Journée mondiale – Prem Goolaup : « A prévoir des phénomènes météo extrêmes »

– 41°C enregistré à Maurice sous un soleil direct

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« Le changement climatique a entraîné une augmentation des extrêmes de la chaleur, voire de nouveaux records de chaleur, que ce soit au niveau des valeurs quotidiennes relevées localement ou bien à l’échelle nationale, régionale et mondiale. Les vagues de chaleur arrivent plus tôt dans la saison et s’achèvent plus tard, devenant plus fréquentes et plus intenses sous l’effet du changement climatique. » Tel est le message du secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale, Petteri Taalas. Et Maurice, en tant que petit état insulaire, n’est pas épargné par ces changements. Les récentes inondations, les fortes chaleurs, l’augmentation du nombre de cyclones et de leur intensité et les hivers plus doux que d’ordinaire confirment que le pays subit les effets du changement climatique. Dans le cadre de cette journée mondiale, célébrée chaque 23 mars et placée cette année sur le thème “Le soleil, la terre et le temps”, la station météorologique de Vacoas prévoit une journée de réflexion pour améliorer la qualité des relevés et de ses prestations envers le public.

Prem Goolaup

« Le réchauffement continue avec les conséquences néfastes que nous sommes en train d’observer dans le monde, avec des événements météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents », soutient le directeur général de la station météorologique, Prem Goolaup, en marge de la Journée mondiale de la météorologie. Les conditions climatiques ont changé, « ce que confirment les événements qui se produisent dans le pays », selon lui. « Les observations relevées à Port-Louis indiquent une élévation de 5,6 cm du niveau de la mer au cours de ces dix dernières années. Une autre conséquence du changement climatique est les événements météorologiques extrêmes. Les pluies de fortes intensités de courte durée sont ainsi une vraie menace, qui fait plus de dégâts que les autres aléas climatiques. Les événements météorologiques extrêmes sont devenus une menace globale », ajoute-t-il.

Les récentes pluies enregistrées dans le pays le prouvent. En trois heures, près de 100 mm de pluies ont en effet été enregistrés dans certaines régions du pays. Chose à laquelle il faudra s’habituer en raison du changement climatique. « Avec le changement climatique, nous constatons une hausse de 1,2°C dans la température et l’hiver n’est plus froid comme dans les années 1970. L’hiver est presque inexistant à Port-Louis. Il existe toutefois des variations intrasaisonnières mais, généralement, l’hiver est relativement agréable », explique le directeur général, avant de faire ressortir que la température moyenne globale en 2018 a augmenté de 1°C comparé à la moyenne de l’ère préindustrielle, soit de 1850 à 1900. « On prévoit qu’elle pourrait atteindre 4,8°C vers 2100. À Maurice, la température moyenne a augmenté de 1,2°C par rapport à la moyenne de 1961 à 1990. Les années 2015 à 2018 sont les quatre années les plus chaudes de ces 30 dernières années », dit-il.

À La Réunion, notamment à Saint-Denis, la température a atteint 41°C. Mais Prem Goolaup avance que le relevé de la température doit être pris à l’ombre et que 41°C « n’est pas une température à l’ombre, mais sous le soleil direct ». Ainsi, cette même température peut être observée à Port-Louis. « Notre température est aussi élevée », dit-il. Et de faire ressortir qu’il a fait « très chaud à Port-Louis, surtout en janvier et en février », et que la température au soleil avait alors atteint 43°C. Quant à la région de Tamarin et de Rivière-Noire, la température avait atteint un record de 36°C.

Notre vulnérabilité en question

Qu’en est-il de la vulnérabilité du pays face à ces températures extrêmes ? Prem Goolaup avance que « l’être humain le supporte très mal », ajoutant que « si le corps continue de vivre dans cette chaleur, une fatigue est ressentie et, dans certains cas, des coups de chaleur ».

Face au changement climatique, les états insulaires comme Maurice sont très vulnérables. Une de ces menaces est « l’élévation du niveau de la mer », explique-t-il. Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) indique à ce propos que le niveau de la mer est monté en moyenne de 3,2 cm durant la dernière décennie. Selon le même rapport, les pluies de fortes intensités mais de courte durée persisteront dans les années à venir. Quant à la concentration des gaz à effet de serre, responsables du réchauffement climatique, elle continue d’augmenter. « En décembre 2017, cette concentration a atteint un nouveau sommet de 405,5 ppm et il n’y a aucune indication qu’elle diminuera en 2018 ou dans les années à venir », mentionne encore Prem Goolaup.

Le changement climatique entraîne aussi une augmentation du nombre de formations cycloniques, mais également de leur intensité, en témoigne Idai, qui a fait plusieurs centaines de morts. Aussi, selon Prem Goolaup, « il ne faut pas prendre à la légère ces cyclones phénoménaux qui frappent d’autres pays et croire que Maurice sera tout le temps épargnée ». Le cyclone Fantala, en avril 2016, près des Seychelles, qui a complètement détruit l’île Farquhar, démontre selon lui à quel point les cyclones sont devenus intenses. « Nous avons enregistré des rafales de plus de 350 km/h près du centre », dit-il.

Un cyclone de ce genre, ajoute le directeur général peut aussi toucher notre pays. Pour Prem Goolaup, « c’est la providence divine qui épargne le pays ». Mais attention, prévient-il : « Nous continuons à avoir une moyenne de 9 à 10 formations chaque année et nous observons que les cyclones deviennent de plus en plus intenses avec le réchauffement climatique. » Ainsi, rien que cette saison, dit-il, nous avons déjà eu 10 formations, dont 8 se sont intensifiées en cyclone tropical ou, même, en cyclone tropical intense.

Pluies de critiques

Les critiques pleuvent sur la station météo, principalement en raison de ses prévisions. Prem Goolaup, lui, se défend. « Généralement, nos prévisions sont justes. Il faut comprendre que notre île n’est qu’un point dans l’océan. Les modèles assimilent mal les allitérations dans un environnement marin avec un excès d’humidité. La prévision n’est qu’une probabilité et nous sommes satisfaits que la plupart du temps, nos prévisions sont correctes, autant en tout cas que le permette la science », dit-il.

Par ailleurs, changer la manière d’émettre les alertes n’est pas d’actualité pour lui. « Le système a fait ses preuves et fonctionne bien. La population a été sensibilisée depuis son enfance, à l’école primaire, puis au secondaire, et comprend parfaitement notre système d’alerte. La résilience de Maurice aux vents cycloniques et le peu de perte de vies humaines en est une preuve. » Il rappelle que le Service météorologique national est « un service moderne ayant des équipements dernier cri et un personnel qualifié prêt à relever les défis de chaque jour ».

Par ailleurs, le radar Doppler de Trou-aux-Cerfs, qui sera bientôt inauguré, permettra, selon Prem Goolaup, d’obtenir des données plus fiables. « Cela nous permettra d’affiner nos prévisions, en particulier les événements météorologiques extrêmes. Il faut se rappeler que le radar est un outil d’observation », fait-il ressortir. Pour lui, l’intervention et l’expertise humaine dans l’interprétation des données sont des facteurs importants. « Nos officiers ont été formés pour cela. Cet outil technologique sera un atout majeur pour nos météorologistes », dit-il.

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