INSTITUTIONS : Il reçoit sa lettre diligentée par la présidente de la République à… 22h40 et dénonce la dictature

Me Brian Glover, jusqu’à fort tard dans la nuit de vendredi à samedi derniers encore président de la Commission pour l’égalité des chances (EOC), avoue qu’il s’attendait à ce que le couperet tombe, mais quand même pas à…  22h40 ! Le gouvernement n’a effectivement pas renouvelé son contrat au poste de président, non plus ceux de ses deux assesseurs, MM. Rajeshwur Bhowon et Sameer Mohuddy. C’est, apprenons-nous, dans un tintamarre de sirènes de la police avec des girophares qui aura poussé plus d’un de ses voisins à se réveiller pour regarder par les fenêtres ce qui se passait, que Brian Glover s’est vu remettre sa feuille de route diligentée par la présidente de la République, Ameenah Gurib-Fakim, agissant sur la demande du Premier ministre.
Il est vrai que le contrat de Brian Glover et de ses assesseurs était officiellent arrivé à expiration depuis dimanche dernier à minuit et que rien n’obligeait le gouvernement de l’alliance Lepep à les reconduire. D’autant que les trois concernés avaient été nommés par l’ancien gouvernement travailliste. Mais, au vu des dossiers brûlants sur lesquels la Commission enquêtait, particulièrement, ceux de la nomination controversée de Mme Vijaya Samputh à la direction de Cardiac Centre par le ministre Anil Gayan et de Youshreen Choomka comme directrice de l’Independant Broadcasting Authority (IBA) l’issue était prévisible. Le sursis de Glover et de ses assesseurs n’a ainsi pas duré plus d’une semaine…
« Je trouve choquant et très mesquin de la part du gouvernement d’agir de cette façon. Il n’y avait aucune nécessité de faire tout ce tapage à une heure avancée de la nuit pour me remettre une lettre qui aurait pu attendre le lendemain matin. Cela n’aurait absolument rien changé à la donne. Et, c’est à mon fils que j’ai dû expliquer pourquoi la Police est venue faire du bruit devant ma porte. On ne vit plus dans un Etat de droit et si, aujourd’hui, le peuple n’a pas encore réalisé qu’on est en dictature, il ne s’en rendra jamais compte. Quant à moi, cela me motive d’aller encore plus loin dans mon engagement à combattre toute velléité dictatoriale », déclare Brian Glover.
Que devrait-on comprendre par « aller plus loin », si ce n’est un euphémisme pour entrer en politique active. Rappelons que Brian Glover avait ouvertement confié qu’aux dernières élections générales, il avait été pressenti pour une investiture travailliste par Navin Ramgoolam lui-même avant que ce dernier ne joue à l’abonné absent à l’approche du dépôt des candidatures. Dans la mesure où il avait exprimé « sa déception » de Paul Bérenger, un homme dont il disait admirer jadis, Brian Glover reviendrait-il à ses anciennes amours ? A la question, l’intéressé répond : « Je crois que le pays a besoin d’un nouveau souffle. »
Quid de l’enquête dans la nomination unilatérale de Vijaya Samputh au Cardiac Centre par Anil Gayan qui — consolation — se retrouve déjà au niveau supérieur du Tribunal pour l’égalité des chances présidée par Denis Vellien, c’est pour le dossier impliquant Youshreen Chomka que Brian Glover dit s’inquiéter maintenant. « Je pense sincèrement que le gouvernement ne nous permettra pas de compléter l’enquête », se désole-t-il. Cette enquête, a-t-il confié, « sent mauvais et des faits assez perturbants ont été relevés à la lumière des dépositions déjà enregistrées par l’EOC ».
Le cas Choomka
Cette affaire concerne le recrutement de Youshreen Chomka au poste de directrice de l’Independent Broadcasting Authority (IBA) dans des circonstances troublantes. Alors qu’elle était déjà la présidente de cet organisme de surveillance des médias, Youshreen Chomka s’est fait interviewer par une firme privée pour un poste de directrice en prétendant qu’elle ne savait pas que c’était justement l’IBA qui était en train d’embaucher sa directrice. Sa candidature a ensuite été retenue par le Conseil d’administration de l’IBA, dont elle avait démissionné pour laisser la place à son adjoint à la présidence, l’ex-Permanent Secretary Jugdish Dev Phokeer. Le nouveau poste de Youshreen Choomka lui a permis de tripler son salaire, mais deux postulants qui ont senti leurs chances lésées se sont plaints auprès de la commission, non sans mettre l’accent sur sa proximité avec le MSM.
C’est la firme privée Alentaris, dirigée par M. Thierry Goder qui s’est occupée des procédures de recrutement, mais, selon Brian Glover, « bien que l’IBA ait eu recours à une firme privée, nous pensons, à la commission, que la procédure n’a pas été si parfaite que cela ».
Par exemple, a-t-il souligné, « Alentaris n’était pas au courant qu’un premier exercice d’embauche avait déjà avorté en décembre 2015 grâce à l’intervention du Sollicitor General, Me. Dhiren Dabee, agissant en sa qualité de membre du ‘board’ de l’IBA, et ce parce qu’il était clair qu’on voulait déjà y installer Youshreen Choomka comme directrice ».
Ensuite, parmi d’autres faits perturbants notés il y a, selon Brian Glover, les démentis apportés par le directeur d’Alentaris à des versions données par Jugdish Dev Phokeer, ancien Permanent Secretary du ministère de la Technologie, de la Communication et de l’Innovation et président adjoint du board de l’IBA. « A la commission, nous entretenons de sérieux doutes quant à la véracité des versions de M. Phokeer par rapport à celles de M. Thierry Goder et, qui plus est, l’ex-Permanent Secretary s’est permis de solliciter la présidence de la Commission en plusieurs occasions, alors qu’une enquête était en cours », dit-il.
Selon Brian Glover, vendredi dernier, M. Phokeer a clairement essayé d’influencer l’enquête de la commission et de justifier la décision de recruter Youshreen Chomka. De son côté, M. Phokeer nie et soutient avoir téléphoné au président de la Commission uniquement pour clarifier certains points de sa déposition.
Bien que le Premier ministre ait déjà sélectionné quatre remplaçants pour siéger à l’EOC, et consulté le leader de l’opposition, la question est de savoir si ceux-ci auront vraiment les coudées franches pour établir la vérité tant dans le cas Choomka que dans celui de Vijaya Samputh. Pourtant, la crédibilité de la Commission auprès des citoyens en dépendra…

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