Journée mondiale des troubles bipolaires : quand l’humeur joue au trouble-fête

Il arrive à tout le monde de vivre des périodes de bonheur, de tristesse, d’excitation et d’être confronté à certaines difficultés. Dans le cas des troubles bipolaires, ces changements sont hors de proportion. C’est une maladie contraignante, affectant la vie quotidienne.

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À l’occasion de la Journée mondiale des troubles bipolaires, le 30 mars, apprenons un peu plus sur cette pathologie, autrefois appelée psychose maniaco-dépressive, qui reste encore méconnue et souvent taboue.

Il est parfaitement normal d’avoir des sautes d’humeur. En revanche, quand elles perturbent la vie quotidienne, elles peuvent être le signe d’une vraie maladie. “Vivre avec des troubles bipolaires est difficile pour la personne qui en souffre et pour ses proches”, souligne le Dr Mridula Naga, consultante en psychiatrie et Chairperson du Mental Health Board.

Dr Mridula Naga

Le malade ne choisit pas de l’être. Vivre normalement est tout à fait possible quand on est bipolaire, mais traité. Il est important que la maladie soit diagnostiquée au plus vite afin d’éviter à la fois que l’état psychique du patient ne se dégrade et que sa santé physique n’en soit gravement affectée. Afin de recevoir les traitements et le suivi nécessaire, le médecin doit d’abord établir le bon diagnostic. Le patient doit raconter tous les symptômes qu’il rencontre, du plus insignifiant au plus important. “C’est surtout l’entourage qui remarque le changement d’humeur et de comportement. Les participations lors d’une consultation nous permettent d’avoir toutes les infos.”

 Ni violent ni dangereux.

À ce jour, aucune statistique n’est disponible à Maurice concernant le nombre de cas de troubles bipolaires. Le Dr Naga tient à préciser que les traitements sont disponibles. L’annonce de la maladie affecte la vie de la personne qui en souffre; elle devra réadapter son mode de vie en fonction des symptômes afin de réduire au maximum l’impact de la maladie et de mieux vivre avec. “Si les troubles bipolaires commencent de plus en plus à être connus, il faut admettre qu’il est encore tabou d’en parler. À Maurice, presque toutes les maladies liées à la santé mentale sont mal perçues et interprétées. Il faut à chaque fois rappeler que ce sont des gens ni violents ni dangereux et qu’avec un bon suivi, les personnes atteintes de bipolarité peuvent mener une vie normale.”

Outre des médicaments et autres stabilisateurs, une psychothérapie est conseillée au malade pour mieux gérer ses troubles dans la vie quotidienne, en développant des stratégies adaptatives.


Troubles bipolaires : Qu’est-ce que c’est ?

C’est une maladie mentale chronique de la famille des troubles de l’humeur. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) place les troubles bipolaires au sixième rang mondial des handicaps. Cette maladie peut prendre diverses formes. Dans sa forme la plus typique, elle alterne des périodes d’exaltation de l’humeur (épisode maniaque) et de fléchissement de l’humeur (épisode dépressif).

La phase maniaque : Elle se définit comme un épisode d’excitation pathologique. Le malade qui en souffre est hyperactif et euphorique, inhabituellement volubile, et fait de multiples projets. Il peut présenter divers troubles comportementaux, perdre toute inhibition ou engager des dépenses inconsidérées.

La phase dépressive : C’est en quelque sorte le miroir de la phase maniaque. Le malade présente des signes de grande tristesse, il est ralenti et n’a goût à rien. Les formes les plus sévères sont qualifiées de mélancoliques.

Qui en est atteint ?

Les premiers symptômes se déclenchent généralement entre 15 et 25 ans. Les symptômes plus graves apparaissent habituellement vers l’âge de trente ans. Il y a autant d’hommes que de femmes atteints de troubles bipolaires.


Causes et traitements

Les causes des troubles bipolaires sont mystérieuses et ne sont pas encore tout à fait comprises par les chercheurs. Selon le Dr Naga, il semblerait que “l’hérédité jouerait un rôle important. Ces troubles impliquent plusieurs gènes, rendant ainsi les symptômes et les traitements différents pour chaque individu, et cela explique l’incidence plus élevée dans une même famille. Mais les déclencheurs de la maladie chez les personnes vulnérables génétiquement comprennent un niveau élevé de stress et un manque de sommeil”.

La psychiatre précise qu’il n’existe pas de prévention contre les troubles de la bipolarité. La maladie ne peut être diagnostiquée qu’avec l’apparition des symptômes. Dans un premier temps, il arrive que les troubles bipolaires soient malheureusement confondus avec une dépression, ce qui retarde le diagnostic et pénalise les patients.

Les traitements biologiques et psychologiques des troubles bipolaires ont pour but d’améliorer l’état général de la personne atteinte, en tenant compte des différents facteurs en cause. “Avec un traitement approprié, la plupart des personnes bipolaires peuvent vivre une vie satisfaisante et fonctionnent bien à la maison et au travail”, souligne le Dr Naga. Dans les troubles bipolaires, les stabilisateurs d’humeur sont très importants. “Ces médicaments ne sont ni des stimulants ni des calmants.” Ils stabilisent l’humeur et la maintiennent à un niveau adéquat. Ceux qui souffrent de troubles bipolaires prennent un traitement médicamenteux pendant des années, et en général à vie.


Melina, diagnostiquée bipolaire depuis 2012

“Un ennemi intime avec qui il faut composer”

La bipolarité a contraint Melina à démissionner après une dizaine d’années dans l’enseignement. L’annonce de la maladie ne lui a pas fait peur. Au contraire, “je pouvais enfin mettre un nom sur cette souffrance”. Ce qui lui a permis de mieux comprendre ces troubles de l’humeur et de les vivre un peu mieux.

C’est parce que sa maladie est stigmatisée que Melina, 39 ans, évite d’en parler autour d’elle. “La bipolarité est une maladie extrêmement mal considérée. Les gens disent n’importe quoi et s’en moquent. C’est extrêmement douloureux à vivre, d’autant qu’il faut se battre chaque jour pour ne pas baisser les bras.”

Chaque jour, cette habitante du Sud prend des traitements extrêmement lourds qui impactent son sommeil et sa qualité de vie. “C’est un ennemi intime avec lequel il faut composer.” Même en étant sous contrôle, elle a encore du mal à gérer ses émotions. Raison pour laquelle elle pousse un cri du cœur : “Je demande à tous ceux qui ne sont pas bipolaires de considérer la bipolarité comme une véritable maladie, et non une blague ou un manque de volonté. Pour nous, les malades, le regard dépréciateur ou critique des autres peut sérieusement aggraver ce sentiment de différence voire de culpabilité qui nous colle à la peau.”

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