Nomination négociée et récompenses méritées

Lalians Lepep avait mené campagne électorale, fin 2014, sur le thème «plus jamais ça», en référence aux gouvernements de Navin Ramgoolam. Plus jamais de proches, de grands copains et de petites copines nommés à des postes de responsabilité dans les institutions de l’État. À peine arrivé au pouvoir, le gouvernement a oublié ses promesses et fait pire que son prédécesseur. Pratiquement toutes les institutions du pays regorgent de nominés qui l’ont été plus à cause de leur proximité avec le pouvoir qu’en raison de leurs compétences professionnelles. Ce qui a provoqué une vague de scandales, quand on a découvert le beau-frère avocat réclamant des honoraires astronomiques, des présidentes qui se nomment directrice générale et jouant aux entremetteuses rétribuées à leurs moments perdus. Passons sur celles qui ont auto-augmenté leurs salaires ou qui ont transformé des chancelleries en nurseries. Oublions les frères, neveux et nièces nommés dans des postes où ils n’ont aucune compétence et se contentent d’empocher les salaires, allocations — et parfois les voyages — qui vont avec.

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On pensait qu’avec l’accumulation de scandales le pouvoir allait mieux veiller à ses nominations. Ce n’est pas le cas avec la dernière en date. Au milieu de l’année dernière, le gouvernement décide de mettre fin unilatéralement au contrat d’une des trois membres de la National Prevention Mechanism Division de l’antenne locale des Nations Unies, Anitsa Babooram-Seeruttun. La manière de mettre fin au mandat de l’ex-membre de la division vaudra au gouvernement mauricien une lettre des Nations unies lui reprochant son non-respect des procédures. Pour justifier la révocation en question, le gouvernement avait laissé entendre — officieusement — que cela avait été décidé parce que la personne visée avait des proches qui faisaient de la politique active dans l’opposition. La semaine dernière, le gouvernement a nommé une nouvelle membre à la NPMD, en la personne de Namarata Teeluckdarry. En dehors d’être avouée, la nominée est surtout l’épouse de Sanjeev Teeleckdary, Deputy Speaker et député du MSM. Selon les mauvaises langues, la nominée aurait également un lien de parenté avec la principale animatrice de la cuisine du MSM. Mais plus sérieusement, comment peut-on révoquer un membre en raison des liens de sa famille avec un parti politique et le remplacer par l’épouse d’un député ? Tout simplement, nous a dit un ami, parce qu’il faut faire partie du BON parti politique, en l’occurrence le MSM. Comme quoi, plus on change de gouvernement, plus c’est la même chose. En pire !
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Ritvik Neerbun, employé de la MBC, a été recompensé par ses pairs. Bien qu’il ne soit pas qualifié de réalisateur (producer) dans l’organigramme de la MBC, cela fait des années que ce passionné de cinéma réalise les rares reportages dignes de ce nom — que ce soit au niveau des thèmes, de leur traitement, des images et du montage — que diffuse parfois la MBC. Il est un peu l’héritier des réalisateurs qui firent les heures de gloire de la MBC, dont Sylvio Hécube et Satish Ruhee, pour qui une émission ou un reportage n’étaient pas de la radio filmée, mais une création audiovisuelle originale. Malgré son talent reconnu dans les festivals internationaux, Ritvik Neerbun n’a jamais été bien considéré par les différentes directions de la MBC. La meilleure preuve en est qu’il n’est même pas considéré comme un journaliste par la direction de la MBC. Mieux encore : un membre du conseil de direction de la MBC avait questionné la pertinence d’un documentaire qui, avec deux autres, lui a valu cette reconnaissance. Par ailleurs, Nathalie Didier, dont le talent a aussi été reconnu, est une freelance de la MBC payée à l’émission et qui court d’un studio à l’autre pour gagner sa vie. En dépit de ce fait, elle a réussi à trouver le temps et les moyens de réaliser une émission sur la contraception, alors que ses collègues, employées au mois avec congés payés, passent leur temps à interviewer les voyantes — qui ne voient rien venir — et les invités qui leur sont envoyés par l’hôtel du gouvernement. Comme quoi, en dépit des obstacles dressés par des directions dépassées, le talent que l’on tente d’étouffer finit toujours — dans ces deux cas au moins — par être récompensé.

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