JEANOT BARDOTTIER : Je ne pouvais laisser passer une telle chance

Après trois journées «sans», l’entraînement Gujadhur s’est réveillé à l’occasion du quatrième acte. Le réveil a été brutal pour ses adversaires puisqu’il a ramené un triplé, le premier du nouvel exercice. Bien que son état major n’ait investi que dans quatre nouveaux à ce jour, Ramapatee Gujadhur peut espérer aller au delà de ses objectifs savec Jeanot Bardottier, l’étoile montante du turf mauricien, qui rêve de plus grand cette saison.
Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis son baptême du feu sur Big Bad John le 20 octobre 2007. Encore inexpérimenté à l’époque, mais visiblement pas dénué de talents, Jeanot Bardottier prit ce jour-là la quatrième place sans toutefois pouvoir inquiéter le vainqueur qui s’imposait pas plus de 6L. Depuis, il a graduellement trouvé ses marques, s’est amélioré et a pris du galon pour se forger aujourd’hui une solide réputation sur le turf mauricien. « Je ne suis pas celui qui effectuait ses débuts au Champ de Mars il y a environ sept ans. Je considère que j’ai beaucoup gagné en expérience et en maturité durant ces années. J’ai une lecture plus efficace sur le déroulement d’une course et j’ai une meilleure balance dans la ligne droite», lance le jeune cavalier d’un ton ferme.
Jeanot Bardottier, il faut le dire, a régulièrement visité la chambre des commissaires ces dernières saisons, car il était souvent à l’origine d’interférences en course. Du reste, ces écarts lui avaient coûté une suspension qu’il purgeait toujours lors des deux premiers rendez-vous. «L’année dernière, j’ai commis quelques erreurs d’interférence. J’ai beaucoup travaillé dessus durant la trêve et j’ai essayé de trouver comment me corriger. Désormais je me montre plus prudent lorsque je me rabats à la corde. Je ne dis pas que je suis irréprochable à 100%, mais je trouve que je m’améliore au fur et à mesure»,  nous a expliqué Bardottier.
Conscient des qualités du cavalier mauricien, Ramapatee Gujadhur, qui a été associé à quelques très fines cravaches ces derniers temps, à l’instar de Damien Oliver ou Noel Callow, prit tout le monde de court à la fin de la saison 2014 en signant Jeanot Bardottier. L’entraîneur qui avait remporté 38 victoires pour terminer à la quatrième place au classement général l’an dernier, dit toutefois avoir revu ses ambitions à la baisse pour le présent exercice et qu’il serait «satisfait si on remporte une vingtaine de courses». Bardottier qui avait piloté 24 gagnants et qui luttait même pour le championnat à un certain moment espère, lui, faire mieux que l’année dernière. «Lorsque j’ai eu cette offre pour monter pour l’entraînement Gujadhur, je me suis dit que je ne pouvais laisser passer une telle chance. Avec un effectif de 35 éléments compétitifs, je m’attends à une très bonne saison. J’espère pouvoir faire mieux que l’année dernière, surtout si je parviens à corriger mes défauts d’interférence en course. Il y a une bonne entente à l’écurie entre l’entraîneur, l’assistant-entraîneur, les jockeys, le chef palefrenier et le vétérinaire, et il n’y a pas de pression. Je m’attele à la tâche à l’écurie depuis début décembre et comme vous pouvez le constater, je suis toujours régulier à l’entraînement. Aujourd’hui c’est cela qui porte ses fruits».
Vu que son jockey attitré n’était pas en action lors des deux premiers rendez-vous, l’entraînement Gujadhur a démarré sa saison prudemment, d’abord avec un unique partant pour la journée inaugurale et deux pour la suivante. «Je suis attaché à l’entraînement Gujadhur depuis décembre 2014. J’avais informé mon employeur que ne pourrai monter lors des deux premiers rendez-vous vu que je devais purger une suspension. C’est pour cela que nous ne nous sommes pas pressés avec nos chevaux à l’entraînement. Nous leur avons accordé le temps nécessaire pour venir en forme tout seul. Reste que lors de ces deux premières journées, lorsque j’ai vu les autres jockeys en action, j’ai ressenti une montée d’adrénaline. Mais que voulez-vous, il faut prendre son mal en patience. J’étais toujours conscient de la situation et je ne me suis pas pressé. Même en course, je ne me suis pas précipité. Vous savez, lorsque vous n’avez pas gagné pendant un bon bout de temps, il arrive que  vous perdiez votre sang-froid et que vous commettiez des erreurs, que vous perdiez le rythme en course. Je ne me suis pas mis la pression et cela a payé aujourd’hui».
Afin de pouvoir respecter ses engagements, Jeanot Bardottier a dû surmonter un problème de taille qui l’avait handicapé ces dernières années. En effet, le Mauricien est confronté à un ennui au niveau de son poids. Outre des exercices physiques, il a dû se soumettre à un régime afin d’atteindre un poids raisonnable. « Depuis janvier j’ai commencé à me remettre en forme. Je faisais mon footing à la raison de deux fois par jour. J’ai aussi revu la façon de me nourrir. Je tiens là à remercier le MTC qui avait disposé d’un cours sur la nutrition en mars dernier. J’ai commencé à suivre un régime. Par exemple, on peut manger trois fois par jour, mais il faut bannir les matières grasses et les aliments à base de sel», nous a confié Bardottier. De 62kg en début d’année, son poids se situe aujourd’hui aux alentours de 56kg et il monte à 57.5kg. Même s’il n’est pas un light weight jockey, cela ne pose pas de problème à son entraîneur. « Avec la compétition de nos jours, nous n’avons pas beaucoup de chevaux qui courent avec de petits poids sur le dos et nous avons Rakesh pour le suppléer dans ces cas-là».
Après avoir échoué de peu sur Captain Matthew lors du troisième acte, Bardottier n’a pas laissé passer sa chance samedi dernier. Kremlin Captain était celui que l’on attendait le plus, mais il n’était finalement que le troisième gagnant de Ramapatee Gujadhur qui était sorti en piste plus tôt pour accueillir Bulsara et Blood Buccaneer. «Sur le papier on s’attendait à notre première victoire samedi. Les chevaux commençaient à trouver leur forme, même s’ils ne sont pas encore à 100%, à l’instar de Kremlin Captain. Il n’avait pas encore atteint son peak, mais c’est un cheval de classe». En dépit du fait qu’Adi Star comptait une dizaine de longueurs d’avance à mi-course, Bardottier ne paniqua pas. «J’étais le favori de la course. Je savais que Adi Star était un cheval de 1000m et qu’il était parti un peu vite. J’ai laissé mon cheval pick up tout seul. Comme vous l’avez sans doute remarqué, même à l’entrée de la ligne droite je n’avais pas fait mon move. J’ai attendu le poteau des 1500m pour lui demander un effort. Je l’ai monté hands and heels, car il allait si bien qu’il n’était pas nécessaire d’utiliser la cravache. C’est le genre de cheval qui répond à tout ce que vous lui demandez. Il a peut-être un mauvais caractère mais il a un grand coeur». Kremlin Captain répondit favorablement aux sollicitations de son cavalier pour dominer ses rivaux avec une certaine assurance. Cette victoire permet à ce fils de Captain Al d’être éligible pour participer à la première manche du championnat des 4-ans qui se tiendra lors de la sixième journée sur 1400m et où sa candidature devra être prise très au sérieux.
C’est Bulsara engagé dans l’épreuve principale qui ouvrit le compteur du tandem Ramapatee Gujadhur-Jeanot Bardottier. On l’avait un peu oublié dans ce champ où Love Struck, Polar Royale et One Cool Dude étaient les plus chuchotés, mais le bai de 8 ans démontra sa classe à l’issue d’un parcours limpide et une belle monte de son jockey pour mettre tout le monde dans le rouge. «J’étais assez confiant parce que Bulsara court bien sur sa fraîcheur. J’avais demandé à Jeanot de ne le monter que dans la ligne droite car il a une pointe de vitesse dévastatrice. Love Struck a été très malchanceux. Il a trébuché et a eu une course très difficile. Cela me fait un grand plaisir de voir Jeanot remporter sa première course pour l’équipe. Je dédie cette victoire à Barti (Praveen Nagadoo) qui a beaucoup donné de sa personne depuis le début de l’année», a déclaré l’entraîneur à chaud à l’issue de ce succès.
Si Bulsara et Kremlin Captain s’imposèrent facilement, en revanche, Blood Buccaneer ne s’imposa que d’une courte tête dans la septième épreuve. Le représentant de l’entraînement Gujadhur fut même contraint de changer de ligne lorsque le passage se referma devant lui, mais bien accompagné par son cavalier, il vint coiffer Rear Admiral au poteau. «C’était une course difficile, mais Blood Buccaneer était le cheval le plus fit de l’écurie. En dépit du fait qu’il fut aligné dans une classe supérieure, on lui accordait une chance. Au 600m j’ai dû prendre des risques car il y avait plusieurs coursiers qui bougeaient devant moi. Blood Buccaneer n’est pas un cheval qui accélère promptement. Ce qui m’a impressionné, c’est que lorsque j’ai dû changer de ligne, il a bien sprinté».
Si l’heure était à la fête à l’issue de la journée, Bardottier n’a pas oublié sa famille qui lui apporte un soutien indéfectible dans toutes les circonstances. « Dans ce giron la famille est très importante, car c’est un métier où il y a souvent des pressions, des hauts et des bas. Ma famille m’apporte le soutien nécessaire dans les épreuves. C’est cela qui m’aide à devenir plus fort. Il y a aussi mon fils qui est très attaché à moi et qui est un grand fan des courses. Je ne veux pas le décevoir».

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