Profession légale – Partager la fierté d’être avocats

  • Me Hervé Duval (président du Bar Council) : « La majorité silencieuse de la profession aura les moyens de se faire entendre »
  • Lors de cette conférence étalée sur trois jours, la MBA lancera un nouveau concept, une première à Maurice, en marge de l’interaction entre ses membres

La Mauritius Bar Association (MBA) réunit ses membres à partir de mercredi prochain pour une conférence intitulée “3 I’s Initiative”. Autour des trois “I” que sont l’innovation, l’indépendance et l’intégrité, cette rencontre sera une première en son genre, avec un accent particulier sur les jeunes de la profession. L’idée est de présenter le bilan d’une réflexion et de jeter les jalons pour une perception renouvelée de la profession légale. Me Hervé Duval, Senior Counsel, dans un entretien accordé au Mauricien, revient sur cette initiative qui, dit-il, est « un projet ambitieux qui dépasse les barrières de la profession ». La cheville ouvrière derrière l’organisation de cette plateforme, Me Varuna Bunwaree Goburdhun, aborde, elle, l’importance que les jeunes de la profession développent un sens d’appartenance avec l’association et aient les moyens de se faire entendre.

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Les membres de la MBA se réuniront pendant trois jours pour discuter de l’innovation, l’indépendance et l’intégrité de la profession. Des concepts qui donnent l’impression de déjà-vu mais qui, soulignent ces avocats, visent à être une “roadmap” pour les actions futures. Ce sont des choses qui existent déjà, mais la “3 I’s Initiative” vise à éveiller une prise de conscience sur ses trois piliers avec une approche différente. Mes Varuna Bunwaree Goburdhun, Yashna Munbauhal et Doordarshini Busgeet sont d’ailleurs toutes d’accord sur le fait que la jeune génération est aujourd’hui « découragée » par cette profession qui, autrefois, « inspirait de la fierté et un sentiment d’accomplissement ». Et de poursuivre : « Les jeunes membres de la profession légale se sentent perdus et ont besoin d’un port d’attache. Pourquoi pas l’association, leur association. (…) À part les communiqués, le travail n’est pas visible. L’une des grandes parties du “3 I ‘s initiative” est de changer la façon de interaction », souligne Me Duval. Raison pour laquelle l’aspect “Innovation” entre en jeu. L’association compte mettre en avant un concept qui changera l’interaction entre ses membres. Les jeunes, estime-t-on, « doivent pouvoir se faire entendre et la majorité silencieuse devrait pouvoir s’exprimer ».

Me Yashna Munbauhal, qui vient de prêter serment il y a deux mois, explique ainsi que « pouvoir dire ce que l’on pense est important quand on est jeune » avocat. « Ce sera une façon pour les jeunes d’être plus partie prenante et d’apporter leur contribution », dit-elle. De même, Me Doordarshini Busgeet fait ressortir que les jeunes de la profession « font souvent face à des défis qui ne sont pas faciles à surmonter ». Selon elle, ils ont besoin d’un guide et de savoir vers qui se tourner.

Avocat avant tout

L’indépendance et l’intégrité dans la profession sont les clés du succès. Il y a certes le code d’éthique mais, comme le souligne Me Hervé Duval, « l’éthique est foncièrement quelque chose de personnel ». L’idée de mettre l’accent sur l’indépendance et l’intégrité de la profession est de démontrer qu’un membre du barreau est avocat avant tout. « Le combat parfois âpre pour le maintien de l’indépendance de la profession, condition sine qua non au respect de la profession d’avocat, souligne Me Varuna Bunwaree Goburdhun, doit être mené par tous, et ce en dépit des nouveaux challenges qui se présentent à l’indépendance de la profession, tels l’affiliation aux partis politiques et la difficulté pour les jeunes de percer. »

Cet aspect de la profession sera aussi abordé lors des ateliers. « Il est plus facile pour un avocat qui est déjà établi et s’est fait une place dans la profession de dire non à la tentation de céder de son indépendance. Avec la rude compétition, les jeunes sont souvent perdus », affirme Me Duval. Et de renchérir : « Nous parlons là d’indépendance absolue pour qu’un avocat ne perde pas cette indépendance au profit de sa compagnie ou même de l’association. » Ainsi, autant de thèmes seront abordés lors de cette plateforme avec l’ultime but que les jeunes puissent de nouveau partager la fierté d’être avocat et pour que les anciens aient une prise de conscience des devoirs et défis de cette profession. La “3 I’s Initiative” est un “stepping stone” que les organisateurs souhaitent voir comme un projet qui prendra vie, peu importe l’équipe en place. « Il s’agit d’une suite d’actions qui jettent les jalons pour les actions futures », affirme Me Duval.

La conférence, qui se tiendra au Sugar Beach Resort, à Flic-en-Flac, réunira ainsi des intervenants étrangers, avec l’intervention notamment de Lady Justice Desiree Patricia Bernard. Plusieurs thèmes seront abordés, notamment “Connecting the profession”, “Why does independance matter ?” et “Integrity in action before our courts”. Les jeunes avocats auront droit à une session entièrement dédiée à leur intention le dernier jour.

Les organisateurs saluent d’ailleurs le grand intérêt qu’ont démontré plusieurs membres à faire partie de cette conférence, à laquelle les Senior Members ont grandement contribué à la réalisation.

ENCADRE

Présence féminine

Un aspect de la profession légale qui n’est souvent pas abordé est la féminisation du métier. Le Bar Council compte trois hommes et trois femmes sur ce conseil. Les trois piliers qui seront au centre de la conférence auront chacun deux ateliers, avec six intervenants au total. Il importe de souligner que quatre de ces ateliers sont menés des femmes. Cette conférence sera ainsi l’occasion de faire un état des lieux sur la présence des femmes dans la profession.

Le judiciaire compte neuf femmes juges alors que le nombre d’avocates est presque le même que les avocats. Le Bar Council, qui estime que certains clichés restent à surmonter, veut à son tour s’attarder sur la place importante qu’occupent les femmes dans cette profession.

Mes Varuna Bunwaree Goburdhun, Yashna Munbauhal et Doordarshini Busgeet sont trois avocates de différentes générations. La première compte 16 ans au barreau alors que Me Doordarshini Busgeet en compte, elle, 6 ans. Quant à Yashna Munbauhal, elle pratique depuis deux mois. Bien qu’ayant prêté serment à des périodes différentes, ces trois femmes de la profession légale ont contribué à l’organisation de cette plateforme.

Me Bunwaree Goburdhun est retournée à la pratique privée après avoir été avocate chez ENSAfrica et après un bref passage en entreprise. Me Munbauhal a prêté serment en septembre 2018 après avoir été “called to the Bar of England & Wales” de l’Inner Temple en juillet 2017. Elle a complété son LLB à l’Université de Sheffield en 2014 pour ensuite poursuivre son LLM en Corporate Law à l’Université d’Édimbourg. Elle est actuellement à la Ahnee-Duval Law Firm.

Me Busgeet a prêté serment en 2013 après son “bar” à l’Honourable Society of Middle Temple. Elle détient un Master en droit de l’Université de Northumbria et est membre du Young Bar Committee depuis 2016 et secrétaire de la Middle Temple Association.

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