OPÉRATION « LAKAZ LERWA LION » : Navin Ramgoolam à l’heure des comptes

À partir de la mi-journée, 33 jours après son arrestation lors de l’opération Lakaz Lerwa Lion, l’ancien Premier ministre Navin Ramgoolam consignera sa version des faits au sujet de l’une des deux inculpations provisoires, celle portant sur le Conspiracy dans l’affaire du Cover-Up sur l’agression au campement de Roches-Noires dans la nuit du 2 au 3 juillet 2011. Il ne fait aucun doute que pour ce premier volet de l’enquête, le suspect Navin Ramgoolam n’a qu’un choix, une opération de déshabillage de Rakesh Gooljaury, l’ancien partenaire d’affaires de Nandanee Soornack au sein d’Airway Coffee au Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport Terminal. Les aveux revus et corrigés du patron de Fashion Style sur les événements de la nuit du 2 au 3 juillet 2011 ont eu pour conséquences ultimes l’arrestation et l’inculpation provisoire de l’ex-Premier ministre et également la saisie du Jackpot de River Walk avec une somme Rs 224 millions, dont Rs 110 millions en devises étrangères, comprenant des never-used Dollar notes. Pour sa part, Nandanee Soornack s’évertue à prendre ses distances des commissions compromettantes de Rs 100 millions évoquées en marge du contrat entre la Mauritius Duty Free Paradise Ltd et la société Dufry AG de Suisse.
Navin Ramgoolam a gagné une première manche dans le bras de fer avec le Central CID au sujet de la rédaction des détails de son interrogatoire Under Warning. Cet exercice avait été interrompu jeudi dernier, avec le Central CID contestant le choix de l’ancien chef du gouvernement. Après consultations des Judge’s Rules sur le déroulement des interrogatoires, il a été convenu que le prévenu peut se prévaloir de ce droit fondamental avec les limiers du Central CID, habilités à élaborer des interpellations supplémentaires en vue d’éliminer des ambiguïtés dans les réponses.
Ainsi, Navin Ramgoolam, qui est arrivé au QG du Central CID peu avant 11 h en compagnie de son homme de loi, Me Gavin Glover, a pris environ une heure pour rédiger son Statement initial dans l’affaire de « Conspiracy » sur le Cover-Up des incidents au campement de Roches-Noires de juillet 2011. Les premières indications recueillies de sources concordantes confirment que l’ancien Premier ministre a rejeté les allégations et accusations portées contre lui dans cette première affaire. « A complete denial », laisse-t-on entendre à la mi-journée sans ajouter plus de détails sur la teneur de ce Statement. La seulement indication officielle est que les deux parties, soit les responsables de la Special Cell du Central CID d’une part, et Navin Ramgoolam et Me Glover de l’autre, sont tombés d’accord pour un « break » pour le déjeuner autour de midi avec un nouveau rendez-vous pour la reprise vers 14 h.
Les limiers du Central CID, sous la supervision de l’assistant commissaire de police Heman Jangi, devront profiter de cette interruption pour passer en revue les détails de cette première déclaration officielle Under Warning, Navin Ramgoolam maintenant son ignorance et sa participation dans le complot en vue de dissimuler les dessous des incidents suite à la soirée mondaine organisée conjointement avec Nandanee Soornack. Ils pourront également mettre au point leur stratégie pour s’attaquer à ce premier morceau crucial, le temps que la juge Rita Teeluck ne prononce son Ruling sur le décryptage des six téléphones cellulaires saisis en la résidence familiale des Ramgoolam, rue Desforges, le vendredi 6 février dernier.
Pour cette prochaine étape, il ne fait aucun doute que l’un des protagonistes de l’opération « Lakaz Lerwa Lion », Doomeswarsing Gooljaury, aussi connu sous le nom de Rakesh Gooljaury, sera au centre du jeu. En effet, le Central CID s’appuiera sur les aveux consignés dans la soirée du dimanche 11 janvier pour acculer Navin Ramgoolam à l’effet que ce dernier était bel et bien présent au campement de Roches-Noires « at the material time ». D’ailleurs, sur la base des détails fournis par l’ancien partenaire d’affaires de Nandanee Soornack sur l’épisode de la nuit du 2 au 3 juillet 2011, deux membres de la garde prétorienne de Navin Ramgoolam, l’ancien directeur général du National Security Service (NSS), le Deputy Commissioner of Police (DCP) Dev Jokhoo, et l’ancien patron de la VIPSU, l’ex-DCP Ravine Sooroojebally, ont été inculpés provisoirement de « Conspiracy » et se retrouvent ces jours-ci en liberté sous caution.
Operation de déshabillage
L’ancien Premier ministre sera confronté à la dernière version des faits de Rakesh Gooljaury au sujet de l’appel téléphonique lui demandant de « pran sarz sa zafer-la ». D’autres témoignages, en l’occurrence ceux des employés de la société Brinks appelés en renforts au campement après les incidents vers 1 h 20 du matin le 3 juillet 2011, ont également été versés dans le dossier à charge. Un des témoins sur les lieux juste après les incidents indique qu’il avait vu « misye-la pe asize avek enn madam long seve ». De son côté, Navin Ramgoolam a déjà signifié son intention d’initier une opération de déshabillage en règle de Rakesh Gooljaury, l’homme d’affaires qui gère une chaîne de boutiques hors taxes sous contrat avec la Mauritius Duty Free Paradise Ltd à l’aéroport depuis 2002. À ce stade, l’entourage de l’ancien Premier ministre ne veut rien divulguer au sujet de la stratégie ou encore des détails qui seront présentés lors de la prochaine séance d’interrogatoire avec les questions des enquêteurs du Central CID.
Par contre, Nandanee Soornack, qui a gardé le silence depuis son départ en catastrophe pour l’Italie le 11 décembre de l’année dernière, s’évertue depuis la fin de la semaine dernière à prendre ses distances des commissions de Rs 100 millions citées dans le volet MDFP/Dufry AG versées dans des comptes bancaires en Suisse. En sus des déclarations publiques de ses hommes de loi mauriciens à Londres niant toute connaissance de ces commissions au bénéfice de Frydu — société incorporée en son nom en Suisse —, elle a donné des instructions pour que des affidavits avec ses explications sur ces commissions ou encore la gestion d’Airway Coffee, qui fait l’objet d’une demande d’administration judiciaire, soient rédigés dans les meilleurs délais.
Tout semble indiquer que ces affidavits — qui prendront Rakesh Gooljaury pour cible — devront être jurés par des représentants attitrés de Nandanee Soornack dans les prochains jours et soumis aux autorités compétentes, soit la Bankruptcy Division pour Airway Coffee et le Central CID, l’Independent Commission Against Corruption et la Financial Intelligence Unit pour les commissions sur la gestion des boutiques hors-taxes à Plaisance. Cette démarche brisant le silence de « Madam Ou Konné Ki Mwa » est interprétée comme une première étape pour son prochain retour à Maurice avec un grand déballage en vue.

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