Le recensement ethnique en débats – Que devenons-nous ?

JOCELINE MINERVE

L’article de Madame Paula Lew Fai, psycho-sociologue, Recensement ethnique : De la Régression – publié le 11 septembre 2018 dans la page Forum du Mauricien – arrive, à point nommé, pour aider réellement les lecteurs à prendre de la distance par rapport à tout ce qui bouillonne dans l’imaginaire social ou d’avec nos postures idéologiques. Elle nous donne les outils objectifs pour faire une mise à plat des réalités irréfutables qui entretiennent la discorde, la méfiance ou le repli sur soi. Question dite ‘sensible’ et considérée hypocritement comme telle par le laxisme ou faux-fuyants de nos politiques en général. Pourquoi si peu de considération pour entendre la clameur des postulants lésés depuis des décennies ? Pourquoi si peu d’actions publiques pour la mise en œuvre des conclusions du Rapport Boraine de la Commission Justice et Vérité ?

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Les membres de notre société – dite plurielle – sont empêtrés dans les contradictions héritées, de notre passé et si bien entretenues par toutes sortes de manigances du politico-socio-culturel. Tous, enfants issus de l’immigration, par vagues successives, à part ceux détenteurs de la nationalité acquise du PMO avec des espèces sonnantes et trébuchantes ! (Tiens, au fait, combien sont-ils et pourquoi ni les journalistes et encore moins les parlementaires ne peuvent obtenir cette information ?). Tous?, pratiquement, nous avons du mal à nous réconcilier avec notre Histoire si méconnue et occultée délibérément.

Quelle est notre préoccupation centrale ? Est-ce, d’abord, réussir le vivre ensemble, en nous confrontant à nos démons socio-historiques ? Est-ce une priorité, ou non, de procéder à un inventaire de toutes les injustices, passe-droits, dérives et privilèges partisans, avantages indus, obtenus telle année pour des mandants de telle circonscription et, par la suite, selon le politicien premier-ministériel, provenant de telle autre ! Toutes ces combines institutionnelles de favoritisme et de népotisme avérées, au mépris des lois existantes ! Qui ne peut vérifier le recrutement sectoriel favorisant tel sous-groupe ou castes ? Recenser nos pratiques administratives illégales parce que discriminantes. Avoir la volonté farouche de combattre nos préjugés avec pour enjeu, la vérité et la transparence, la justice sociale, la concorde, l‘harmonie et la paix ! Pourquoi avons-nous si peur les uns des autres ? Pourquoi ne nous comprenons-nous pas beaucoup car installés dans des attitudes de ‘noubanisme’, réel ou latent ? Pourquoi est-ce si difficile, dès qu’approche la période de campagne électorale, de continuer à s’apprécier, tout simplement, et d’avancer dans la convivialité de proximité, qui nous est, en dehors de ces temps agités, tout naturel et habituel ? Ne pouvons-nous pas réaliser que ce faisant, nous faisons le jeu des pyromanes notoires, visibles et cachés, qui monnayent leur suivisme politicien ? Certaines enquêtes, en cours, nous donnent un aperçu de ce qui se trame couramment pour établir des rapports de forces clientélistes, sectaires ou religieux, extrêmement dommageables pour la démocratie. Ne souffrons-nous pas suffisamment des séquelles de la période coloniale qui nous ont ‘divisés pour régner’ ? Qu’est-ce qui devient important ? Ne devrait-ce pas être l’objectif de travailler tous ensemble, malgré nos paradoxes et nos insuffisances assumées ? Eliminons nos supposées barrières et frontières culturelles artificielles. Evitons les amalgames. Bannissons le délit de faciès et nos réflexes épidermiques. Devant les pratiques discriminantes ténues, feu l’abbé Henri Souchon doit se retourner dans sa tombe.

Eliminons tout sentiment de méfiance. Exerçons-nous à la discipline du discernement. Rétablissons la culture de la rencontre, abîmée par cette évolution sociale poussée vers l’individualisme, du ‘chacun pour soi’, et du ‘pousse-toi que je m’y mette’, contre-valeurs exploitées et propagées à dessein par le système économico-politique. Les défis essentiels ne concerneraient-ils que le tissu social ? Les problèmes dus à notre irresponsabilité vis-à-vis de la nature, la pollution de notre écosystème, les conséquences de notre modèle de développement économique ultra-libéralisé qui épuisent les ressources naturelles limitées, et notre agissement de manière inconsciente face à la finitude du stock des matières premières… Situations catastrophiques attribuées aux dérèglements climatiques et au fait de l’ère glaciaire alternée… Ne sont-ce pas les interrogations qui doivent nous rassembler parce que nous sommes tous reliés, que nous le voulions ou non, individuellement et collectivement, non ? Soyons forts. Exposons-notre vulnérabilité. Nourrissons la confiance mutuelle et dénonçons tous ceux qui mettent en péril la cohésion sociale et la construction d’une authentique Nation mauricienne, d’un peuple retrouvé, debout et fier de vivre ses différences assumées, envers et contre tous, s’il le faut ? Alors, retrouvons-nous dans ce projet de vie non mortifère pour certains ! Réparons notre regard en direction de la bienveillance pour tout. Construisons l’écologie globale positive, avec un soin particulier de respect pour notre Terre-mère où l’humain, réhabilité dans toutes ses dimensions, serait au centre.

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