POLÉMIQUE : Les éleveurs de singes se défendent

L’utilisation des animaux dans la recherche biomédicale est certainement utile, importante et pertinente. C’est ce que pense Nada Padayatchy, Development Liaison Manager de Bioculture Bioculture (Mauritius) Ltd et aussi président de la Cyno Breeders Association, en réponse aux nombreuses dénonciations du fait que les singes utilisés à ces fins sont maltraités. La dernière en date concernait le transport par avion de ces animaux.  Selon lui, plusieurs espèces d’animaux sont utilisées quotidiennement, plus principalement des rongeurs tels que les souris et les rats, des poissons, d’oiseaux et surtout les singes. Toutefois, les singes ne comptent qu’une infime partie des animaux utilisés, soit entre 0.05%-0.1%, et leur utilisation ont démontré de bons résultats, dit Nada Padayatchy.
Pratiquant l’élevage des singes depuis 1985, Nada Padayatchy explique que l’utilisation des singes dans la recherche est effectuée uniquement dans des cas où seulement cette espèce permet d’avoir des résultats les plus probants qui peuvent être transposés chez l’homme : « Il faut aussi dire que le singe étant l’espèce animale qui se rapproche le plus de l’homme génétiquement et aussi physiologiquement permet bien souvent d’avoir des résultats plus concluants pour la  recherche. »
Selon lui, le secteur de la recherche est un secteur extrêmement régulé et tous les projets de recherche doivent passer d’abord par un comité d’éthique pour justifier l’utilisation sur l’espèce et le nombre des animaux. « Il est légalement interdit d’utiliser une espèce de singe si on peut utiliser des méthodes alternatives ou si on peut utiliser une autre espèce d’animal », dit-il. La recherche s’effectue dans des universités ou des centres de recherches des Etats, mais aussi dans le privé à travers par des entreprises pharmaceutiques. Nada Padayatchy affirme que de nombreux kits de diagnostiques, de même que des appareils, tel le MRI, ont été développés grâce aux singes. « Il y a plusieurs espèces de singes utilisées dans la recherche, dont le macaque a longue queue est le plus commun », mentionne-t-il.
La « pureté génétique » de Maurice
Nada Padayatchy avance qu’il y a toujours des découvertes très importantes qui ont été faites grâce aux singes. En ce sens, il cite les anesthésies modernes, le vaccin contre la diphtérie, les médicaments contre le rejet d’une transplantation d’organes, le traitement de la lèpre, les différents traitements contre le virus VIH et le SIDA, le diabète, les maladies cardiovasculaires, contre différents types de cancer, des maladies gériatriques. « En ce qu’il s’agit du sida, toute la recherche fondamentale a été faite grâce aux travaux effectués sur les singes et le virus SIV (l’équivalent du HIV chez le singe). Les traitements antiviraux doivent leurs développements grâce à la recherche sur les singes. Il y a aujourd’hui plus de 20 antiviraux qui sont efficaces contre le HIV. Bien que ce ne soit pas une guérison complète, ces traitements permettent d’augmenter l’espérance de vie des gens touchés par le virus HIV. Cela est considéré comme étant un des plus grands succès de la médecine de la fin du 20e siècle », fait-il ressortir.
Le singe de Maurice est l’une des espèces les plus recherchées. D’ailleurs, ces traits particuliers font de lui l’animal préféré des chercheurs. Selon Nada Padayatchy, du point de vue génétique, le macaque mauricien ayant été introduit en petits nombres dans le début des années 1700 a un pool génétique assez restreint. « Cette pureté génétique fait qu’il y ait moins de variances au sein de recherches effectuées avec nos singes. Moins de variances implique moins de singes utilisés pour arriver à des résultants statistiquement significatifs. Aussi, cette pureté génétique favorise l’expression de certains allèles récessifs tels que le MHC qui est très recherché pour la recherche biomédicale sur les maladies a caractère immunosuppressif, par exemple, le SIDA. » Il mentionne aussi que le singe mauricien a un statut de SPF (Specific Pathogen Free) est et dénué des maladies Herpes-B, SIV, SRV et STLV1, — fort probablement dû au fait que ces singes ayant été transporté très jeunes et non actifs sexuellement — n’ont pas été contaminés par ces pathogènes transmissibles sexuellement. « Ce statut ‘sain’, en sus d’être plus sécurisant pour le personnel de laboratoire, a aussi l’avantage de ne pas produire d’artefacts avec les résultats de l’étude en cours. »
L’élevage des singes à Maurice
« Il faut dire que Maurice et l’industrie d’élevage de singes jouissent d’une excellente réputation dans l’industrie de la recherche biomédicale. Nos singes sont tous de très bonne qualité en termes de santé physique et psychologique et les centres d’élevages qui non seulement répondent aux normes internationales bien souvent vont au-delà de ce qui est préconisé », dit-il. Il précise que des 5 centres d’élevages présents dans l’île, trois sont regroupés au sein d’une association, la CynoBreeders Association. « L’association prône des règles de bonnes gouvernances, d’éthique et de normes à respecter en terme de système de qualité, suivi d’un vétérinaire, et de sanitaire. » Il ajoute que les membres  de l’association ont mis en place un  système de qualité qui répond aux critères de la certification ISO 9001 : 2000 et/ou l’accréditation AAALAC International – Association for Assessment and Accreditation of Laboratory Animal Care – , une accréditation propre à l’industrie des animaux de laboratoire. Les singes reçoivent un suivi vétérinaire pour répondre aux besoins de l’animal pour ce qui est de leur santé physique, mais aussi psychologique. Des règles très définies par rapport au nettoyage des espaces animaliers, la désinfection, la nutrition et la sécurité des animaux sont suivis. Concernant le bien-être des animaux, Nada Padayatchy explique que des spécialistes en comportement travaillent pour assurer que l’animal puisse s’épanouir en captivité et avoir des comportements naturels pour l’espèce. « Un suivi des conditions par rapport à l’espace vital nécessaire pour le singe, ses besoins psychologiques », dit-il.
Par ailleurs, si une campagne au début des années 2000 menée contre les bureaux de Thomas Cook/Air Mauritius et British Airways a conduit ces derniers d’arrêter le transport des animaux destinés à la recherche biomédicale, Nada Padaychy avance qu’Air France continue d’exporter les macaques mauriciens en France : « Air France a fait appel à des experts dans le domaine et est convaincu avec raison que l’utilisation des animaux dans la recherche est primordiale, et que en tant que transporteur aérien, ils ont un devoir moral de continuer à transporter ces animaux et ainsi contribuer à l’avancée de la médecine. »

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