Jeunes, politique et société

Une des problématiques de l’avenir du pays est la jeunesse et les jeunes. Il faut faire la place aux jeunes ! Souvent nous entendons des réflexions sur la jeunesse par ceux qui ne sont plus jeunes. Un ami partageait ses commentaires et réflexions sur ce que devrait faire la jeunesse d’aujourd’hui. Essentiellement, cela portait sur la nécessité d’une ‘révolution intellectuelle’ comme cela a été le cas avec la naissance du MMM en 1969. C’était le temps des idées, des débats pour dégager et proposer un projet de société. C’était un mouvement porté par la jeunesse et qui a culminé à notre mai à nous, mai 75.
Mais où sont les jeunes aujourd’hui? Rejoignant de nombreux « observateurs », un ami trouve que la jeunesse aujourd’hui passe son temps sur son ordinateur, « vey zafer lezot » et ne se sent nullement concernée par la société et ses problèmes, encore moins par la politique. Elle serait individualiste, voire narcissique. Elle est perdue, paumée, à la recherche de repères et en quête de sens. Une bonne partie vit dans le virtuel, sur les réseaux sociaux où elle est victime de leurs travers – selfies, culte de soi, dictature de l’image. Ce constat est sévère, mais a le mérite de dire ce qui paraît être « une vérité » pour beaucoup d’entre nous. Gardons-nous du seul constat, d’aller vite en besogne, de critiquer et blâmer pour essayer de comprendre ce que tout cela révèle. Pour aujourd’hui, nous nous contenterons de quelques pistes de réflexion.
Il y a le regard des aînés, ceux qui ont connu 1969 et 1975, qui comparent tant pour critiquer les jeunes que pour raconter avec fierté leur époque à eux. Nostalgie quand tu nous tiens ! Comparer ainsi ces deux époques sans apprécier l’histoire du monde et de notre pays durant les derniers 50 ans avec ses avancées, ses reculs et régressions, ses transformations structurelles et mutations profondes, n’est pas juste. C’est superficiel et n’aide pas à comprendre une réalité forcement complexe.
Et que dire à cette jeunesse qui rappelle aux aînés que le monde dans lequel elle vit aujourd’hui est un héritage de leur génération ? Et il n’est pas beau en termes de « valeurs » dominantes, du sens de la vie en société, de la démission et abdication des élites. Le spectacle auquel nous assistons ces jours-ci avec de trop nombreux hommes politiques qui auraient des liens incestueux avec tantôt le monde de la finance tantôt avec la mafia de la drogue où trône la corruption n’est pas particulièrement attirant.
Une partie de la jeunesse veut apporter sa contribution dans la construction de la société d’aujourd’hui et de demain. Elle le fait déjà à sa façon dans différents domaines avec des initiatives plus nombreuses qu’on ne le pense. S’agissant de la politique, depuis quelque temps, le rajeunissement et le renouveau sont à l’agenda. La plupart des partis traditionnels, y compris les dissidents, ont une aile jeune. Les autres, plus ou moins nouveaux, veulent placer la jeunesse au centre de leur démarche politique pour dire non aux dinosaures. La partielle au N° 18, si partielle il y a, va servir de test tant pour les partis/organisations que pour les jeunes de la circonscription. La politique elle-même connaît une profonde mutation qui remet en cause sa place, son rôle, ses formes et structures. En même temps, l’importance que la société civile est appelée à prendre et l’impact du numérique sur les rapports sociaux auront une incidence sur le monde politique ; car le numérique est en train de faire l’horizontalité prendre le dessus sur la verticalité dans les rapports sociaux, et ce faisant, change la nature même du leadership. C’est une transformation profonde. C’est dans cette transformation aussi qu’il faut intégrer le discours sur la jeunesse, son rôle et son rapport à la politique.
Depuis une vingtaine d’années maintenant, nous avons eu l’opportunité de travailler/collaborer avec des dizaines d’ONG et associations dans différentes régions du pays opérant dans plusieurs domaines – lutte contre la pauvreté, lutte contre les fléaux la drogue, maltraitance, aide à la créativité artistique, conscientisation et pratique sur la protection de l’environnement, pour ne mentionner que ceux-là. Nous avons vu et voyons encore des centaines des jeunes qui ont du coeur, qui trouvent du temps et l’énergie pour s’engager car préoccupés par ce qui se passe dans notre société d’aujourd’hui et de ce qu’il en adviendra demain. Ils ont un rêve. La jeunesse mauricienne, c’est cela aussi. Le récent débat sur les élites l’a ignorée. Or, cette jeunesse-là est une des composantes des élites du coeur.
Dans le cadre d’une démocratie citoyenne participative avec une société civile forte et performante, ces élites du coeur vont s’épanouir pour contribuer à l’enrichissement de la société. Cette jeunesse-là est porteuse de l’intelligence du coeur. Le chantier est vaste, complexe certes, mais combien exaltant ! La société nouvelle de demain se construira ensemble, avec la participation du plus grand nombre, dont les jeunes, et pour le bien-être et l’épanouissement de tous.  
Si nous devons avoir un rêve mauricien, c’est bien cela.

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