MAISON D’ACCUEIL DON BOSCO : L’enfance recomposée

Le temps d’une après-midi, Scope s’est invité au coeur de la grande “famille recomposée” de l’association des Amis de Don Bosco. Sa maison d’accueil à Baie du Tombeau comprend une trentaine de pensionnaires aux histoires distinctes et aux réalités bouleversantes. Depuis 2010, cette structure “désinstitutionnalisée” protège, encadre et accompagne des enfants vulnérables jusqu’à leur majorité. Une expérience humaine gratifiante empreinte d’émotions…
De l’extérieur, rien ne trahit la nature de cette bâtisse située à Baie du Tombeau. Si ce n’est le rire et les cris d’enfants jouant et s’amusant, qui nous accueillent dès l’entrée d’un immense portail. De petites bouilles courent chaleureusement à notre rencontre. Nous avons même droit à un concerto privé de la petite Léa, trois ans. Pas question pour Christophe de demeurer en retrait. “Regardez mon dessin, n’est-il pas beau ?”, interroge ce dernier, du haut de ses sept ans. Nous ne pouvons qu’acquiescer, tant l’affection de cet accueil nous émeut.
La maison fourmille de vie… Les espaces sont aménagés dans le but d’instaurer une ambiance bienveillante et familiale : coin pour s’asseoir et faire les devoirs, espace de jeu, espace pour les repas. Sur les murs habillés de couleurs chaudes, des dessins ludiques, des portraits d’enfants et des proverbes qui reflètent bien la philosophie de ce foyer. “Dans cette maison, on vit, on s’amuse, on fait des erreurs, on s’excuse et on dit s’il vous plaît et merci. On se fait des câlins et on dit la vérité. On s’aime, on est une famille. Ça, c’est notre maison”, peut-on y lire.
 
Une grande famille.
L’idée derrière cette maison, “est de mettre en pratique la philosophie de Don Bosco, connu comme le système préventif”, souligne Roger Rabemananjara, coordinateur de l’association. “C’est une pédagogie familiale basée sur la raison, l’affection et la spiritualité, très importantes pour le développement des enfants”, ajoute Annick, son épouse. Le couple considère Don Bosco “comme une grande famille au sein d’une maison d’accueil. C’est pourquoi nous n’utilisons pas le mot shelter. Vous ne verrez pas non plus d’écriteau avec le nom du foyer car notre but est de désinstitutionnaliser cette structure”.
Roger et Annick Rabemananjara sont des figures parentales incontournables pour ces jeunes locataires. Tous les appellent “Papi” et “Maman”. “Quelques enfants n’ont pas conscience d’être dans un orphelinat”, confie Annick, en regardant tendrement Kelly, âgée de quatre ans. Cette dernière, qui n’est jamais loin de sa maman de coeur, joue sagement avec des dominos estampillés de fruits dans un coin du salon. “Elle est chez nous depuis qu’elle a un mois. Contrairement à ses camarades, elle n’a jamais reçu de visite. Kelly ne sait pas qu’elle est dans un foyer et ne connaît pas d’autres parents et une autre famille.” Pendant la conversation, la petite s’est rapprochée d’Annick, qui ne peut s’empêcher de la prendre dans ses bras pour lui faire un gros câlin. “C’est qui la princesse de maman ?” Tout sourire, la petite lui répond par un bisou sur la joue. “Une fois en âge de comprendre, nous allons lui expliquer sa situation”, dit Annick. Mais en attendant, Kelly et les autres sont protégés par leur innocence d’enfants.
 
Protection et accompagnement.
L’association des Amis de Don Bosco a été fondée dans le but de mettre en place la maison d’accueil. Cette organisation non-gouvernementale, charitable, sociale et pluraliste “a débuté ses activités avec quatre enfants, dont le nombre a triplé en moins de trois ans”, confie son responsable. “Les enfants sont dirigés vers nous par la Child Development Unit (CDU). La plupart ont vécu des situations difficiles, obligeant la CDU à les retirer de leurs familles pour assurer leur sécurité. Le devoir de l’association est de les protéger, les encadrer et les accompagner.”
Les bénéficiaires sont répartis dans deux maisons, une pour les garçons et l’autre pour les filles. “Les fratries ne sont pas séparées et les garçons en bas âge demeurent avec leurs soeurs dans la maison principale.” Une douzaine de carers sont employés à plein-temps et plusieurs auxiliaires de puériculture accompagnent l’apprentissage des enfants chaque après-midi. Elles sont toutes appelées affectueusement “Tati”. La maison Don Bosco a aussi une grand-mère, qui offre bénévolement son amour à ses “trente petits-enfants”. Gage de solidité, elle fournit un cadre familier et rassurant. Confidente et très complice, elle est leur première fan, les encourage ou les rassure, tout en les recadrant gentiment quand le besoin se fait sentir. 
 
Encadrement et affection.
Nous sommes dirigés vers le garage, reconverti en salle d’études. Encadrés par les auxiliaires en puériculture et par “maman Annick”, les enfants sont en groupe de cinq autour des tables et s’adonnent à diverses activités. Certains font leurs devoirs et jouent à des jeux de société; d’autres, un stylo-feutre en main, font du coloriage. Nous sommes invités à nous joindre à eux. Alors qu’Alexandra prépare les dominos, Alvin, six ans, nous fait un grand numéro de charme, avec comme objectif de chiper le calepin posé sur la table. Mission charme réussie ! Aussitôt, il y griffonne fièrement son nom.
“Victimes d’abandons, de négligence, de violence, ce sont des enfants qui, pour bien grandir, requièrent beaucoup d’attention”, souligne “Papi” Roger. “Ces enfants n’ont pas besoin de cadeaux mirobolants, mais uniquement d’encadrement et d’affection. Comme on dit, l’amour guérit tout.” 
Difficile de dire au revoir, mais c’est bientôt l’heure du dîner. Nous repartons la tête pleine de souvenirs de ces quelques heures inoubliables parmi la grande famille Don Bosco… 
 
 

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