JUDICIAIRE : Le poids des allégations

Des allégations faites à l’encontre de plusieurs personnes ont dominé l’actualité ces derniers jours. Si ce terme revient souvent quand une personne fait une déclaration à l’encontre d’une autre, les hommes de loi soulignent qu’une allégation est une déclaration relative à des faits dont l’existence reste à prouver. Dans le passé, explique Me Siven Tirvassen, des allégations formulées à l’encontre de certaines personnes ont mené à des arrestations et à des charges provisoires. Pourtant, une autre école de pensée indique que des allégations peuvent aussi être des “statement of facts”, soit des affirmations, souligne pour sa part Me Yousouf Mohamed, SC, sur lesquelles les autorités compétentes ont le devoir d’enquêter.
On a souvent tendance à croire que toute déclaration faite à l’encontre d’une personne en dehors d’une cour de justice équivaut à mettre en avant des faits sans preuves. Les audiences de la commission d’enquête sur la drogue, ces derniers temps, donnent souvent l’impression que des personnes font des allégations non fondées devant la commission. Or, pour le Senior Counsel Me Yousouf Mohamed, il y a une différence entre des allégations et un “statement of facts”.
L’homme de loi est ainsi d’avis que les propos tenus devant une commission sont des “statement of facts”, qui ont donc toute leur importance et qui méritent d’être vérifiées par les autorités compétentes. « Une allégation peut être une déclaration qui n’a aucune substance. Les choses qui sont cependant dites devant une instance doivent être prises au sérieux. Ce sont des affirmations qui doivent être vérifiées », souligne le Senior Counsel. Me Yousouf Mohamed explique qu’aucune loi n’empêche une autorité à enquêter pendant qu’une autre instance fait son travail. « Les autorités peuvent déjà commencer à enquêter et s’il y a matière à référer l’affaire au Directeur des poursuites publiques “for further action”. Il n’y a pas lieu d’attendre que la commission soumette son rapport car cette instance ne fait que des recommandations », affirme Me Mohammed.
Par ailleurs, Me Siven Tirvassen explique, lui, que toute personne qui en implique une autre dans un acte criminel doit assumer l’entière responsabilité de ses propos et qu’il importe de prouver ses dires. « Quand les autorités mèneront une enquête, cette personne devra venir avec des preuves tangibles pour soutenir ce qu’il a dit. La loi et les conventions des droits humains donnent à la personne incriminée le droit de se défendre. Si la police a mené une enquête et qu’une personne est arrêtée dans le cadre de cette action, cela ne veut aussi pas dire que ces allégations ont été prouvées », soutient Me Tirvassen. L’homme de loi explique que c’est après l’enquête que la charge provisoire est logée et que c’est la cour de justice qui déterminera la véracité des preuves présentées et des allégations.
D’ailleurs, Me Siven Tirvassen est d’avis que le fonctionnement de notre système sur la base d’allégations est « très complexe » car, dit-il, dans le passé, des personnes ont été arrêtées sur la base de simples allégations n’ayant pas été vérifiées. « Dès qu’il y avait une allégation, une charge provisoire était logée. C’est ce qui incrimine davantage la personne ciblée. Une allégation n’a aucun poids. Il faut des preuves car, souvent, on se retrouve dans des situations où des personnes font des déclarations à l’encontre d’une autre pour régler un compte personnel », affirme Me Tirvassen.
Pour ce qui est de la commission d’enquête, Me Siven Tirvassen explique que les autorités devront attendre que la commission d’enquête soumette son rapport avant d’initier une quelconque enquête. « C’est à la lumière des recommandations que les autorités pourront ouvrir une enquête », dit-il.

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