La Fontaine continue à avoir raison

Il a été établi que la police mauricienne fonctionne actuellement à plusieurs vitesses. Selon que celui qui fait appel à elle est un puissant du jour ou un citoyen ordinaire, son « case » sera traité de manière différente. Pour faire plaisir au puissant la police fonctionnera comme un lièvre , pour un simple citoyen l’enquête sera menée à une allure de tortue.

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Rappelez-vous avec quelle vitesse la police ouvrait et menait une enquête quand le plaignant était un ministre et avec quelle lenteur elle fait son travail quand une plainte est déposée contre un membre du gouvernement. Il semblerait que la fable du lièvre et de la tortue est également adaptée dans certaines affaires devant nos cours de justice, comme tendent à le prouver les deux exemples suivants puisés dans l’actualité récente. Le 6 février l’ex ministre Sawkatally Soodhun s’est présenté en Cour, pas pour le avait préféré concernant la menace de mort qu’il proféra contre le leader de l’opposition. Non.

L’ex ministre qui aime se prendre – et surtout se comporter – pour l’émissaire extraordinaire du prince Salman d’Arabie Saoudite comparaissait pour une autre affaire. Le 17 juillet 2017 , il y a donc un an et sept mois, il avait, lors d’une réunion avec les habitants de Bassin, affirmé que la NHDC, qui tombe sous son contrôle, n’accorderait pas de maisons à une catégorie particulière de Mauriciens en raison de …leur appartenance ethnique. Ces propos furent filmés et diffusés sur les réseaux sociaux et provoquèrent l’indignation générale. La condamnation du ministre par l’opinion publique fut telle que M. Soodhun fut contraint de démissionner comme ministre –ce qui était déjà, en soi, un aveu de culpabilité. Dans la foulée, le Directeur des Poursuites Publiques décida de le poursuivre puisque ses propos constituent une violation des articles 12 (2) et 16 (3) de la Constitution. C’est dans le cadre de ce procès appelé en Cour le 6 février que l’avocat de M. Soodhun a demandé et obtenu de la Cour un renvoi de l’affaire. La raison pour laquelle l’avocat a obtenu le renvoi : il n’avait pas eu le temps de visionner la vidéo. Une vidéo vue par pratiquement toute l’île Maurice et qui avait obligé le Premier ministre à «démissionner» M. Soodhun.

C’est vrai que le travail d’un avocat est de défendre par tous les moyens son client. Mais est-ce que la Cour se doit d’accepter n’importe laquelle de ces demandes ? Dans ce cas précis la justice semble fonctionner au ralenti, à l’allure d’une tortue alors que dans d’autres, elle est expéditive et adopte le rythme du galop du lièvre.
Au chapitre du rythme de la tortue, arrivons au deuxième cas : l’affaire qui oppose depuis trois ans des propriétaires des villas d’un morcellement de luxe de Trou aux Biches destinées aux étrangers – et probablement payés en devises étrangères — au promoteur. Quand ils prirent possession de leurs villas, les nouveaux propriétaires se rendirent rapidement compte que les photos du catalogue des villas étaient loin de correspondre à la réalité. L’installation électrique et la tuyauterie aveint été faites au petit bonheur, certains toits coulaient, les portes fermaient mal, bref au lieu de se retrouver dans «  une villa de rêve » construite «  avec les meilleurs matériaux » dans un cadre idyllique, ils se retrouvaient en plein cauchemar. Après avoir essayé de négocier les réparations indispensables avec le promoteur, certains propriétaires ont décidé de le traîner en justice…il y a trois ans de cela.

Depuis chaque audience est renvoyée pour divers prétextes : indisponibilité de la cour, maladie des hommes de loi, impossibilité de trouver des dates communes. Face au rythme des audiences du procès, toujours renvoyées à une date ultérieure, les propriétaires ont demandé une procédure rapide, il y a deux ans. Depuis les renvois continuent et la dernière audience a été… renvoyée à la fin de mars sous un des prétextes habituels. Les deux cas cités obligent à réaliser que plus de 340 ans après leur parution les fables de Jean de La Fontaine sont toujours d’actualité – comme vient d’ailleurs de le démontrer l’économiste Eric Ng, dans son dernier livre, « La cigale ». Autre exemple , la conclusion d’une autre fable de la Fontaine, « les animaux malades de la peste » :
Selon que vous serez puissant ou misérable, Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.

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