Le monde des supply teachers : l’enfer au paradis

POEMA ZEPHIR

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J’écris pour ceux qui ne peuvent rester, pour ceux qui n’ont d’autre choix que de remplacer, pour ceux qui n’ont pas de nom pour frimer et ceux qui resteront à jamais les eternels frustrés : bienvenue dans le monde incroyable des « Supply Teachers ».

Beaucoup diront pourquoi on continue à s’obstiner, à s’accrocher à ce métier qui semble de plus en plus moins rentable. Même s’il y a un bon nombre d’entre nous qui se sont lancés dans ce tourbillon en se laissant hypnotiser par les incessants congés annuels et les autres aspects tout confort du prof, il existe quand même une autre moitié qui a vendu son âme par un élan du cœur. Et oui ! Quoi de plus satisfaisant au monde que de voir de grands yeux écarquillés lors de votre explication passionnée sur le système reproductif des homos sapiens ou de la Seconde Guerre mondiale ! Personnellement, c’est ce qui vous fait garder un peu plus espoir en l’humanité.

Mais est-ce suffisant pour qu’un être humain puisse vraiment survivre ? Vivre d’amour et d’eau fraîche c’est tellement agréable, mais ce n’est pas cela qui vous réglera vos factures tous les fins de mois. Oui chers lecteurs, les professeurs aussi ont une vie ! Nous avons un foyer, des enfants, une taxe à payer, des rêves à réaliser et, avant tout, un estomac à remplir. Mettez-vous maintenant à la place de ces jeunes pousses qui se retrouvent à trimballer leur caboche, diplôme en poche, à mendier dans chaque école pour qu’ils puissent ne serait-ce que se retrouver devant un tableau pendant quelques jours.

 

Les chiffres ne sont pas encore exacts, mais les faits sont bien réels. Nous sommes des centaines ici sur la Paradise Island à espérer chaque jour, chaque seconde même, d’avoir une réponse positive d’une école ou d’un collège qui vous fera sa demande afin que vous passiez le restant de vos jours dans son enceinte, du moins 6 à 7 mois par an. Hélas, les contes de fées ne sont que des histoires pour adultes remastérisés avec une bonne dose de poussière magique. Trop d’éducateurs pour si peu de postes. Alors nous sommes condamnés à errer d’établissement en établissement, comme des péripatéticiennes scolaires qui espèrent de se faire passer la bague en bouchant tous les trous de chaque congé de maternité ou de voyages à l’étranger.

On peut donc oublier les projets d’avenir. Il faudra continuer à squatter chez maman et papa parce que la banque ne vous donnera jamais de prêt pour acheter la maison de vos rêves. L’abonnement à la CNT et aux taxis marrons est de mise car la Toyota Vitz vous narguera pendant longtemps dans sa vitrine. Désolé chéri, on devra repousser la date du mariage, car il va falloir attendre mille an pour pouvoir acheter ma robe. Les mines Apollo et les biscuits Marie seront de la partie au dîner et le déjeuner pendant quelques mois encore, en attendant que les p’tits sous vous fassent la surprise sur votre compte en banque. En y repensant bien, on regrette presque l’époque de l’université où on aurait dû sans doute opter pour une autre filière.

Il est vrai que ce n’est pas le travail qui manque ici, mais faut-il nous blâmer de vouloir nous lever le matin avec la motivation d’aller bosser ? Je ne veux pas être de ceux qui sont esclaves de leur job, de ceux qui se plaignent tous les dimanches soirs en pensant au lundi matin, de ceux qui versent secrètement des larmes avant d’arriver au bureau ou de ceux qui vivent que pour voir leur fiche de paie. Je veux me sentir utile. Peu importe les critiques, les coups de « ros » ou les guets-apens sur mon parcours, je continue à porter ma croix. And I know that I’m not the only one.  Brace yourself chers confrères… Winter is not done yet.

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