LA FEMME EN POLITIQUE : Chaque parti doit s’assurer d’un minimum de 33% de femmes à la candidature, a déclaré Loga Virasawmy

La démocratie et l’exigence d’égalité entre les sexes ont remis au premier plan de la réflexion la problématique de la sous-représentativité des femmes en politique. Mais placer l’égalité femme-homme au coeur de la politique n’est pas chose acquise pour Maurice, lorsque l’on se penche sur les chiffres. Gender Links a organisé, mercredi dernier, un symposium réunissant conseillères villageoises et municipales, membres de parti politique, travailleurs sociaux ou encore présidentes d’associations, pour discuter de la place de la femme en politique. Un forum-débat qui a démontré toute la volonté et la capacité des femmes de faire partie de cet univers supposément réservé aux hommes.
Pour Loga Virahsawmy, “s’il n’y a pas plus de femmes en politique, pays pou res an aryer!”. Les femmes représentent 52% de la population à Maurice. Or, fait-elle remarquer, seuls 18,8% de femmes siègent à l’Assemblée nationale — plaçant Maurice à la 6e place au niveau de la Southern African Development Community (SADC) — et 8% siègent au Conseil des ministres. Ce qui, dit-elle, est “une honte”. Celle qui milite depuis des années pour une plus grande représentativité des femmes en politique met l’accent aussi sur le fait que dans certains villages, soit Savanne et Flacq, aucune femme ne siège au District Council, alors que dans chaque village l’on compte au moins une conseillère. Elle reconnaît toutefois que sur le plan de la politique, les femmes ont fait un pas en avant : lors des élections de 2012, 36% des sièges dans les conseils municipaux et 26% des sièges dans les conseils de villages ont été remportés par des femmes. À la municipalité de Quatre-Bornes, le pourcentage de conseillères est passé de 17% à 53% et à Curepipe, il est passé de 4% à 47%.
“Bann fam inn deja prete”
Des membres des quatre partis traditionnels (PTr, MMM, PMSD et MSM) étaient invitées à animer le symposium de Gender Links où elles avaient eu à répondre aux questions des personnes présentes autour des thèmes suivants: comment les leaders politiques perçoivent l’écart entre les genres au sein de la politique locale; comment ils envisagent de combler cet écart; ce que leur parti respectif envisage de faire (pour intégrer plus de femmes) et dans quelle mesure ils intègreront le genre dans leur constitution et leur manifeste électoral.
Malini Seewocksing du PMSD, conseillère à la municipalité de Curepipe et candidate au No. 17, a rappelé aux femmes qu’il faut “croire en nous-mêmes avant tout et être convaincues que nous sommes capables de grandes choses.” Elle soutient que dans son programme, le PMSD placera en priorité des mesures contre la violence domestique et remettra sur pied le programme avorté de Women Back To Work: “Mettre les femmes en avant sur la scène politique et la solidarité féminine seront mon cheval de bataille.” Priscilla Bignoux, conseillère du village de Savanne et travailleuse sociale, estime que la proximité avec les habitants est importante lorsqu’on est conseillère. Elle met l’accent sur l’importance des formations, destinées aux femmes intéressées à la politique, qui les aident à se forger. “Bann fam inn deja prete, kifer bizin atann lot eleksion pou met plis madame?”
C’est avec véhémence que Shakuntala Boolell, conseillère à Quatre-Bornes sous la bannière du Parti travailliste, prend la parole pour exhorter aux femmes : “Nou bizin lager pou nou partout, nou bizin ena enn Premie minis fam!”, suscitant de vifs applaudissements dans la salle. Celle qui se dit féministe reconnaît que la femme a fait des progrès sur le plan de la liberté d’expression et de prise de décisions. De plus, selon Shakuntala Boolell, il est important de préparer la relève et les partis politiques devraient considérer la chose: “Si nou pa prepar la relev, ki pou ariv nou pay plitar?”. Prenant la parole, Roshni Mooneeram, leader d’Ensam, explique que son parti “a pris naissance dans la rupture”. Son désir étant “d’apporter une nouvelle culture politique” et “libérer le potentiel des hommes et des femmes”, Roshni Mooneeram exprime son intention de composer son parti de 50% de femmes. “Ensam, avec un E, représente un “empowerment” de la femme. Dans une société patriarcale, les femmes doivent souvent faire deux fois plus d’effort pour atteindre leur but. Mais les femmes sont capables de créer l’avenir du pays.”
À l’heure des questions
Mala Chetty, présidente du National Women Entrepreneur Council (NWEC), avait préparé diverses questions à être débattues: comment rétablir le déséquilibre dans la représentation des femmes? ; que reste-t-il aux femmes pour qu’elles fassent leur preuve en politique? ; est-il plus ou moins difficile d’aligner les femmes en région rurale qu’en région urbaine? ; les partis plus womanfriendly feront-ils une différence sur le vote de l’électorat? ; quels sont les obstacles liés à la sous-représentativité des femmes en politique? et le quota ethnique sur la liste électorale pose-t-il des problèmes à la représentativité des femmes? Malini Seewocksing a répondu à la dernière question en affirmant que “c’est une réalité, le quota ethnique entre effectivement en jeu”, mais elle assure qu’au PMSD, “je suis un grand exemple de la démocratie dans les élections.”
Loga Virahsawmy a soulevé la question du rôle des ailes féminines au sein des partis politiques. Les autres femmes ayant pris le micro ont souligné les différents obstacles qui se dressent devant les politiciennes. À l’unanimité, les femmes présentes dans la salle se sont accordées à dire qu’un des problèmes majeurs est le manque de solidarité féminine: “Souvent une femme a du mal à accepter qu’une autre femme soit son égale. En tant que femme, il faut pouvoir accepter recevoir des ordres d’une autre femme qui est hiérarchiquement supérieure. C’est comme cela que les femmes vont avancer”, a souligné Amita Boolaucky, présidente de la Northern Women League (Piton/Rivière-du-Rempart). En outre, la pauvreté est un obstacle pour les femmes souhaitant faire de la politique: “Lorsqu’une femme évoque son désir d’être candidate, la première chose qu’on lui demande c’est si elle a de l’argent”, déplore Nathalie Gopee, conseillère PMSD à Curepipe. Même son de cloche pour Brigitte Michel, présidente de l’ONG AILES : “Nous rencontrons souvent des problèmes de financement. CSR get figer”, lance-t-elle.
Marie-Claire Malherbes, conseillère du MMM à Quatre-Bornes a, quant à elle, soulevé la question de “la victimisation des femmes”, qui est un autre problème auquel font face les femmes au travail ou dans le milieu politique. Selon elle, “c’est la société qui victimise la femme, qui lui fait se sentir coupable lorsqu’elle est battue.” De ce fait, elle propose une marche et d’autres causeries pour élaborer sur ces différents thèmes. À l’issue du symposium, décision a été prise d’organiser une manifestation pacifique pour la cause des femmes et pour demander une proportion 50:50 pour les élections.

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