Head of Marketing and Public Relations au sein d’AfrAsia Bank, trouve que les femmes doivent réaliser leurs ambitions. « Le pouvoir de l’éducation des filles commence à la maison. Les femmes doivent avoir une ambition claire. Pourquoi sommes-nous si peu représentées dans les conseils d’administration alors que beaucoup de femmes ont ce potentiel ?» Anne-Sophie Julienne soutient pour sa part : « Nous n’avons pas besoin d’une reconnaissance de la part des hommes, nous avons surmonté tous ces obstacles. »  Et Diane Watkins, directrice d’une agence immobilière d’enchaîner : « Si nous faisions partie d’un club d’hommes, on n’aurait pas eu cette opportunité de pouvoir nous exprimer. En tant que femmes, nous favorisons une prise de conscience et ce genre d’événement nous permet de nous rencontrer et de nous positionner vis-à-vis de notre carrière, de notre rôle, de femme et d’épouse, d’échanger nos cartes et nos idées et de renforcer notre conviction que les femmes ont un rôle à jouer dans la société et que la confiance et la détermination peuvent aussi les amener à pousser leurs maris à les rejoindre dans leur combat. L’autonomisation des femmes passe aussi par le support de leurs conjoints. » Suneeta Motala conclut : « Women empowerment is important as it helps companies to increase. There is a barrier in corporate life but women must have this girl power to reach for their ambition. »

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