Quatre Cocos : Le nom de la dignité

Quatre Cocos est encore une région en proie à des commentaires péjoratifs. Ses habitants ont grandi avec une certaine réalité : celle d’être sous-estimés uniquement à cause de l’endroit où ils résident. Pourtant, toute la force de ce petit village de l’Est repose dans son nom. Ancré dans son histoire, c’est un village au cachet authentique tourné vers l’avenir et qui avance avec son temps.

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La solidarité est une des grandes qualités des habitants de ce village

De Centre de Flacq en direction de Quatre Cocos, le paysage est dominé par de vastes étendues de champs de cannes. Le panneau à l’entrée du village souhaite la bienvenue dans le “village de l’unité”. “Comme c’était le cas à l’époque – et encore de nos jours, rester unis et solidaires a été notre plus grande force”, confie Soodesh Nunkoo, conseiller de village. Une qualité qui prend tout son sens eu égard à l’image que véhicule la région, avec un nom en proie à des expressions tristement fameuses : “Kot to sorti ? Kat Koko ?”, “Baya kat koko” ou encore “al res Kat Koko !”.

Baya kat koko.

“Par les regards et les commentaires, nous sommes conscients que l’évocation de ce nom fait tiquer.” Comme le précise la travailleuse sociale Sheila Uppeegadoo, “l’on parle d’un baya kat koko comme quelqu’un de ringard et bête. Malgré eux, les gens ont tendance à nous critiquer et nous sous-estimer. Mais Quatre Cocos, c’est plutôt le contraire.”
Un mémorial dans le village hall rappelle l’histoire étroitement liée à quatre personnages illustres : E. Dupré, A. Depinay, F. Nozaic et J. Ythier. Quatre personnalités intelligentes du secteur sucrier qui ont valu son nom au village. “Car être un cerveau équivaut à être un “coco” dans le jargon local.” Sur la Route royale vers Mare La Chaux, les ruines du moulin Nozaic peuvent encore être aperçues. “C’est le premier moulin à vapeur de l’île” et aussi le symbole de l’histoire sucrière de la région.

Paradis perdu.

Quatre Cocos, c’est surtout ce petit “paradis perdu de l’Est”. Un village qui s’enorgueillit de ses métiers, ses intellectuels, sa beauté et son histoire. Après les logements de la NHDC flambant neufs, le terrain de football, l’église de Saint Dominique, nous nous retrouvons au centre névralgique du village. L’on aperçoit l’école primaire, de petits commerces et le village hall. D’autres aménités sont éparpillées : le dispensaire, le bureau de poste et le nouveau Recreational Centre. Un centre obtenu après des années de combat par le District

Council de Flacq.

“Comme vous pouvez le voir, Quatre Cocos est un village en plein développement. Nous évoluons avec notre temps, et ne jouons plus au foot dans les champs de cannes”, précise Nitish Muloruth, jeune entrepreneur. Le village conserve pourtant un cachet authentique. “Nous respirons encore l’air pur de la nature et de la mer, qui se trouve à cinq minutes d’ici.”

Bred mouroum.

Une autre de ses particularités, c’est d’avoir des arbres fruitiers dans presque chaque cour. Bananiers, manguiers ou encore cocotiers sont en abondance. “C’est aussi l’un des rares lieux où on peut trouver le moringa (bred mouroum) un peu partout.” Cette plante miracle se retrouve au moins une fois par semaine dans l’assiette, “accompagné d’un bon pwason viel fraîchement pêché par les pêcheurs du coin et un bon satini pom damour”.
Soodesh Nunkoo souligne qu’un autre point fort de Quatre Cocos, ce sont les différents corps de métiers présents. “Nous avons de tout dans la région : planteurs, pêcheurs, professeurs, avocats, médecins, entrepreneurs. Nous sommes loin d’être l’enfant pauvre de l’Est.”

Quatre Cocos est un village qui s’est développé avec son temps

Une nouvelle venue dans le paysage de Quatre Cocos : une compagnie spécialisée dans le recrutement pour travailler sur les bateaux de croisière, située juste à côté du village hall. L’endroit a aussi vu grandir des sportifs qui se sont distingués au niveau national, notamment le footballeur Alain Armance.

Nous rencontrons Jiahalaa Taleb, très actif au niveau sportif. Il organise un tournoi de football dans le village, ainsi que d’autres activités : pétanque, volley-ball, etc. “Il y a une ferveur sportive évidente dans la région. C’est notre moyen de motiver les jeunes pour les tenir éloignés des fléaux sociaux.”

54 Quatre Cocos

L’un des plus gros défis de ce village, c’est le transport en commun. Selon Satish Deenoo, ancien président du Village Council, même si la région est desservie par des taxis, les autobus se font très rares. “Depuis que la ligne 54 Quatre Cocos n’existe plus, nous faisons face à beaucoup de problèmes. Plusieurs personnes du troisième âge sont obligées de payer un taxi, car c’est uniquement aux heures de classe que l’endroit est copieusement desservi par les autobus.”
Pour se rendre au dispensaire dans la journée, une personne âgée doit marcher de longues distances, parfois sous un soleil de plomb. “Les autobus qui sortent de Flacq dévient de leur trajet initial et ne desservent pas la région.” Cela représente également un problème pour les enfants qui prennent des leçons particulières.

Pour la petite histoire

À l’origine, les Hollandais donnèrent à plusieurs villages de l’Est, notamment Quatre Cocos, Poste de Flacq, Bramsthan et Belle Mare, le nom de Kronenburg. Pour des raisons inconnues, ce grand quartier de l’Est s’est vu morceler au fil des années en plusieurs petites localités.
(Mauritius Today, septembre 1988)

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