Liens de sang, liens de rien…

Les réseaux sociaux se sont emballés la semaine dernière sur une nouvelle tendance… une autre journée mondiale… celle des frères et soeurs, après mère, père etc. J’étais verte de jalousie devant tous mes amis qui affichaient nouvelles photos de profil avec les frangins et frangines, « maye likou », « ti bizou » et autres démonstrations affectives qui illustrent la belle amitié qui peut exister entre ceux et celles qui partagent les liens biologiques. Jalouse, non parce que je suis enfant unique, mais parce que j’ai une soeur avec qui je n’ai pas la chance de jouir de cette belle amitié. Et je sais que je ne suis pas la seule dans ce cas.
Un ami m’écrivit ceci, ce jour-là : « Tu sais que je t’aime aussi mon amie… je n’ai moi aussi pas eu la chance d’avoir un frère ou une soeur sur qui je peux compter. Mais Dieu m’a envoyé des amis précieux, dont toi. Mon coeur sourit à chaque fois que je te vois, que je t’entends, ou que je lis ce que tu écris… » Comment retenir ses larmes devant quelque chose d’aussi sincère et d’aussi tendre ?
Du coup, cela m’a fait réfléchir sur l’ensemble de mes liens de sang. Élevée dans une immense famille, j’ai eu l’habitude des cousins, cousines, tontons et tantines depuis mon jeune âge. J’ai aussi eu la chance d’avoir des parents dont les amis faisaient aussi partie de la famille, parfois même coupant au travers de plusieurs générations. Ma mère, comme beaucoup d’autres, dira toujours que « la voix du sang est la plus forte »… mais après quelque quatre décennies de vécu… je m’interroge de nouveau.
De nos jours, on trouve davantage de familles nucléaires… au point qu’elles forment parfois des petits îlots dans l’océan familial. À la mort de mes grands-parents, par exemple, les fêtes familiales se sont fragmentées. Mes oncles et mes tantes, à leur tour grands-pères et grands-mères, ne se rassemblent plus que pour des fonctions nécessaires. Les autres membres de la famille s’éparpillent… et ce ne sont que les raisons « officielles » qui nous réunissent. Du coup, une cousine m’appellera pour l’anniversaire du fils dont je ne me souviens plus du prénom, ou ma mère m’annoncera les funérailles d’une tantine lointaine que je n’ai jamais vue de ma vie. Ces personnes ne savent rien de mon quotidien, mais le protocole requiert ma présence pour marquer certains événements que l’on célèbre en famille traditionnellement. Ce qui, pour moi, reste sans logique.
Qu’en est-il donc de la vraie fonction de la famille nucléaire et élargie en 2015 ? Est-ce que l’on s’entraide, est-ce que l’on s’écoute ? Quand j’ai crevé un pneu ou que je frise la déprime, qui est-ce que j’appelle en premier ? Personnellement, je ne peux pas appeler ma soeur, ni un cousin. Comme si cela ne suffisait pas, ma relation avec ma mère a aussi changé. Je ne peux plus que lui dire que je me porte bien, car je ne pourrai plus jamais lui dire si je vais mal.
Que fait-on donc dans ce genre de cas ? Je me mets dans la peau de ceux qui n’ont jamais eu de famille… et je me dis qu’ils s’en créent une. C’est donc ce que j’ai aussi fait. J’ai heureusement une poignée d’amis bien présents dans ma vie. Les liens de sang, s’ils sont sincères, peuvent être plus beaux. Mais les liens de ‘rien’le sont plus encore, parce qu’il ne s’agit pas là d’obligation, ni de devoir. Il s’agit simplement d’aimer un autre être, de l’aider, de l’écouter et de ne point le juger… simplement par amour et par amitié.
Je m’apitoie trop souvent sur mon sort… mais j’ai décidé de changer. J’ai décidé de dire à toutes ses merveilleuses personnes dans ma vie à quel point je me fiche de l’absence de lien de parenté… que pour moi, elles comptent bien plus que certaines relations biologiques lointaines et hautaines. Je remercie l’Univers de leur existence… pour cette amie qui malgré ses trois enfants et son époux malade m’envoie des textos tous les jours pour voir comment je vais… pour l’autre qui me dit à chaque fois à quel point je suis capable… ou encore celle qui me dit de ne jamais abandonner. La famille commence avant tout dans le coeur. Pour ceux qui y ressentent de la peine quand ces liens de sang nous donnent envie… consolons-nous et soyons reconnaissants pour ces êtres avec qui nous ne partageons rien que des liens d’amour et d’amitié.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -