JUDICIAIRE : L’année des remous au sommet et du départ de Bernard Sik Yuen

Le judiciaire en 2013 a été principalement marqué par les remous au sommet même de ce secteur, qui semblait être le symbole de la sérénité tant que les relations entre les Brother Judges paraissaient toujours bonnes. L’année se termine également avec la fin de la carrière de Bernard Sik Yuen, qui fête aujourd’hui, 31 décembre, ses 67 ans. Il part donc à la limite de l’âge autorisé par la loi pour opérer comme juge.
L’année a débuté de manière tonitruante avec l’affaire Nandanee Soornack, une femme d’affaires, de surcroît activiste rouge. Cette femme avait tiré elle-même la première balle, avec une motion logée devant le juge en chambre le samedi 5 janvier. Elle avait recherché et obtenu un gagging order intérimaire qu’a émis le juge Bushan Domah, selon lequel il était interdit à la presse d’évoquer des détails ayant trait à sa personne et aux membres de sa famille.
Les journaux concernés, à savoir les groupes de presse La Sentinelle Ltée et Le Mauricien Ltd, ont vite réagi. Le juge Domah devait se récuser par la suite. Il a expliqué sa position par la déclaration suivante : « In view of the nature of the press coverage I have received since the very beginning which continued apace after my decision on the interim order, from some of the respondents (le groupe Le Mauricien et l’express) and those supporting their position in this case, which coverage has tended to put in doubt my integrity, impartiality and independence in handling this case, I am recusing myself to hear it further. »
Bushan Domah a été remplacé par le juge Eddy Balancy. Le 7 février, celui-ci a rendu son jugement longuement motivé (d’une vingtaine de pages). Le juge Balancy privilégie la liberté d’expression en s’appuyant sur un précédent raisonnement de Lord Denning à l’effet que la fonction de la cour n’est pas d’agir en tant que censeur de la presse. Par rapport aux trois enfants de Nandanee Soornack, le jugement souligne que deux sont en âge de se défendre sans avoir besoin de l’aide de la mère. En ce qui concerne le troisième, qui est en bas âge, le juge a émis un ordre interlocutoire « restraining the respondents (le groupe Le Mauricien et l’express) from publishing or causing to publish anything further about the minor child » en attendant les conclusions du Main Case logé entretemps.
Un banal accident entre deux voitures a causé des remous politico-judiciaires. L’une des deux voitures était conduite par l’Attorney General Yatin Varma, qui aurait asséné des coups à l’autre conducteur, Florent Jeannot. Outre Me Varma, le président de la MPA, Maurice Allet et le PPS Reza Issac auraient usé de leurs bons offices pour plaider la cause de l’ex-AG et pousser le jeune homme à revenir sur sa version donnée à la police. Les crimes en col blanc avec en tête les Ponzi Schemes ont beaucoup animé certains de nos tribunaux de district, devant lesquels ont dû comparaître pas moins de 72 suspects, qui ont été inculpés pour la plupart de détournement et de blanchiment d’argent.
A un tout autre niveau, le vote d’un projet de loi, la Criminal Appeal Amendment Act, permettra à la Cour suprême d’entendre des appels logés par le DPP qui ne disposait pas de pouvoir pour faire appel contre un jugement de celle-ci. Pour le gouvernement, cela constituait une anomalie et des pouvoirs devraient lui être octroyés. Mais le DPP ne pourra le faire que « when fresh and compelling evidence comes to light ». L’introduction de cette loi permet également au DPP ou à un accusé de demander un nouveau procès devant une Cour d’appel.
L’Independent Commission Against Corruption (ICAC), pour sa part, a initié plusieurs procès qui viennent s’ajouter à une liste déjà longue et dont plusieurs sont en suspens. Ce qui fait que Mes Kaushik Goburdhun et Preesha Bissoonauth n’ont pas eu l’occasion de chômer cette année.
En termes de statistiques, l’ICAC compte en cette fin d’année 155 procès en suspens dans les diverses cours, impliquant au moins 230 personnes et totalisant 861 charges d’accusations. L’on retiendra en fin d’année le début de l’audition des témoins dans le procès MCB/NPF, qui fait suite à l’affaire de détournement de Rs 881,6 millions versées à cette banque par le National Pension Fund (NPF). Le procès a repris avec comme témoin phare Amina Rojoa, ancienne Principal Accountant du ministère de la Sécurité sociale. La cour a aussi fait reproduire la déposition consignée par Clifford Allet, le Head de la Anti Money Laundering Business Unit de la MCB.
En mai dernier, l’affaire MedPoint a repris en Cour intermédiaire. Yodhun Bissessur, Government Valuer, et Anerood Jeebodhun, ancien Lead Government Valuer, arrêtés en 2010 après que le prix offert en vente de la clinique a grimpé pour atteindre Rs 144,7 millions, répondent d’une accusation de « public official using his office for gratification ». La défense, représentée par Me Ajay Daby, a présenté une motion réclamant la radiation de l’accusation logée contre Yodhun Bissessur et Anerood Jeebodhun, qui sera débattue le 16 janvier 2014.
Les années passent et le procès qu’intente l’ICAC à l’ancien ministre des Infrastructures publiques Ajay Gunness et à l’ex-directeur général de la Development Works Corporation Dhaneshwar Soobrah tient toujours l’affiche en Cour criminelle intermédiaire. M. Gunness est accusé de « using office for gratification ». L’ICAC lui reproche de n’avoir pas respecté les procédures pour la rénovation de son bureau. Il aurait privilégié que le contrat soit alloué à Archinter Services.
On retient aussi l’affaire Boskalis, impliquant la firme hollandaise ainsi que Siddick Chady et Prakash Maunthrooa. Les deux hommes ont été poursuivis également pour « public official using his office for gratification. » Il avait été reproché à Boskalis d’avoir consenti à verser Rs 30 millions comme pot-de-vin à Siddick Chady, alors que Prakash Maunthrooa est accusé d’être le complice de ce dernier. La firme qui a plaidé coupable a écopé d’une amende de Rs 20 000 alors que les deux accusés devront comparaître en cour pour leur procès à la mi-janvier.

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