JARDIN DE PAMPLEMOUSSES : Un expert au lieu d’un nominé politique espéré à la tête

Des fruits qui jonchent le sol, des branches cassées, des amas de feuilles en putréfaction, accumulation d’eau : le passage du cyclone Bansi dans l’île la semaine dernière n’a pas épargné le Jardin de Pamplemousses. Cependant, dès jeudi, le jardin, fermé pour trois jours en raison de l’alerte II de Bansi, a rouvert ses portes. Au grand dam des employés qui font ressortir que le Jardin de Pamplemousses n’est pas en état d’accueillir les visiteurs. Il aurait fallu au préalable un assainissement de l’environnement, disent-ils. Et de profiter de l’occasion pour déplorer “le déclin du Jardin botanique” qui perd de plus en plus de sa valeur historique. La cause, selon les employés et d’autres habitants de la région : une mauvaise administration. D’où l’appel lancé au gouvernement pour revoir la gestion du jardin qui ne devrait pas être mis entre les mains d’un nominé politique, disent-ils, mais d’une personne indépendante, qualifiée et possédant une expérience reconnue en botanique.
L’état actuel du Jardin de Pamplemousses inquiète ses employés et les habitants de la région. S’il est normal qu’après le passage d’un cyclone, des détritus, feuillages, et autres branches jonchent le paysage, il est inacceptable qu’en temps normal, le spectacle qu’offre le jardin désole les visiteurs. C’est ce que font ressortir certains employés, pointant du doigt les nombreuses failles qui font qu’aujourd’hui le Jardin botanique de Pamplemousses n’a plus le même attrait historique. Outre la menace qui pèse sur les plantes, plusieurs coins du jardin sont dans un état déplorable, avec tantôt des étangs puants remplis de détritus, tantôt des ponts délabrés.
Si, en 2012, avec le remaniement du board du Trust Fund responsable de la gestion du jardin botanique et la nomination d’un nouveau directeur, un espoir était né chez les employés et autres habitués que le jardin allait connaître des changements positifs vers un nouveau dynamisme, tel n’a pas été le cas, indiquent les défenseurs du Jardin de Pamplemousses. “Au contraire, au lieu d’un jardin botanique, le Jardin de Pamplemousses est en train de mourir et on est en train d’y installer des plantes de jardin”, disent-il. A titre d’exemple, ils citent l’abattage de certains arbres rares, remplacés par des fougères et autres plantes “banales”. “Des Albizia Carribea (Bois Noir) ou des palmiers multipliants de Madagacar ont été enlevés, soi-disant à cause des termites, et remplacés par des Acalypta (Queue de Renard)”, déplorent certains employés. Et d’ajouter que des Palmiers ont été déracinés et plantés à une autre place dans le jardin, provoquant la mort de ces arbres.
Conditions déplorables de certains employés
“Ils sont en train de faire tout et n’importe quoi. Juste pour dire qu’ils font quelque chose alors que ce qu’ils font a des effets néfastes sur le jardin”, disent-ils. Déplorant ainsi les actions prises par l’administration du Jardin, les détracteurs s’insurgent qu’”auparavant, c’est le Jardin de Pamplemousses qui agissait comme pépinière. Mais désormais, depuis la nouvelle constitution du board, l’on s’approvisionne auprès des pépinières”. De même, disent-ils, non seulement les plantes botaniques sont en danger, mais l’entretien du jardin également. Le recrutement d’une quinzaine de personnes avant les élections font sourciller plusieurs anciens employés qui soutiennent que “finn emploient dimoun alors ena simoun ti vin fer interview en juillet 2014 pas fin gang travay”. Selon eux, l’administration aurait recruté des hommes de l’ancien ministre de l’Agro-industrie. “Et sa bann dimoun la, zot pana sot place dans jardin”, disent-ils, profitant de l’occasion pour déplorer les conditions de travail de certains employés au sein du jardin.
Plusieurs General Workers font état de leurs conditions de travail “peu évidentes”. De 7h à 15h quotidiennement, sauf le dimanche, ces personnes doivent ainsi s’assurer de balayer, défraîchir, nettoyer les canaux, etc. “Mais nous n’avons aucun matériel pour nous protéger, pour nous laver”, disent-elles. C’est ainsi, par exemple, que c’est sans gants que des femmes ramassent les feuilles dans le jardin, disent-elles. “Meme bottes nou pa gagné”, disent certaines, indiquant qu’elles portent les bottes de leurs proches pour venir travailler. “Avec Rs 200 par jour, li pa facil sa travay nou fer la”, racontent-elles, soulignant qu’elles doivent aussi, entre autres, nettoyer les ruisseaux, enlever les escargots, etc. Leurs salaires, déplorent-elles, n’est pas le même que celui touché par les employés du Trust Fund. “Enn enn discrimination. Seki employé par Trust gang plis kass ki nou”, affirment-elles. De même, “kan fini travay, pana meme enn solution pou nou lave nou la main”, disent-elles. Elles ajoutent que pour manger, c’est une autre galère. Le toit en chaume de la plupart des kiosques dans le jardin est troué. “Souvent, c’est sous une pluie dégoulinante que nous nous asseyons pour manger”, racontent ces General Workers. D’autres catégories employés ne sont pas mieux loties.
“Mem avec nouveau administration, tou enba la haut”
Alors que la grande porte d’entrée du Jardin de Pamplemousses, faisant partie du patrimoine du jardin, n’est supposée, selon les employés, être ouverte que lors de grandes occasions, à la venue de VVIP, depuis quelque temps, c’est à longueur de journée que les officiers de la sécurité doivent ouvrir et fermer cette porte. La raison : les allées et venues des membres de l’administration, ou encore d’autres employés qui viennent travailler en voiture. “Zot aller-vini, et chak fois bizin ouvert la porte, fermé. Couma dire enn zoué”, déplorent certains employés, indiquant qu’en outre, les membres de l’administration disposent d’un parking situé der-rière le château et qu’il n’y a pas lieu pour eux de passer par la grande porte. “Me ici, mem depi nouveau administration inn prend, tou enba la haut”, racontent les employés. Ils soutiennent également que le problème de sécurité à l’intérieur du jardin et dans le parking perdure. Si des officiers de sécurité ont été recrutés pour ces jobs, selon certains employés, depuis quelque temps, ils ne savent plus ou donner de la tête, car ils sont également affectés au contrôle des tickets d’entrée. “L’administration avait employé un staff pour ce job, mais ce staff a disparu et reste à l’intérieur des bureaux. Aujourd’hui, ce sont les officiers de  sécurité qui font ce travail, et du coup, ils ne peuvent pas s’assurer de la sécurité dans le jardin où des arnaqueurs sont toujours à l’affût”, disent les détracteurs. Même situation aux abords du parking où, selon les habitants de la localité, rodent drogués et autres malfrats, incommodant les touristes.
Pour plusieurs habitués du Jardin de Pamplemousses, cette situation de déclin s’est amorcée depuis que l’accès au jardin est payant. “Avant, quand c’était gratuit, tout allait bien. Même au niveau de l’entretien, le jardin était très bien. Aujourd’hui, les touristes se plaignent”, racontent les habitants de Pamplemousses. En cause, selon eux, les nominés politiques qui sont placés à la tête du jardin. “Aujourd’hui, il paraît que c’est quelqu’un qui a des qualifications qui gère le jardin, mais il est sous le contrôle des politiciens. Tout ce qu’il a fait a été dirigé d’en haut. Même les gens qui ont été recrutés, etc. Le Jardin botanique a perdu son cachet”, disent-ils. D’où l’appel qu’ils lancent au nouveau gouvernement pour “sauver le Jardin de Pamplemousses”. “Nous avons un patrimoine historique. Nous avons un bijou. Le jardin doit retrouver son attrait botanique. Pour cela, il faut quelqu’un d’indépendant, de qualifié et qui possède une expérience en matière botanique. Ce n’est pas parce qu’on a travaillé au National Parks, ou au Bois et Forêts qu’on sait ce que botanique veut dire”, disent les défenseurs du Jardin de Pamplemousses, réclamant un “vrai expert” pour le jardin botanique.

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