Rapport Rotin Bazar : Ça chauffe à Rodrigues !

– Le Minority Leader, Nicolas Von Mally, dépose une motion de blâme contre le chef commissaire, Serge Clair, avec pour toile de fond les “findings” de la commission Lam Shang Leen

- Publicité -

– L’Assemblée régionale de Rodrigues devra débattre de cette motion dans un délai d’un mois avec un éventuel rappel avant la prochaine séance du 28 août

– Departmental Inquiry pour faire la lumière sur des allégations autour du recrutement de 265 General Workers par l’Administration

Le bras de fer entre le “Minority Leader” et leader du Mouvement rodriguais (MR), Nicolas Von Mally, et le chef commissaire et leader de l’Organisation du Peuple de Rodrigues, Serge Clair, va crescendo. Ainsi, Nicolas Von Mally, a saisi hier l’Assemblée régionale de Rodrigues avec une motion de blâme contre Serge Clair avec en toile de fond les “findings” de la commission d’enquête sur la drogue, présidée par l’ancien juge Paul Lam Shang Leen. D’autre part, le recrutement de quelque 265 “General Workers” par l’Administration de Rodrigues est au centre d’une controverse, le chef commissaire de l’Assemblée régionale instituant une “Departmental Inquiry” pour faire la lumière sur des allégations alors que l’opposition du MR critique les procédures adoptées à cet égard.

Le MR passe donc à l’offensive à l’expiration du délai, demandant à Serge Clair de soumettre sa démission en tant que chef commissaire à la suite des critiques d’ingérence politique dans le travail de la police. Le rapport de la commission Lam Shang Leen fait état d’un transfert punitif et politique d’un officier de l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) de Rodrigues, à la suite de l’arrestation et la condamnation d’un trafiquant de drogue et “bouncer”, Luco Philippe. Dans un premier temps, Nicolas Von Mally avait demandé publiquement à Serge Clair de “step down”.

Mais devant le refus du leader de l’OPR de se démettre de ses fonctions, le “Minority Leader” a déposé une motion de censure au secrétariat de l’Assemblée régionale hier. Confirmant cette démarche, il a déclaré à la presse que cette motion faisait suite au rapport sur la drogue où le nom du chef commissaire est cité. Et d’ajouter que la motion de blâme doit être débattue par les membres de l’Assemblée régionale dans un délai maximal d’un mois comme le prévoient les “Standing Orders”.

Les travaux de l’Assemblée régionale de Rodrigues ont été ajournés au 28 et il y a une forte probabilité qu’une séance spéciale avec la motion de Von Mally à l’agenda soit convoquée avant cette date. Il a également fait état de « menaces » de Serge Clair à l’encontre de cet officier de l’ADSU et témoin de la commission d’enquête sur la drogue. À cet égard, il a produit des extraits d’une déclaration de Serge Clair selon laquelle « nou pou gete ki pou fer avek li sa la polis la ». Le rapport des forces à l’Assemblée régionale donne une majorité de deux votes à l’OPR et le leader du MR laisse entendre que « si 2 mam so gouverma vot kont li, nou ranvers gouvernma-la ».

Nicolas Von Mally est des plus catégoriques : Serge Clair aurait dû “step down” par respect au poste de chef commissaire et à Rodrigues tout en s’engageant dans une autre bataille pour une “judicial review”. Il a cité le cas de Johnson Roussety qui avait démissionné de son poste de chef commissaire quand il avait été mis en cause dans une affaire sur le plan pénal.

Le “Minority Leader” a dit se rappeler que l’ex-membre de l’Assemblée régionale de Rodrigues Agathe avait adressé une interpellation au chef commissaire le 18 août 2015 portant sur le fléau sur la drogue. La version du Hansard de l’Assemblée régionale, citée par Nicolas Von Mally, indique que Serge Clair avait répondu que « we must have at the Police a Good ADSU. The police who are in ADSU have to be trained and not to favour people here and there to get into cannabis or sell cannabis and should do their job conscienciously ». Pour Von Mally, le DCP Samoisy a fait son travail consciencieusement et il a subi des pressions politiques pour être transféré à trois reprises.

Outre la motion de censure, Nicolas Von Mally a fait le déplacement à Maurice pour des discussions sur le plan politique au sujet des répercussions du rapport « Rotin Bazar » à Rodrigues. Il compte avoir des consultations avec le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, et aussi des membres du gouvernement, dont le ministre mentor et ministre de Rodrigues, sir Anerood Jugnauth. Des rendez-vous ont été sollicités à ce propos.

Par ailleurs, il n’y a pas que le rapport sur la drogue, qui anime l’échiquier politique à Rodrigues. Nicolas Von Mally conteste le récent recrutement de “General Workers” par l’Assemblée régionale de Rodrigues. Il est d’avis que le gouvernement régional avait la responsabilité d’embaucher les 243 travailleurs qui avaient été mis à la porte en 2012. Et d’ajouter que 30 recrues ont décliné l’offre d’emploi et que seuls 20 des 243 ont été embauchés et parmi trois activistes.

En ce qui concerne le recrutement de ces 265 “General Workers” et face à des allégations et plaintes faites, le chef commissaire de Rodrigues a annoncé l’institution d’une enquête départementale. À la lumière du rapport de cette enquête, si les allégations sont confirmées, il a donné la garantie qu’il veillerait à ce qu’il n’y ait aucun “cover-up” dans cette affaire.

Serge Clair a affirmé que depuis que son gouvernement a procédé au recrutement des laboureurs, c’est la première fois que ce genre d’incident se produit. En effet, depuis 2012, dans l’optique d’assurer un emploi durable pour le renforcement de la fonction publique de Rodrigues, le gouvernement régional a recruté quelque 1 000 fonctionnaires, dont 415 “General Workers”. En vue de respecter l’engagement pris dans le discours programme 2017-22 de créer 4 000 emplois dans les secteurs public et privé, l’Administration centrale a entamé des procédures pour le recrutement des “General Workers” dans la fonction publique. Une demande a été faite auprès du bureau de l’emploi pour avoir une liste de personnes qui y sont enregistrées sur une base prioritaire, selon les critères de la Public Service Commission. Une fois cette liste soumise par le bureau, l’exercice d’entretien d’embauche avait été enclenché. 265 candidats ont été recrutés comme laboureurs.

« Cependant, nous avons entendu différentes allégations et nous avons eu plusieurs doléances dans le cadre de cet exercice de recrutement. Des gens disent que certains sont entrés dans le gouvernement sans un certificat de CPE et que d’autres ne se sont pas enregistrés au bureau de l’emploi. Après consultation avec l’“Executive Council”, moi en tant que chef commissaire, j’ai donné des instructions à l’“Island Chief Executive” de faire la lumière sur ces allégations au plus vite. L’“Island Chief Executive” m’a confirmé qu’une Departmental Inquiry sera effectuée », s’est-il appesanti.

Serge Clair a soutenu que son engagement politique depuis 1976 est fondé sur les grands principes, la transparence, la méritocratie et la justice, qui est essentielle pour la bonne gouvernance. Il a affirmé qu’en tant qu’homme de principe, il a toujours respecté la Public Service Commission, la police et la justice, et ne s’ingère jamais dans leur travail.


Serge Clair :  « Aucun ordre de transfert de policier »

Le chef commissaire de Rodrigues et leader de l’Organisation du peuple de Rodrigues, Serge Clair, maintient qu’à aucun moment, il n’a émis d’ordre pour le transfert du DPC Samoisy affecté à l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) de Rodrigues à la suite de l’arrestation du trafiquant de drogue Luco Philippe. C’est ce qu’il fait comprendre officiellement à la suite des conclusions du rapport Lam Shang Leen et de la campagne du Mouvement Rodriguais réclamant sa démission.

« Mon mintenir mwa, Serge Clair, zame mo finn donn lord pou transfer Samoisy, ni okenn ofisie de polis », a-t-il déclaré au Mauricien lors de son passage à Maurice en début de semaine. Il a ajouté que « c’est avec un gros chagrin au cœur que j’ai pris connaissance de la teneur du rapport. J’ai consacré toute ma vie pour faire reconnaître Rodrigues dans sa valeur intrinsèque ».

Le leader de l’OPR a saisi cette occasion pour retracer sa carrière. « Pendant dix ans, j’ai été prêtre. D’ailleurs, c’est mon engagement en tant qu’homme d’Église qui m’a poussé à prendre la décision de m’engager en politique », a-t-il dit, en rappelant ses 20 ans en tant que député de Rodrigues à l’Assemblée nationale, dix ans comme ministre, deux ans à la coprésidence de l’assemblée paritaire ACP/UE, 16 ans à l’Assemblée régionale et dix aux fonctions de chef commissaire. « Zordi mo santi mwa imilie, sali avek bann tentativ pou gat mo zimaz kan pe assosye mwa avek la drog », dit-il en répondant aux conclusions de la commission Lam Shang Leen sur Rodrigues.

Serge Clair a réfuté le fait qu’il aurait engagé un trafiquant de drogue pour assurer sa sécurité. « En tant que politicien et chef commissaire, m’avez-vous vu avoir recours à des services de sécurité pour me protéger à Rodrigues ? », se demande-t-il en faisait état des tentatives d’agression contre lui, dont un coup de feu en 2006 et l’affaire des pêcheurs.

Le leader de l’OPR concède qu’il avait assisté aux funérailles de Luco Philippe après son suicide en cellule à la suite de sa condamnation pour trafic de drogue. Il a rétorqué qu’au moins un des membres de l’opposition y était et que « rapor pa dir nanyen lor la ». Il s’appuie sur le commentaire du Divisional Commander de la police à la commission d’enquête pour se justifier quant à la non-ingérence politique dans les affaires de la police. « Mo fer referans a section XVIII.16 paragraf 5 kot le Divisional Commander dalor dir ki napa ena oken inzerans politik dan zafer la polis dan Rodrigues », devait-il conclure.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -