INDUSTRIE CANNIÈRE: La grogne s’amplifie chez les petits planteurs

Le poids de la contribution des petits planteurs sous forme de primes versées au Sugar Insurance Fund Board est venu se greffer à l’incertitude quant au prix en baisse de la tonne de sucre payé par le Syndicat des Sucres. Dans la conjoncture, en l’absence de toute indication quant à la formule de la commercialisation du sucre avec l’expiration du Long Term Partnership Agreement entre le Syndicat des Sucres et Südzucker, la grogne ne cesse de s’amplifier au sein de la communauté des petits planteurs de cannes, qui réclament l’annulation du paiement de la prime, variant entre Rs 1 000 et Rs 2 000 par tonne de sucre, au Sugar Insurance Fund Board.
Pour traduire leur protestation, des membres de la Mauritius Planters Association ont pris la décision de laisser pourrir leurs cannes aux champs si des décisions ne sont pas entérinées en leur faveur. Ils comptent également saisir la Cour suprême avec leurs demandes dès la semaine prochaine.
Quelque 3 000 petits planteurs des 10 000 encore en activité ont signé une pétition réclamant un arrêt des déductions dans le prix de la tonne payé en vue d’être versées au Sugar Insurance Fund Board. « Dans le temps, sur chaque tonne de sucre, le planteur était obligé de verser entre Rs 7 000 et Rs 8 000 sous forme de Cess. Aujourd’hui, ce montant est tombé à Rs 1 000 et Rs 2 000 mais il faut également savoir que le prix payé par le Syndicat des Sucres est également à son niveau le plus bas. Presque du jamais vu. Ce montant, s’il n’est plus déduit, peut faire encore la différence pour la survie des petits planteurs », déclare Jugdish Goburdhun, animateur historique de la MPA.
Cet ancien ministre, qui a toujours gardé des liens organiques avec la communauté des petits planteurs, a pris la décision de donner l’exemple en n’envoyant pas ses cannes à l’usine, préférant les laisser pourrir aux champs. « J’ai pris cette décision car la situation des petits planteurs a atteint un point de non-retour. Ils ne peuvent plus poursuivre leurs activités. Il ne faut pas oublier que durant ces dix dernières années, au moins 20 000 petits planteurs ont abandonné leurs champs et dans les mois à venir les 10 000 autres pourront emboîter leurs pas. Ce qui se passe est dramatique », ajoute Jugdish Goburdhun.
La MPA s’attend à voir une intervention énergique du gouvernement en faveur des petits planteurs avec des directives au Sugar Insurance Fund Board par rapport aux déductions pour la prime. « We condemn the actual government for not keeping their promise of help. 80 % of small planters have not received a single cent out of the Rs 14 billion rupees to support the sugar cane industry from the European Union. Le Sugar Insurance Fund Board dispose de réserves de plus de Rs 7 milliards et a la capacité financière pour venir en aide aux petits planteurs, qui sont menacés de disparition », fait comprendre le président de la MPA.
À ce stade, très peu d’indications sont disponibles quant à la réaction officielle des autorités sauf que le Sugar Insurance Fund Board est actuellement en présence d’un rapport d’actuaires avec un état des lieux des finances de cet organisme et préconisant des mesures à prendre dans la conjoncture. Ces mêmes milieux concèdent que « de nombreuses incertitudes planent sur l’industrie cannière, avec notamment les effets conjugués de la baisse du cours mondial du sucre et des coûts de production élevés. Les répercussions de ces deux phénomènes se font sentir et il y a encore le flou sur le prix découlant de l’abolition des quotas de sucre en Europe après 2017 ».
D’autre part, la MPA dénonce le fait que de 1985 à la récolte sucrière de l’année dernière, les petits planteurs de cannes ne sont rétribués qu’à hauteur de Rs 7 par tonne de cannes pour la bagasse. « Avec une tonne de canne, un petit planteur perçoit Rs 7 pour les 350 kg de bagasse. Avec ce même poids de bagasse, les Independent Power Producers avec quelque 200 kWh obtiennent Rs 2 000, dont Rs 900 pour les IPPs et Rs 1 100 pour le CEB. La valeur marchande de la bagasse, de l’écume et de la mélasse est de l’ordre de Rs 3 900 par tonne alors que le petit planteur n’obtient que Rs 100 ; il est temps de revoir cette situation », affirme la MPA.
Jugdish Goburdhun avance que Maurice aurait dû prendre l’exemple de l’Inde où le gouvernement accorde des subventions aux petits planteurs pour leur permettre de survivre. « But in Mauritius, it is the contrary. Small planters are subsidising everyone, including the CEB, the IPPs and the sugar factories », devait-il conclure.
Toutefois, sans vouloir susciter la sinistrose, des petits planteurs cachent difficilement leurs inquiétudes devant la possibilité d’une nouvelle révision à la baisse du prix du sucre par le Syndicat des Sucres d’autant plus qu’il est accepté que « the sugar price is predicted to fall even further from the 2013 level whilst production costs are steadily increasing ».

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