Reeaz Chuttoo (CTSP) : « Le gouvernement doit choisir son camp »

Au lendemain de la rencontre avec le Premier ministre et ministre des Finances, Pravind Jugnauth, dans le cadre de la préparation du Budget, Reeaz Chuttoo dit attendre un signal fort du gouvernement. Selon le président de la Confédération des travailleurs des secteurs privé et public (CTSP), les amendements aux lois du travail et l’introduction du Portable Retirement Gratuity Fund pèseront lourd dans la balance électorale. Il a invité à ne pas sous-estimer la force des travailleurs, précisant que « le gouvernement doit choisir son camp ». De même, il est d’avis qu’il faut en finir avec le financement des partis politiques, qui représentent la racine de la corruption et du trafic d’influence.

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Comment s’est passée la rencontre pré-budgétaire avec le Premier ministre et ministre des Finances ?

Comme il y a quatre ans. C’est-à-dire que Pravind Jugnauth écoute les différentes propositions sans rien dire. D’ailleurs au cours des deux premières années, nous lui avions fait remarquer que cette attitude nous intriguait. Une fois, il lui est même arrivé de somnoler et Jane (Ragoo) le lui avait fait remarquer. Son style est d’écouter surtout. Il ne réagit pas. Ce n’est que lors de la présentation du budget qu’on saura ce qu’il a retenu ou pas. Cependant, cette attitude donne l’impression qu’il est psychologiquement ouvert, qu’il est à l’écoute.

Vous en avez profité pour lui demander où le gouvernement en est avec les amendements aux lois du travail ?

Bien sûr. C’était même l’un des points les plus importants. Mercredi, quand tout le monde avait déjà présenté ses propositions, il a lui-même dit que les amendements sont pour bientôt. Il n’a pas donné plus de détails. Pour notre part, nous avons été catégoriques pour lui faire comprendre que c’était un budget de la dernière chance. Il doit donc saisir l’occasion. J’ai aussi noté que l’ensemble du mouvement syndical était venu avec plus ou moins le même programme. Beaucoup de revendications ont été soutenues par les différentes fédérations. Je vous cite un exemple : l’alignement de la pension de vieillesse au salaire minimum. La CTSP avait fait un travail pour démontrer que le salaire minimum n’est en fait qu’une sécurité alimentaire. Comme vous le savez, depuis l’année 2000 nous avons créé un panier des choses essentielles pour un travailleur modeste. Rien que pour l’alimentation – les basic needs – il se chiffrait à Rs 9 000. Il n’est donc pas normal qu’une vieille personne n’ait pas de sécurité alimentaire. Toutes les fédérations syndicales ont été unanimes à ce sujet. Idem pour qu’il y ait des lois du travail qui prônent la justice sociale. Nous sommes venus avec un projet de société en disant : either you take it or you leave it.

Quelles sont les autres propositions de la CTSP ?

Nous avons mis l’accent sur la justice sociale. Le premier élément nécessaire pour cela est qu’il ne faut pas de trafic d’influence et de corruption. Or, nous savons tous que l’épine dorsale du trafic d’influence et de la corruption dans le pays, c’est le financement des partis politiques. J’ai personnellement dit à Pravind Jugnauth que la proposition du MSM à ce sujet transcende toutes les logiques possibles. En fait, il vient démontrer que le financement des partis politiques est plus que sacré. Je vous explique pourquoi. Aujourd’hui, pour qu’une entreprise finance le social, la loi lui impose de faire des profits d’abord. Ensuite, il en prélève 2% pour la CSR. Ce qui veut dire que s’il ne fait pas de profit, il n’a aucune obligation à contribuer à la CSR.

Toutefois, pour le financement politique, il n’y a aucune loi, aucun critère. Autrement dit, s’il y a des politiciens qui font du chantage avec une entreprise, celle-ci sera obligée de lui donner de l’argent. Cela veut aussi dire que si une entreprise reçoit l’argent de l’État, comme le Stimulus Package, il peut en puiser pour donner aux partis politiques, ou encore, si une entreprise paye à ses employés un salaire de misère et qu’il bénéficie de Rs 500 par tête à la MRA, il doit aussi contribuer aux partis politiques… Nous considérons cela comme incestueux. On ne peut prendre l’argent du Stimulus Package ou de la MRA pour payer les travailleurs et de l’autre côté, on finance les partis politiques.

L’autre élément, lorsqu’on parle de justice sociale, est de nous assurer qu’il y ait une distribution correcte de la richesse du pays. Pendant plus de 40 ans, les chiffres ont prouvé que l’écart entre les riches et les pauvres s’agrandit. C’est ce qu’on appelle le Gini Coefficient. Quand on a introduit le salaire minimum, on s’attendait à ce que cet écart diminue. Or, cela a diminué par 4 centièmes, soit 0.04. Ce n’est même pas une goutte d’eau dans un océan. Ce qui veut dire que cette injustice est toujours présente. Ce que nous voyons c’est que la précarité s’installe. Les travailleurs sont recrutés sous contrat et ils n’osent parler, de peur que leur contrat ne soit pas renouvelé. Et cela ne se passe pas seulement dans le secteur privé. L’exemple vient du secteur public.

Tout a commencé avec le tandem Rama Sithanen–Ali Mansoor, qui, à partir de 2006, est venu avec des réformes pour faire en sorte que le secteur soit géré selon la logique du capitalisme à outrance. On a commencé à éliminer des postes dans le service public et à recruter sous contrat. On connaît l’histoire des dames qui touchaient Rs 1 500 par mois. En 2008, Air Mauritius a créé Airmate. Aujourd’hui, tous les managers d’Air Mauritius ont eu une augmentation de 10%. Les travailleurs d’Airmate aussi, mais sur un salaire de misère. Il n’y a pas de structure de salaire pour eux. Cela fait quatre ans qu’on négocie. À chaque fois on trouve des delaying tactics.

Ensuite, il y a la fameuse catégorie de General Worker dans le secteur public. Ce sont des malheureux qui ne passent pas par la PSC pour le recrutement. Ce sont des colleurs d’affiche. Cette catégorie de General Worker est devenue une catégorie fourre-tout. Ils sont helper, travaillent sur des machines, tondent le gazon, servent de peintre, de plombier, d’ouvriers… Le pays entier a été choqué d’apprendre en janvier 2018 que le salaire d’un General Worker était de Rs 7800. Tout le monde croyait que lorsqu’on était recruté dans le gouvernement, on avait droit au PRB, donc, on était bien loti. La CTSP dénonce cette injustice.

Qu’en est-il de la sécurité d’emploi ?

J’ai évoqué tout à l’heure la sécurité alimentaire des retraités. Je souligne qu’il y a suffisamment d’argent dans les caisses pour cela. N’oublions pas qu’il y a de plus en plus de travailleurs étrangers à Maurice. Ils contribuent à différentes formes de taxe, mais ne bénéficient pas de prestation sociale. Il y a donc une rentrée d’argent permettant à des Mauriciens d’avoir une meilleure qualité de vie. En l’absence d’une sécurité alimentaire, beaucoup de personnes à l’âge de la retraite aujourd’hui, retournent sur le marché du travail. Les jeunes se retrouvent alors au chômage.

À ce sujet, justement, ce gouvernement a poursuivi ce que le régime Ptr/PMSD avait commencé : il a recruté massivement sous le Youth Empowerment Programme. Aujourd’hui le YEP est devenu le ‘Youth Exploitation Programme’. Des milliers de jeunes travaillent aujourd’hui dans la fonction publique, se montrent à la hauteur, mais ne sont pas confirmés. Par exemple, il y a une équipe de jeunes à la Commission de Conciliation et de Médiation qui fait un bon travail. Jamais on n’a rien eu à leur reprocher et pourtant, ils ont la moitié du salaire pour le poste qu’ils occupent. De plus, leur contrat arrive à terme à la fin de ce mois et ils devront partir. Quand la PSC va recruter pour ce poste, ils ne seront pas nécessairement retenus. On va sûrement venir leur dire qu’ils sont overqualified ou qu’ils n’ont pas suffisamment de crédit… Mais quand on les avait recrutés sous YEP, on n’avait pas vu tout ça. Au final, on se sert d’eux. C’est en contradiction avec l’article 20 de l’Employment Rights Act qui dit « work of equal value should be equally remunerated ».

Au niveau de l’économie, il y a beaucoup de bla-bla sur l’importance accordée aux femmes. Par exemple, qu’on a nommé la première femme Présidente ou qu’un tiers des sièges est réservé aux femmes dans les élections villageoises. Or, il y a une discrimination structurelle envers les femmes. Mais voyons au niveau du Cabinet. Combien de femmes y a-t-il? Je le dis franchement, Fazila Daureeawoo n’aurait pas été VPM si Showkutally Soodhun était là. Notre pays passe aujourd’hui d’une économie industrialisée à une économie de service. Ce secteur est très Capital Intensive et n’est géré par aucun Remuneration Order. On y retrouve près de 85% de femmes. Que ce soit dans les assurances ou autre. Il n’y a aucune loi pour une structure de salaires à leur intention. Donc, n’y a-t-il pas de discrimination envers les femmes? C’est de l’hypocrisie que de venir parler de gender equity quand à la base, on ne passe pas les lois nécessaires pour faire justice à la Femme.

Un autre élément, repris par le PM régulièrement, c’est la digitalisation de l’économie. Même le Law and Order est aujourd’hui digitalisé avec l’installation de 4 500 caméras. Sans aucune réglementation. Si je vous dis qu’aujourd’hui, un employeur peut être poursuivi pour voyeurisme. Vous allez me dire que je suis en train d’exagérer. Pourtant, aujourd’hui, presque toutes les entreprises du privé ont des caméras partout. Même dans le mess room. Cela concerne également des compagnies appartenant à l’État. Ces employeurs peuvent bien être chez eux le soir et ils n’ont qu’à entrer sur une application sur son portable pour visionner tout ce qui se passe sur le lieu de travail. Imaginez qu’il y a une dame qui se penche pour ramasser quelque chose, l’employeur voit tout… C’est du voyeurisme. Pire que cela : l’employeur peut même téléphoner à un responsable pour lui demander de suspendre quelqu’un qui est en train de somnoler au travail. On est en train de shifter du productivisme vers un harcèlement à outrance.

Auparavant, on attendait de l’employé à ce qu’il assure la production. Une fois qu’il a rempli sa tâche, l’employeur est satisfait. Aujourd’hui, c’est différent. Anploye-la so leker fermal si li trouv enn travayer pe kaskou dezer dimatin. On le suspend. Le ministère du Travail ne peut rien faire.

N’y a-t-il pas une réglementation à ce sujet?

Dans la plupart des comités disciplinaires aujourd’hui, on apporte des footage des caméras pour venir prouver les fautes des employés. Cela est accepté même si on ne peut l’authentifier ou vérifier s’il n’y a pas eu de montage. Le ministère du Travail ne considère pas la possibilité d’avoir recours à la Cour industrielle pour cela. Il n’y a pas de Bona Fide Case. Le ministère refuse de soutenir les travailleurs. Les inspecteurs du travail sont très clairs à ce sujet : ils n’ont aucune loi pour leur donner un guideline.

En ce moment, il y a une compagnie pétrolière, qui a, elle, décidé de mettre une caméra de surveillance sur les chauffeurs quand ils ont en route. Le Casino de Maurice a suspendu quelqu’un parce qu’il a posté un commentaire sur Facebook… On est en train de violer la Constitution par rapport à la propriété privée. Est-ce que quand je suis chez moi et que j’écris quelque chose sur Facebook, mon employeur a le droit de me suspendre parce qu’il estime que j’ai parlé contre un chef ? Une fois de plus, le ministère du Travail ne peut rien faire.

Il faut aussi commencer à réfléchir sur l’impact de ce qu’on appelle l’économie 4.0. Aujourd’hui, le secteur financier a pu réduire son personnel à 50% parce qu’ils ont le soutien de l’intelligence artificielle. C’est le premier corporate à faire le plus de profit dans le pays, soit Rs 25 milliards. Ce n’est pas normal. Dans d’autres pays, les banques ne font pas plus de profits que le secteur manufacturier. N’est-il pas temps pour voir l’impact de ces secteurs qui remplacent les gens par l’intelligence artificielle? Qu’ils payent un levy permettant de financer le welfare state ou ce qu’on appelle le revenu universel! Si on n’arrive pas à trouver du travail, parce que l’intelligence artificielle a remplacé les gens, il faut réfléchir à des solutions. Les pays scandinaves ont déjà pris les devants à ce sujet. Nous voulons être le Singapour de l’Afrique, avec une économie basée sur la connaissance. Il est donc important d’avoir des réglementations.

En parlant de banques, il y a aujourd’hui ce qu’on appelle le capitalisme vert. Des entreprises, sous prétexte de protéger l’environnement, fait des profits énormes. Par exemple, pour vérifier votre balance au guichet d’une banque, les personnes qui ne sont pas à l’aise avec l’informatique doivent payer Rs 2 pour une vignette. En réalité, ce bout de papier coûte 20 sous. Mais la banque charge Rs 2 pour cela. Autre cas : vous avez de l’argent dans une banque, vous y allez pour demander de faire un chèque, en prenant de votre compte pour donner à quelqu’un d’autre. Vous devez payer Rs 125 pour ce bout de papier. Quels risques la banque a-t-elle pris pour cela ? Zéro. L’argent est à mon compte. Quel frais a-t-elle dépensé ? De même, quand vous allez faire un emprunt à la banque, on vous réclame Rs 10 000 ou plus, de frais de papiers. C’est du vol et le gouvernement ne fait rien. Encore une fois, cela nous ramène à la question de financement politique. On ne veut pas toucher à son bailleur de fonds.

Qu’en est-il des travailleurs étrangers?

Que nous l’acceptons ou pas, nous avons besoin de centaines de milliers de travailleurs étrangers. Il est donc important que Maurice soit considérée comme une terre d’accueil au point de vue international. Nous avons mauvaise réputation sur beaucoup de choses. Nous sommes cinquième, au niveau international, sur la consommation de drogues dures et premier en Afrique. Pour les travailleurs étrangers, Maurice est ciblée pour trafic humain par des observateurs internationaux. Et c’est vrai. Car une fois qu’un travailleur étranger pose les pieds à Maurice, il devient la propriété de son employeur. C’est lui qui prend la décision s’il sera expulsé à n’importe quel moment. Il lui suffit de téléphoner au Passport and Immigration Office – où souvent, on n’arrive pas à communiquer avec les étrangers – pour l’expulser manu militari.

La CTSP a dit au Premier ministre qu’il n’y a qu’une chose à faire : que tout employeur ait un clearance du ministère du Travail, avant toute expulsion. Que le ministère enquête pour voir si le travailleur a été payé ou s’il y a eu rupture de contrat de la part de l’employeur. On ne peut expulser quelqu’un aussi facilement. Et ces pauvres travailleurs bangladais ont mis leurs familles en gage pour avoir un prêt pour payer les agents privés. On appelle ça les bonded families. Au cas où le travailleur ne peut rembourser son emprunt, les membres de sa famille sont envoyés dans des briqueteries pour travailler. Et c’est l’emprunteur qui empoche l’argent…

Pour en finir avec ça, il faut que nos lois considèrent tous les travailleurs égaux. Comment la loi sur l’immigration a pu être proposée et votée en quatrième vitesse? Ne peut-on pas en faire de même pour protéger les travailleurs étrangers? Il y a des exclus parmi les travailleurs. Il y a par exemple, une catégorie qu’on appelle les éboueurs. Quand on voit le camion, des fois on ne sait plus où sont les travailleurs, parmi les ordures. Pourtant, en 2013, nous avons demandé à Shakeel Mohamed de faire des amendements pour protéger les travailleurs. Il avait dit que ça tombe sous le Health and Safety. Or, ce qui se passe aujourd’hui, c’est quand vous allez à la Santé, on vous dit que ça concerne le ministère du Travail. Entre-temps, il y a une surexploitation à outrance. Nous avons alerté les instances internationales à ce sujet. La CTSP va insister pour des Refuse Collection Regulations. La loi a déjà été préparée. Elle dort dans les tiroirs depuis 2016.

Qu’attendez-vous du prochain budget?

Beaucoup de gens disent que c’est le dernier budget du mandat gouvernemental, qu’il y aura des bribes électoraux. Moi je n’y crois pas. Autrement, ce serait sous-estimer la force des travailleurs. Nous avons la capacité d’influencer les décisions politiques. Le gouvernement doit choisir son camp. Quand je parle de ce qu’il y a eu dans le passé, beaucoup de personnes me disent que je suis pro-MSM. Tel n’est pas le cas. Je ne fais que dire la vérité. Je ne suis proche d’aucun parti politique. Cependant, il est important que les travailleurs n’entrent pas dans la logique d’une musical chair. Il ne faut pas oublier que l’ancien régime a fait de nous le premier pays au monde où on peut renvoyer les travailleurs sans justification et sans payer de compensation. Pire que cela, en 2013 Shakeel Mohamed est venu avec deux amendements. Le premier fait un cadeau de Rs 1 Md au secteur privé. Les employeurs avaient un levy de 1.5% sur leur wage bill. 0.5% était trading levy et 1% au workfare programme. Shakeel Mohamed a ramené ce 1% à 0.5%. Cela équivaut à Rs 1Md. L’autre amendement concerne les comités disciplinaires, pour lesquels l’employeur n’a rien à payer. Depuis juin 2013, des centaines de tontons et tantines de plus de 57 ans ont ainsi perdu leur emploi, mis à la porte à travers un comité disciplinaire. Certains ont trouvé là, un moyen efficace pour ne pas payer le gratuity on retirement. Aujourd’hui, il est important de faire l’éducation des travailleurs. Nous n’avons jamais dit aux travailleurs de soutenir le MSM. Nous leur demandons de choisir des personnes compétentes, honnêtes, qui ont un lien avec la masse ouvrière. Nous sommes une confédération syndicale. Nous avons des membres de tous les bords politiques. Quand même, nous devons faire l’éducation de nos membres. Si ce gouvernement répond à nos attentes, c’est qu’il a compris que les travailleurs de ce pays représentent une force.

Vous aviez dit à un certain moment, que vous étiez prêt à vous jeter dans la bataille politique si les amendements aux lois du travail ne passent pas…

J’y suis déjà. La lutte syndicale est une lutte politique. La démocratie implique qu’on prenne en considération l’opinion majoritaire. Ce sont justement les travailleurs qui sont en majorité dans ce pays. Quelles sont les organisations ayant le plus de membres? Il y a 120 000 personnes qui payent la quotité aux syndicats tous les mois. La CTSP a en plus, des milliers de membres qui ont un autre statut, étant des contractuels. Nous avons donc notre mot à dire dans les décisions politiques. Certains se vantent aujourd’hui d’avoir introduit le salaire minimum. Mais comment avons-nous obtenu cela? C’est grâce à la société civile. Le mouvement syndical a eu le soutien de l’Église, des différentes religions, de la presse, des Ong, sur la question, pour que cela devienne une réalité.

Là, il y a une tentative de venir avec une assurance médicale pour les travailleurs du secteur public. C’est un vieux projet du gouvernement travailliste qui voulait faire en sorte que les fonctionnaires prennent leur argent du NSF pour payer une assurance, afin de protéger la BAI. L’hôpital Apollo venait tout juste d’être construit. J’avais dit à Xavier-Luc Duval, qui était ministre des Finances à l’époque, de ne pas venir jouer les courtiers pour le secteur privé. Et il m’avait traité de mal élevé. C’était lors des tripartites. Aujourd’hui, quand le gouvernement revient avec ce projet, croyez-vous que le mouvement syndical va rester tranquille? Comment le gouvernement va-t-il venir expliquer qu’il a introduit une assurance aux fonctionnaires, pour que le secteur privé en bénéficie? Car ce sont les cliniques privées qui auront la part belle. Aujourd’hui, les médecins ont oublié leur serment d’Hippocrate. Quand un travailleur vient le voir, la première chose qu’il demande c’est si vous avez une assurance. Cela, afin de facturer plus. Croyez-vous que nous allons soutenir de telles choses? Le gouvernement qui décide d’aller de l’avant avec un tel plan, se retrouvera dans la poubelle de l’Histoire. Moi je dis à Pravind Jugnauth de ne pas écouter tout ce que lui disent ses conseillers à ce sujet. Autrement, il n’aura pas le soutien populaire.

Pour revenir à la question politique, je ne me vois pas adhérer à un parti et être sous le diktat du leader. J’aime trop ma liberté pour cela. Nous sommes un pays de roder bout. Quand un enfant rentre à Maurice avec son doctorat, ses parents lui disent qu’il faut voir quelqu’un pour qu’il puisse faire son internship. Il faut changer cette mentalité et les jeunes should take the lead pour cela. À la CTSP, nous peinons à trouver des jeunes pour assurer la relève et prendre le destin du pays en main. Mais nous allons le faire. La lutte syndicale est une lutte politique.

Propos recueillis par Géraldine LEGRAND

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