Un meilleur avenir pour les enfants handicapés, le but de l’Islamic Centre For Disabled Children

Le handicap n’est pas une malédiction divine. Et ce n’est pas parce qu’un enfant est handicapé que la société doit le rejeter. C’est ce que cherche à faire comprendre l’Islamic Centre For Disabled Children, une école spécialisée pour les enfants dits « handicapés » ou « autrement capables ». Salima Bibi Alleemudder-Goolab, la directrice de l’institution se bat au quotidien pour changer les perceptions. L’établissement et son personnel mettent à contribution tous les moyens possibles pour que ces enfants-là réussissent dans leur vie. Et avec de l’amour et la patience, tout devient facile pour eux.
Il est 10 heures et les élèves de miss Shireen sont déjà en train de faire leurs devoirs. Peinte en vert et orange, la salle de classe dégage une atmosphère accueillante et joviale. Hariano, un gamin de 12 ans, raconte qu’il a beaucoup d’amis ici. Entre Ayan, un fan de karaté, et Kalou, le petit rigolo de la classe, le petit bavard confie que tout le monde est amical à l’Islamic Centre For Disabled Children mais que, quand il est l’heure d’apprendre, ils le font dans la discipline. « Je sais compter les lettres et je connais aussi les alphabètes [Ndlr : l’alphabet]. J’aime apprendre et j’aime aussi dessiner », murmure Hariano pour que la miss ne l’entende pas.
On pourrait penser que ces enfants qui font leurs devoirs, qui écoutent ce que leur explique leur prof, sont comme tous les autres, mais ici on parle d’une école pour les enfants dits « autrement capables ». Et même si l’établissement porte un nom islamique, il est ouvert à toutes les communautés. L’école et sa fondation ont été créées par la directrice, Salima Bibi Alleemudder-Goolab. Convaincre les parents des enfants souffrant de ce problème de handicap n’a pas été un jeu d’enfant pour cette battante. Elle a même dû avoir recours au porte-à-porte pour que l’avenir de ces enfants ne soit pas gâché. « Ce n’était pas facile pour moi de faire comprendre aux parents qu’il faut que les enfants infirmes aillent à l’école, qu’ils apprennent, qu’ils réussissent dans leur vie. Mais maintenant les choses ont changé et les parents n’hésitent plus à chercher une école pour leur enfant invalide. »
Après son combat pour changer les mentalités des concernés, Salima a dû se battre contre les préjugés. « Un parent m’a déjà avoué que les grandes personnes dans sa maison affirment que son enfant handicapé est un signe de malédiction et que c’est à cause de leurs mauvaises actions qu’ils ont eu cet enfant-là. Mais heureusement, les choses ont changé maintenant et les parents qui ont des enfants desservis acceptent leur sort et savent que c’est Dieu qui en a décidé ainsi », raconte-t-elle.
Chose que soutient les parents aussi maintenant. « Les parents doivent arrêter de penser que si leurs enfants sont autrement capables, ils ne pourront rien faire de leur vie », confirme Sabrina, maman d’un petit Emmanuel âgé de six ans, qui fréquente l’Islamic Centre For Disabled Children depuis deux ans. Elle explique que, même si l’enfant prend beaucoup plus de temps qu’un enfant normal à réaliser quelque chose, il ne doit pas baisser les bras car un jour, il pourra le faire. « Dès le commencement, on ne doit pas décourager l’enfant. Au contraire, on doit l’encourager et le motiver à accomplir des choses. »
Dans ce processus du développement et d’épanouissement de l’enfant dit handicapé, c’est l’institution et son personnel qui s’occupent de tout. Si avant de venir ici, Emmanuel ne savait même pas attraper un crayon, avec l’aide des enseignantes qui sont très dévouées et patientes, le petit se débrouille pas mal maintenant, témoigne sa maman. Elle ajoute « qu’à la maison, je n’ai pas besoin de rappeler à Emmanuel d’aller réviser ce qu’il a fait à l’école, l’amour qu’il a pour l’étude et ses dessins le poussent à le faire par lui-même. C’est justement ce que veut expliquer la directrice de l’école, Salima Bibi Alleemudder-Goolab aux autres parents qui ont toujours peur de confier leurs protégés à des établissements spécialisés. « On offre des facilités à nos élèves de notre école telles que le transport, l’aide médicale, le déjeuner et même l’école est gratuite pour aider les parents et les élèves. »
Au tableau, ce sont des petits devoirs simples qui sont réservés aux élèves. Tandis que des garçonnets vêtus de leur uniforme, chemises noires à carreaux et shorts noirs, sont très concentrés dans leur travail et font tout leur effort pour réussir à terminer leurs devoirs, d’autres ont la tête ailleurs et regardent par-ci, par-là. « On ne peut pas les forcer à travailler beaucoup, alors je leur donne des petites pauses de temps à autre », nous confie miss Shireen.
Shireen travaille à L’islamic Centre For Disabled Children depuis six ans. L’amour pour les enfants ne lui est pas nouveau car cette enseignante d’une quarantaine d’années a déjà travaillé pour une crèche avant d’intégrer cet établissement. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, travailler avec ces petits enfants invalides est beaucoup plus facile que de travailler avec un enfant normal, affirme Shireen, et elle ressent une immense joie à le faire. « Pour un parent, c’est peut-être difficile de contrôler un enfant désavantagé mais pour moi personnellement, c’est un travail facile et dès que je dis à l’élève de faire un devoir, il comprend qu’il doit le faire et le fait tranquillement et dans une façon bien disciplinée. » Pour Shireen, l’amour tient un grand rôle dans tout cela. « Quand on montre à ces enfants qu’on les aime, tout devient facile. Ils nous font confiance et savent qu’ils peuvent compter sur nous et viennent à l’école avec une joie dans leur coeur. »
L’amour est ce qui a aussi permis à Yusrah, 10 ans, d’apprendre la discipline et de mieux contrôler ses émotions. Avec l’aide de sa prof, miss Yasminah, la petite fille sait désormais qu’il faut garder le silence et ne pas taquiner les autres. « Quand Yusrah est entrée ici, elle était très indisciplinée, elle courait partout et n’arrivait pas à se contrôler. Mais maintenant elle a beaucoup changé et même si l’éducation n’est pas son point fort, elle est très bonne en chansons et dans les lectures de chansons religieuses », relate miss Yasminah.
Cette enseignante aux yeux gris s’occupe des élèves qui sont plus désavantagés que les autres. Avec des phrases encourageantes comme « C’est très bien mo gate » ou « voilà, c’est beau ce que tu fais », les enfants font tout leur possible pour accomplir leur travail dans les meilleures conditions. Et bien que certains petits ont des difficultés à garder leur calme et réclament sans cesse l’attention de Yasmina, cette dernière, loin d’être contrariée, leur apporte du réconfort par le biais de mots doux. A l’heure du déjeuner, Sabinah, une jeune femme qui aide les élèves dans ce qu’ils ne parviennent pas à réaliser seuls, aide ceux qui ne peuvent pas manger, à prendre leur repas.
La détermination et la patience de la directrice et du personnel motivent les parents qui espèrent que malgré le fait que leurs enfants ne soient pas « normaux » et ont des manquements, ils deviendront moins dépendants d’eux dans une certaine mesure, juste pour permettre l’enfant de survivre dans cette société méprisante. Deux des élèves qui ont quitté l’école l’année passée prouvent que ces enfants autrement capables peuvent réussir leur parcours socioprofessionnel. « Un garçon travaille à l’United Bus Service (UBS) et un autre, sourd-muet, bosse dans une imprimerie. La semaine dernière, on a ressenti une grande joie et satisfaction quand une de nos ex-élèves s’est fiancée. C’est définitivement une grande fierté pour notre école et pour tous ces autres enfants qui souffrent du même problème », témoigne la directrice, Salima Bibi Alleemudder-Goolab. Une preuve que les enfants autrement capables ne constituent pas des fardeaux pour notre société mais qu’eux aussi ont leur place parmi nous.

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