Industrie locale : des Kenyans à la découverte des produits mauriciens

70 rendez-vous d’affaires sur mesure pour une dizaine d’entreprises
Malgré les difficultés, l’industrie locale a la volonté de s’accrocher pour se maintenir à flot, notamment en cherchant des marchés d’exportation et possibilités de partenariats à l’échelle régionale. C’est dans cette optique que l’Association of Mauritian Manufacturers (AMM) vient d’organiser une deuxième mission export ‘B2B’ au Kenya.

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Sans l’aide du gouvernement et sans grands moyens, la petite association a su motiver une quinzaine de ses membres – industriels et fournisseurs de services – à s’autofinancer pour aller participer à des rencontres B2B à Nairobi au Kenya, territoire stratégique d’Afrique de l’Est qui peut servir de plateforme d’entrée pour les produits mauriciens en Afrique de l’Est. Les représentants de MCFI, Labelling Industries, RT Knits, Mauvilac, Sofap, Oxenham, T&T International Food, Palco et MFD ont rencontré des industriels et entreprises kenyans. Pour les responsables de l’AMM, le fait que chaque membre s’est autofinancé pour se rendre au Kenya est un signal fort; cela montre « la résilience du secteur et notre volonté de nous accrocher malgré les difficultés et d’avancer dans la démarche de l’export qui est complexe et qui se met en place graduellement ».

Au Kenya, tous les industriels kenyans rencontrés ont pu se rendre compte de la qualité des produits mauriciens. Et ces interlocuteurs kenyans n’ont pas été ciblés au hasard. Très influents sur leurs marchés respectifs au Kenya, ils regroupaient entre autres deux leaders de la peinture, une grande enseigne européenne de la grande distribution et leader en Afrique, sans oublier Bidco Africa Ltd (basé dans la zone industrielle de Thika), un important conglomérat kenyan et Keda Ceramics (incluant la compagnie Twyford), un des plus gros fabricants de céramiques au Kenya.
L’AMM déploie sa démarche export depuis 2018 avec l’aide de Patrick Lecoy, directeur général d’EAD (Export Assistance & Development), qui avait proposé l’organisation d’une première mission d’exploration et de découverte des opportunités au Kenya et en Afrique de l’Est et ce deuxième voyage, exclusivement consacré à des rendez-vous d’affaires sur-mesure. Et le ‘feedback’ des opérateurs kenyans rencontrés a été plus que positif, selon les opérateurs mauriciens ayant fait le déplacement. « Ils ont tous vanté la qualité des produits mauriciens et ont même dit qu’ils étaient surpris par la diversité de notre secteur manufacturier », expliquent-ils.

Ces rendez-vous d’affaires sur mesure ont permis aux entreprises participantes de ne pas « éparpiller » leurs efforts, comme le souligne Guillaume Jauffret, directeur des ventes chez Sofap. « Nous voulions éviter d’éparpiller nos efforts et notre énergie. Notre but est d’établir des contacts avec des collaborateurs potentiels intéressés par notre expertise dans le domaine des revêtements décoratifs et de protections. Nous voulons mettre en place une activité commerciale conjointe », dit-il. « Nous avons eu quelques rendez-vous très intéressants. Cependant, cela reste une première prise de contact. Il est un peu tôt pour parler de retombées positives. Nous avons certainement l’ambition d’approfondir certaines opportunités de synergie avec certains contacts. » Quoiqu’il en soit, cette mission au Kenya a permis à Sofap de mieux comprendre les opportunités et contraintes que représente le marché de l’Afrique de l’Est et ainsi mieux adapter son approche aux spécificités de ce marché. « Le Kenya est non seulement un marché relativement ouvert mais aussi le plus gros marché économique de l’Est et du centre de l’Afrique avec un accès facile et une excellente connexion logistique terre, mer et air avec les pays de la région. Même si faire du business peut être compliqué par la lourdeur administrative surtout au port et aux douanes, le Kenya fait partie des pays d’Afrique de l’Est ayant un fort potentiel de développement. Nous avons senti une réelle volonté d’assainir et de faciliter l’activité économique. Dans tous les cas, nous mettrons notre effort et notre énergie pour nous donner toutes les chances de réussir. »

Pour sa part, Harjinder Mann, Sales & Marketing Manager chez Labelling Industries (World of Labels), se réjouit de cette deuxième mission kenyane : « Nous avons identifié quelques opportunités commerciales-clé sur lesquelles nous travaillons actuellement. L’AMM a été un atout majeur pour obtenir des réunions avec d’autres entreprises. Elle a été capable de connecter et d’organiser des réunions avec les bonnes personnes. Ce qui nous a permis de rencontrer jusqu’à sept entreprises différentes en une journée. » Il ajoute que les contacts et les informations obtenus lors de ce voyage sont essentiels à la planification stratégique future de l’entreprise.
Kendall Tang est également emballé par sa participation à cette mission qui pourrait porter ses fruits très prochainement pour l’entreprise qu’il dirige, à savoir RT Knits. « L’un des contacts rencontrés est très intéressé par nos produits. Nous pensons qu’il y a de fortes chances qu’une première commande se concrétise. Ce qui nous différencie des concurrents locaux, c’est la variété de l’offre et la qualité des produits. » Il met l’accent sur la nécessité de connaître tous les rouages du marché kenyan avant de se lancer dans des partenariats. « Avant de participer à cette mission, nous avions déjà des clients au
Kenya, mais nous n’avions pas réellement de stratégie pour augmenter nos exportations. Après ces deux missions, nous comprenons mieux le marché et avons une approche plus stratégique. Le marché kenyan est compétitif. Nous devons sélectionner les produits adaptés pour pénétrer ce marché »


Hans Herchenroder : « Une demande pour l’entreposage moderne »

Hans Herchenroder, Chief Commercial Officer de MFD (Mauritius Freeport Development), explique que : « La MFD aborde une phase de son développement qui nous mène au-delà de Freeport zone 5, là où on a toujours été, et, dans cette réflexion, bien sûr, on se tourne naturellement vers l’Afrique. Ces deux dernières années de prospection nous ont montré qu’il y a une demande pour l’entreposage moderne avec des systèmes informatiques. Et c’est là où nous pensons que MFD a une carte à jouer. L’AMM a réussi un joli coup.
 Elle associe non seulement les industriels, le marché africain que prospectent les industriels, mais aussi vient potentiellement, à travers la MFD, offrir une solution de logistique. Il faut bien comprendre que la plupart du commerce international s’appuient énormément sur la logistique, qui représente un des gros problèmes en Afrique. Cela explique le faible pourcentage du commerce intra-africain. Aujourd’hui, nous accueillons positivement cette démarche de l’AMM pour aider à ouvrir les marchés africains avec une solution logistique à travers la MFD. »


Bruno Dubarry, CEO de l’AMM : « Nous avons réussi un tour de force »

Êtes-vous satisfait de cette deuxième mission ?

Oui, notre objectif était d’organiser sur trois jours, des rendez-vous d’affaires répondant aux spécificités sectorielles de ces membres ou, s’ils étaient déjà avancés dans leur démarche commerciale, les faire rencontrer certains opérateurs en particulier. 70 rendez-vous ont été organisés. C’est un tour de force pour une association comme la nôtre de mobiliser 10 entreprises qui n’ont bénéficié d’aucun support financier d’aucune institution – publique ou privée – pour l’organisation de ces rendez-vous B to B et leur déplacement.

Vous privilégiez l’approche collaborative. Pourquoi ?


L’approche collaborative est une étape dans le continuum de l’export pour une entreprise. Pour notre public, des industriels et des services à l’industrie, nous avons choisi une approche vraiment sectorielle, manufacturing. Les entreprises n’ont pas nécessairement bénéficié de cette approche ailleurs, c’est-à-dire dans d’autres missions, comme des foires internationales ou régionales. Elles avaient essentiellement profité auparavant de missions organisées collectivement sur une base multisectorielle.
 Elles n’avaient pas encore eu une mission sur mesure non seulement par rapport à leur secteur, mais par rapport à leur réalité d’entreprises. Donc, cela justifie effectivement l’approche collaborative. Cette approche n’en est qu’à ses débuts tant au niveau des marchés visés que des participants. Elle sera donc duplicable sur d’autres territoires, d’autres marchés, pas uniquement de l’Afrique de l’Est. C’est une phase dans le continuum export. Il y a d’autres phases collaboratives dans le cheminement à l’export d’une entreprise manufacturière : pouvoir bénéficier de facilités logistiques, facilités légales, facilités bancaires, assurance, crédit, facilités de distribution et services associés. Il s’agit là d’une extension de notre travail d’association et de fournisseurs de solutions collectives. Nous devons connecter les bons acteurs à Maurice comme au Kenya ou les autres marchés visés. Nous devons travailler avec ces fournisseurs potentiels ou existants sur une offre à des tarifs préférentiels ou adaptés aux réalités de nos industriels. Cela s’applique notamment aux fournisseurs de services entrés dans notre démarche pilote.
 La démarche pilote doit se pérenniser et permettre à d’autres entreprises manufacturières qui souhaiteraient s’engager à l’export de se connecter à un écosystème constitué de facilitateurs de fournisseurs de services et de solutions à l’export.

Après cette deuxième mission au Kenya, quelles sont les prochaines étapes ?

Les entreprises qui ont participé à cette deuxième mission devront creuser les pistes les plus sérieuses. Cela nécessitera des voyages complémentaires ou des accompagnements avec l’expertise de EAD. Prochaine étape aussi sur d’autres marchés, peut-être des marchés voisins qui sont la Tanzanie, le Mozambique, l’Ouganda, le Rwanda. Il y a d’autres secteurs économiques mauriciens présents dans ces territoires. Nous avons aussi des membres dans les Services à l’industrie qui ont un pied dans ces territoires. Donc, nous disposons d’un réseau existant mais peu utilisé qui représente un relais de croissance pour notre démarche export. Nous avons un travail à faire : mailler ce réseau à ces acteurs et organiser des occasions de rencontres et de partage d’expériences. C’est aussi pour ça que la démarche export passera par des missions répétitives sur ces mêmes destinations pour établir, dans le temps, un vrai corridor d’affaires entre Maurice et Kenya.

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