Raj Appadu (Front commun des commerçants) : « La MRA doit enquêter sur les faux marchands ambulants »

Le Front commun des commerçants (FCC) est monté au créneau pour dénoncer les « privilèges » accordés aux marchands ambulants pour qu’ils puissent devenir propriétaires de leurs étals au Victoria Urban Terminal. Pour son président, Raj Appadu, c’est une « injustice » auprès les commerçants qui, eux, payent le loyer à prix fort et travaillent dans la légalité. Il réclame plus de transparence dans l’attribution de ces étals et souhaite que la Mauritius Revenue Authority (MRA) mène une enquête sur les bénéficiaires car, dit-il, parmi les marchands ambulants, certains sont de gros importateurs.

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Le FCC a dénoncé une « injustice » dans l’allocation des espaces commerciaux aux futurs marchands de l’Urban Terminal. Pourquoi ?
Ce projet était d’abord présenté comme un Public-Private Partnership. Il a ensuite été confié à un consortium. Nous considérons que le gouvernement, en particulier le ministre Nando Bodha, a fait un projet taillé sur-mesure pour une catégorie de personnes qui se font passer pour des marchands ambulants. De plus, il n’y a pas eu d’appel d’offres pour l’allocation des espaces. Nous disons qu’il faut donner la chance à tout le monde de travailler. De plus, il faut secure les 500 mètres autour du marché central, comme recommandé dans un jugement de la Cour suprême. Les futurs locataires de l’Urban Terminal auront toutes les facilités pour devenir propriétaires de leurs étals, alors que les commerçants payent la location à prix fort. Il faut donner les mêmes facilités aux commerçants et, surtout, relancer l’économie. On ne peut faire un projet taillé sur-mesure pour un groupe de personnes. Aujourd’hui, tous les ministres travaillent pour ceux qui leur sont proches. Il y a des personnes qui ont des étals dans les foires, mais qui n’ont pas été considérées pour l’Urban Terminal. Pourtant, ils ont un permis de la municipalité. Ils n’ont jamais rien demandé au gouvernement, ils sont en train de se débattre pour joindre les deux bouts. Il en est de même pour les petites tabagies et petits magasins, qui doivent louer des espaces coûteux dans la capitale. Encore une fois, ils payent la municipalité et la MRA. Ils contribuent à l’économie du pays.

Vous êtes donc contre le fait d’accorder des avantages aux marchands ambulants ?
Je suis en faveur d’une aide aux personnes en difficulté afin de les aider à s’en sortir. Mais parmi ceux qui se font passer pour des marchands ambulants, certains sont de gros importateurs. Je dis qu’il faut une enquête approfondie de la MRA, en collaboration avec le PIO et le ministère des Terres. Cela s’applique aussi pour la famille. La douane a déjà dénoncé le fait que certains importateurs se servent de prête-noms. Si le gouvernement est sérieux, il doit bien faire les choses et non pas agir en faveur de certains protégés.

Quelles sont les retombées de la lettre que vous avez adressée au Premier ministre à ce sujet ?
Nous avons écrit plusieurs lettres au Premier ministre, ainsi qu’aux ministres Bodha et Daureeawoo, et nous n’avons reçu aucune réponse. Pourtant, toutes ces personnes reçoivent régulièrement les marchands illégaux. Il me semble que tout ce qui les intéresse, ce sont les élections. Le FCC recherche la transparence avant tout et, après, la politique. Car si on continue ainsi, ce sera la mort des petits commerces. Pour nous, il n’y a pas eu de relance économique ces cinq dernières années ; le secteur est paralysé. On a plus entendu de critiques sur l’ancien gouvernement que de mesures concrètes pour relancer l’économie. De plus, nous nous sommes endettés, à tel point que nous ne savons même pas quelle génération va devoir payer ces comptes. Le Metro Express n’apportera rien au pays. Contrairement à La Réunion, où il paraît que le tram va générer 21 000 emplois. Ici, c’est le contraire. Le Port-Louis Maritime est complètement abandonné. Si rien n’est fait, la capitale et ses business vont disparaître. Nous souhaitons une rencontre urgente avec le Premier ministre. Nous sommes disposés à discuter pour trouver des solutions.

Quelle est la situation de vos membres à Rose-Hill ?
Ils vivent une situation très très difficile. Avec les travaux du métro, plusieurs ont dû fermer. Quand il y a la boue, du désordre, les gens ne s’approchent pas près des magasins. Port-Louis se retrouvera dans la même situation. Je pense que les mairies auraient dû faire un survey et voir combien de magasins sont en train de fermer. N’oublions pas que tout arrêt d’activités dans la ville représente aussi une perte pour la municipalité et le gouvernement. Ces magasins payent le trade fee, la taxe, etc.

Que proposez-vous au gouvernement ?
Nous voulons avant tout de la transparence. Le gouvernement doit s’assurer que ceux qui vont bénéficier d’un étal à l’Urban Terminal, avec les avantages annoncés, le méritent vraiment. Combien de ces marchands habitent vraiment la capitale ? Ensuite, il faut en finir avec les considérations communales. On ne peut faire un projet pour plaire à telle ou telle communauté. Il faut œuvrer pour tous les Mauriciens. Il faut arrêter de se servir du communalisme à des fins politiques. On aurait dû avoir une loi pour empêcher cela. Il est temps que les politiciens changement leur mindset.

Comment voyez-vous Port-Louis aujourd’hui ?
Je suis né à Port-Louis. Je suis un enfant de la rue Royale et j’ai connu l’époque des trains. J’ai vu des dockers transporter des sacs sur leurs dos pour embarquer et débarquer… J’ai aussi vu la disparition du travail de docker et la construction de la nouvelle route. Le Port-Louis maritime avait une vie. Aujourd’hui, tout ceci est en train de disparaître. Beaucoup de maisons ont été abandonnées… Nous avons un plan de travail pour faire revivre le Port-Louis maritime. Mais il faut de la discipline au niveau de l’administration régionale, ainsi qu’au niveau des maires et conseillers. Il faut pouvoir appliquer la loi. Il y a beaucoup d’endroits où la police et la mairie ont fui devant leurs responsabilités. La sécurité doit régner à Port-Louis. Le marché central est un patrimoine. Les gens doivent pouvoir y aller en toute sécurité. Il faut plus de policiers et plus d’inspecteurs.

On avait dit dans le passé que c’est à cause des marchands ambulants que les magasins n’arrivent pas à travailler. Maintenant qu’ils ne sont plus là, la situation n’a pas changé…
Ce n’est pas tout à fait exact. Les autorités ont bien retiré les marchands ambulants dans les rues pour les caser à deux endroits aux gares du Nord et du Sud. Toutefois, d’autres sont revenus. Si vous allez du côté du marché central, vous verrez combien de marchands il y a dans les rues. Les magasins sont paralysés et la police est dépassée. La municipalité ne fait rien non plus, on pense au capital politique. J’en profite pour lancer un appel au commissaire de police et à la municipalité. Nous avons signé une médiation devant un juge de la Cour suprême qu’il faut respecter. À Rose-Hill, c’est pareil. Les marchands ont envahi les arcades avec une facilité déconcertante. C’est cela qui est en train de tuer les commerces dans les villes.

Quel est votre message aux autorités ?
Nous sommes des opérateurs économiques, nous contribuons aux caisses de l’État, nous ne pouvons être ignorés. Je souhaite aussi que le gouvernement vienne rendre public la liste des marchands ambulants qui auront un étal à l’Urban Terminal. Cela nous permettra de savoir s’il y a de gros importateurs parmi eux ou s’il s’agit vraiment des personnes dans le besoin. Cette liste devra être faite par la MRA après enquête, et non pas en catimini par des politiciens. Il faut aussi s’intéresser à ces marchands ambulants qui ont ouvert une série de commerces dans la capitale. Combien de millions ont-ils fait dans les rues ?

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