PARLEMENT : Les vacances déjà

Eh oui, c’est déjà les vacances parlementaires. Les travaux qui ont repris le 28 mars 2017, après trois mois de longue pause, ont été ajournés au jeudi 8 juin à 17h pour la présentation du Budget 2017/2018. Cet ajournement, annoncé par le Premier ministre lui-même à la fin des travaux mardi dernier, a surpris plus d’un, d’autant que la séance du jour consacrée à l’examen d’un budget supplémentaire avait été exclue d’office, comme le stipulent les Standing Orders de 1995, la Private Notice Question et le Question Time.
La rentrée 2017 a été marquée par le début de la retransmission en direct des travaux parlementaires. Ce qui devait être un plus pour le gouvernement et la Speaker qui se targuent, avec raison, d’avoir franchi ce cap démocratique longtemps attendu, l’exercice se sera finalement retourné contre eux.
Ceux qui pensaient que les journalistes exagéraient, auront découvert avec leurs propres yeux à quel point les carences de la présidence sont criantes, que le député du MMM Rajesh Bhagwan a été efficace en provoquant d’entrée le départ de Vijaya Sumputh après la révélation qu’elle a bénéficié d’une allocation supplémentaire de Rs 100 000 qui a porté son salaire mensuel à Rs 330 000. Qui a aussi permis de découvrir que le conseiller de Pravind Jugnauth Gérard Sanspeur touchait la coquette somme de Rs 500 000 par mois.
La retransmission aura aussi permis de découvrir le nouveau leader de l’opposition. Ses débuts un peu tatillons se sont avérés intéressants, d’autant que les sujets évoqués étaient plutôt proches de l’actualité : Metro Express, l’affaire Sobrihno, le scandale Omega Ark, les lois sur le financement des partis politiques, sur le transfugisme et la déclaration des avoirs des hommes publics et des grands commis. Son prédécesseur, Paul Bérenger, aura, lui, observé une exceptionnelle discrétion depuis le début des travaux tout en envoyant des vannes qui ont bien amusé ses collègues parlementaires. Voir ceux qu’ils ont eux-mêmes élus ont aussi permis aux Mauriciens de constater la médiocrité d’un grand nombre d’élus, des ministres comme des députés, incapables d’aligner des arguments intelligibles ou de donner des réponses adéquates aux interrogations de leurs pairs.
S’il faut dresser un bilan de cette première tranche des travaux de 2017 avec Pravind Jugnauth au poste de Premier ministre, le constat inévitable est qu’il a été extrêmement décevant. Il s’est distingué de la plus mauvaise des manières en lançant des propos vulgaires à son ancien collègue Roshi Bhadain. Sinon, son action en tant que Leader of the House aura été quelconque.
Son entrée en matière très attendue le 28 mars a été une farce dans la mesure où son premier Prime Minister’s Question Time avait été confisqué par son propre collègue de parti, Soodesh Sesungkur. Résultats des courses, toute la tranche fut monopolisée par les quatre interpellations du député de la majorité.
Le champion des non-réponses
Puis, lors des séances subséquentes, service minimum, lecture lente des réponses et surtout le record des non-réponses. Contrairement à son père de prédécesseur, il collectionne pas moins de 36 questions auxquelles il n’a pas encore daigné fournir la moindre réponse. Parmi ses interpellations, celle de Reza Uteem qui date du 28 mars sur la liste de ses conseillers, leurs qualifications et les leurs conditions de service, salaires et autres privilèges.
En termes de textes, c’est toujours la grande pauvreté, rien de signifiant, ce qui fait que leur examen a trainé sur plusieurs semaines. Le seul texte qui paraît avoir du sens, encore que, est le tout dernier voté avant le budget supplémentaire, celui visant à faciliter davantage le climat des affaires, la Business Facilitation Act à un moment où le pays dégringole au classement international du « ease of doing business ».
Les deux derniers intervenants sur ce texte, mardi dernier, ont été Soodesh Rughoobur, qui a tenu un discours sans grand intérêt et Alan Ganoo, autrement plus pertinent puisqu’il a placé l’examen de ce texte dans le contexte présent ainsi décrit : “This  Government  has been   discredited by countless transgressions of administrative and business   ethics, favouritism that  far  perhaps surpassed its  predecessor, for which  the  then Government  was mercilessly ousted of power. When scandals multiply at the current rate, the nation inevitably jumps to the conclusion that those who condone or  participate in them are ripe for shaking”.
Encore plus piquant, il a ajouté que “can we imagine that in  less  than two years, over a dozen  of  political  nominees  of  this government have been forced to resign or leave their position? Who would, in their right mind, invest in a country besieged by scams and  ethics  violation? Once  this country which occupied the top five positions among most liked investment hosting country, we have now tumbled to the 16 th place in Africa in the latest survey. This is scarcely a record to  be  proud  of ». C’était dit. Et bien dit.
Dans son résumé des débats, le Premier ministre et ministre des Finances est resté dans les généralités tout en assurant que le pays est sur la bonne voie puisque le taux de croissance et des investissements s’améliore. Le texte a ensuite été mis au vote et adopté. Place ensuite au budget supplémentaire de Rs 2,3 milliards pour 2015/2016, item qui a eu pour effet d’exclure toutes les questions de l’agenda de ce mardi.
Pravind Jugnauth a bien fait le décompte de ces dépenses supplémentaires, mais le système lui-même a été l’objet de commentaires. Le principal orateur de l’opposition Aadil Ameer Meea a fait valoir ce point et il a insisté sur l’incongruité coûteuse du Build Mauritius Fund.
Autres intervenants, le ministre des PME Sunil Bholah, qui a justifié les dépenses encourues, et Roshi Bhadain qui a profité d’un item, les dotations additionnelles de Rs 255 millions au service des postes pour s’embarquer dans un débat sur la situation post-BAI en parlant de la MPCB, de la National Commercial Bank, deux entités qui ont fusionné pour accoucher de la Maubank. L’ancien ministre des Services financiers a déploré que le gouvernement ne fasse pas d’efforts pour trouver une solution aux épargnants de l’ancienne BAI, mais qu’il ait pu, en même temps, injecter un total de Rs 6 milliards dans cette nouvelle banque étatique.
Lui donnant la réplique, son successeur, Sudhir Sesungkur, a accusé Roshi Bhadain d’être lui-même responsable de cette situation, ce qui a donné lieu à quelques échanges animés entre élus de divers bords de la Chambre et qui a nécessité l’intervention de la Speaker. L’orateur suivant, Ravi Rutnah, a défendu ce budget supplémentaire tout comme le député de l’OPR Francisco François. Résumant les débats, Pravind Jugnauth a soutenu qu’il ne fait qu’appliquer ce que la loi prévoit tout en assurant qu’il a bien l’intention de supprimer les fonds spéciaux comme le Build Mauritius Fund.
Une somme de Rs 178 millions au PMO pour la sécurité
A l’examen en comité des diverses dotations qui a suivi, Rajesh Bhagwan est revenu sur les Rs 6,3 millions payées aux commissaires qui ont enquêté sur l’organisation des courses hippiques et sur le rapport préliminaire qui n’a jamais été déposé. Le député s’est aussi appesanti sur les recommandations de cette commission d’enquête et notamment celle de la création d’une Horse Racing Authority.
Dans sa réponse, le Premier ministre a indiqué que cette somme englobe les frais d’enquête des commissaires britanniques de même que ceux des consultants. Quant au document préliminaire mentionné par le député du MMM, Pravind Jugnauth a déclaré qu’il a bien cherché de le trouver, mais qu’il n’existe pas au PMO, ajoutant qu’il a demandé à ses services de continuer leurs recherches.
Parmi les autres dotations supplémentaires qui ont retenu l’attention des députés, de l’opposition, notamment le total de Rs 178 millions requis pour doter le PMO et, partant, les services de police et de renseignement sur le terrorisme. Ils ont été nombreux dans les rangs de l’opposition à supputer que cette somme supplémentaire, qui est conséquente, a servi à faire l’acquisition d’équipements sophistiqués permettant, entre autres, les écoutes téléphoniques. Ce qu’a démenti le Premier ministre sans afficher une très grande conviction.
Les députés de l’opposition ont aussi profité des items sur la police et le National Security Service pour réclamer que les officiers du renseignement arrêtent d’espionner les membres de l’opposition et qu’ils s’attèlent plutôt à de questions plus urgentes sur la sécurité publique. Le budget supplémentaire voté, le Premier ministre a proposé l’ajournement des travaux au 8 juin, le temps qu’il prépare le Budget 2017/2018 et aussi celui d’un saut en Inde.

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