Le calvaire de deux ouvriers bangladais

Interdits de quitter le territoire mauricien, ils sont sans emploi et ne savent comment se nourrir

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Deux jeunes ouvriers mécaniques bangladais, Mohamed Dalim et M. Robel, vivent un calvaire à Maurice depuis un mois. Venus ici pour travailler et pour aider financièrement leurs familles restées au pays, ils sont sans emploi après l’expiration de leurs contrats, n’ont plus aucune ressource et ne savent pas non plus comment faire pour se nourrir.

Qui plus est, il leur est interdit de quitter le territoire mauricien… Toute la misère des deux jeunes expatriés résulte en vérité de la lenteur du système judiciaire. Pris bien malgré eux en tant que coaccusés dans une affaire de tentative de vol en bande, Dalim et Robel assistent impuissants depuis plus de trois ans à des renvois incessants de leur procès. « Qu’on en finisse une bonne fois avec cette affaire. Nous sommes innocents. Nos familles sont inquiètes pour nous. Nous avons déjà trop souffert. Nous vivons un cauchemar. Laissez-nous partir », supplient-ils. L’un d’eux est au bord du suicide.

Le cas de Mohamed Dalim et de M. Robel appelle vraiment à de la compassion. Comme beaucoup de leurs compatriotes, afin d’arrondir les fins de mois, ils sont contraints de faire de petits boulots supplémentaires durant leur temps de repos. Bien souvent après de longues heures passées à l’usine qui les emploie officiellement. Un dimanche matin, ils ont été surpris par des policiers dans l’enceinte de Fort George, un restricted area, en train d’embarquer… des palettes sur un camion. Leur commanditaire n’était autre que Hemant Kumar Beekee, alors chef officier des services d’urgence de sapeurs-pompiers du port. Il est un fait que, au moment où ils furent surpris en compagnie également de leur commanditaire, aucun des trois n’avait été mis en état d’arrestation. Après un bref interrogatoire par les policiers, ils avaient tous été autorisés à rentrer chez eux.

Les choses ont pris une autre tournure quand, quelques jours après, soit le 22 mai 2015, des policiers ont à nouveau surpris le chef officier dans Fort George. Cette fois, Hemant Kumar Beekee guidait un photographe de presse freelance qui prenait des photos de l’intérieur du fort. Ces photos devaient servir à illustrer un article dans notre journal, Week-End, dont l’objectif était d’alerter l’opinion publique contre un projet énergétique gouvernemental susceptible de détruire Fort George, un vestige de l’époque de la colonisation anglaise vieux de 150 ans qui fait partie du patrimoine national à protéger.

Le projet des autorités gouvernementales était de raser l’intérieur du fort afin de faire de la place à une centrale d’électricité. Cette fois, le chef officier et le photographe freelance furent retenus au poste de police du port. À la fin de la journée, le photographe fut relaxé, mais Hemant Kumar Beekee eut, lui, à passer la nuit en cellule. Il a été depuis suspendu de ses fonctions. Par la suite, ce ne fut pas pour sa présence en compagnie du photographe dans le restricted area de Fort George que le chef officier devait être poursuivi. Si tel avait été le cas, sans doute que certains rigoristes auraient pu arguer qu’un fonctionnaire ne devrait pas faire ça !

Tentative de vol en bande
Les autorités policières ont choisi plutôt de loger contre lui une charge de tentative de vol en bande. L’obligation s’est toutefois imposée au State Law Office d’y entraîner aussi comme coaccusés les deux ouvriers bangladais. Et, depuis 2015, leur procès traîne en longueur, soit trois ans et demi. Il y a eu plusieurs renvois des sessions de la cour. Une fois parce que la salle du tribunal de Port-Louis était indisponible à cause des examens d’avocats qui s’y tenaient. Mardi dernier, il y a eu encore un autre renvoi de l’affaire, cette fois parce que les avocats de la poursuite (ceux du State Law Office) étaient en conférence.

Le chef officier Hemant Kumar Beekee, le principal accusé dans le procès, plaide non-coupable parce que, selon lui, les objets incriminés que les autorités lui reprochent d’avoir voulu voler « n’appartenaient pas réellement à l’État comme le prétend la poursuite. C’était des palettes abandonnées sur les quais par des bateaux de passage dans le port que j’avais obtenu la permission de prendre.  » Hemant Kumar Beekee ajoute toutefois qu’il fait un appel aux autorités. « La police, le State Law Office et la cour de justice ne peuvent pas fermer les yeux et ignorer qu’il y a un problème réel avec ces deux innocents », plaide le chef officier suspendu.

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