Réforme : pas de consensus sur les 20% pour la reconnaissance syndicale

  • Ashok Subron: « Gare à la prolifération des syndicats à la solde du patronat »
  • Atma Shanto: « Pas toujours facile d’atteindre le seuil des 30% »
  • Deepak Benydin: « Un couteau à double tranchant »

La décision de ramener le taux de syndicalisation de 30% à 20% dans les entreprises afin de favoriser les négociations collectives est diversement commentée dans le monde syndical. Si Ashok Subron, de Rezistans ek Alternativ, craint une prolifération des syndicats, qui risquent de faire cause commune avec les patrons pour affaiblir le mouvement syndical, par contre, Atma Shanto, président de la Fédération des travailleurs unis, a une autre lecture de cette clause, qui fait partie de l’Employment Relations Bill.

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Pour lui, le fait que le ministère du Travail et des Relations industrielles ait ramené le taux de syndicalisation à 20% dans une entreprise pour qu’un syndicat puisse obtenir la reconnaissance permettra aux syndicaux de pouvoir faire leur apparition facilement dans les entreprises pour défendre les droits des travailleurs. « À ce jour, je dois admettre qu’il n’est pas toujours facile d’atteindre le taux de 30% dans une entreprise.

De plus, lorsque ce seuil est atteint, il faudra attendre au moins 60 jours pour que l’employeur accepte la reconnaissance d’un syndicat. Avec le nouveau projet de loi, le délai accordé à un employeur pour répondre à une demande de reconnaissance syndicale a été ramené à 45 jours. Ce qui est un pas dans la bonne direction. Aussi, je ne crois pas que le seuil de 20% va affaiblir le mouvement syndical. Aussi, la plupart des syndicats sont affiliés à des fédérations syndicales et c’est pourquoi je ne vois pas d’inconvénient à ce qu’on applique le seuil de 20% », a-t-il fait ressortir.

Pour Deepak Benydin, président de la Federation of Parastatal Bodies and Other Unions, ramener le taux de syndicalisation à 20% dans une entreprise afin d’obtenir la reconnaissance syndicale est « un couteau à double tranchant ». « C’est plus particulièrement dans le secteur privé que cette mesure a sa raison d’être car on sait que beaucoup d’employés de ce secteur ont peur d’être syndiqués de peur qu’ils soient perçus comme des rebelles par leurs employeurs.

Avec un taux de syndicalisation de 20%, il sera facile pour eux de créer un syndicat. Par contre, c’est dans des entreprises où il y a déjà plusieurs syndicats que le bât blesse. Créer un nouveau syndicat dans un corps para-étatique où il y a peut-être trois syndicats risque d’affaiblir un mouvement syndical », a-t-il laissé entendre.

Quant à Narendranath Gopee, président de la National Trade Union Confederation, il est d’avis qu’il n’y aura pas de consensus dans le monde syndical avec un taux de syndicalisation de 20% dans une entreprise pour pouvoir négocier avec un employeur. « Je pense qu’il faudrait faire une distinction entre le secteur public et privé. Nous savons tous que dans les secteurs privés et public, il est parfois difficile pour un syndicat de faire son entrée car les employés ont peur de représailles de la part de leur patron. Je pense que le seuil de 20% s’adapte mieux pour ce secteur. Mais cela ne peut être le cas pour tous les secteurs à Maurice. Je pense que si on n’arrive pas à trouver un consensus à ce niveau, il faudrait mieux maintenir le taux de 30% et non de 40% », a-t-il dit.

« Dans le secteur public, la situation est autre. Si on propose ce seuil, on risque d’avoir des Yellow Unions, c’est-à-dire des syndicats qui vont faire cause commune avec les patrons pour affaiblir les syndicats. Je pense que le débat est ouvert sur ce dossier. Il n’est pas interdit de penser qu’on peut aller de l’avant avec une formule où le taux de syndicalisation est gradué dans les entreprises du secteur privé », a déclaré Narendranath Gopee.

Lall Deonath, président de l’Artisans and General Workers Union, est d’avis de son côté que le seuil de 20% est une bonne chose. « Cependant, il ne faut pas que les travailleurs utilisent cette clause pour créer une prolifération des syndicats comme cela a été le cas dans le passé ou créer une formation syndicale avec seulement sept membres. J’apprécie particulièrement le fait que désormais les employés auront seulement 45 jours pour répondre favorablement à une requête pour obtenir la reconnaissance syndicale. Ils auront ainsi peu de temps pour faire pression sur les travailleurs pour qu’ils abandonnent un mouvement syndical et faire capoter une reconnaissance syndicale devant l’Employment Relations Tribunal », a souligné le syndicaliste.

Pour le ministère du Travail et des Relations industrielles, le changement concernant la reconnaissance syndicale proposée vise à renforcer le pouvoir de négociation des travailleurs. Il a été noté que des syndicats éprouvent parfois des difficultés pour obtenir la reconnaissance au sein d’une entreprise. Avec ce changement, le respect de la convention de Freedom of Association sera renforcée.

D’après le Registrar of Association, il existe actuellement seulement 11 confédérations syndicales, 26 fédérations et 409 syndicats (incluant les fédérations et les confédérations). Un total de 102 000 travailleurs est actuellement syndiqué alors que la classe laborieuse dépasse la barre de 500 000 à Maurice. Selon les techniciens du ministère du Travail et des Relations industrielles, si la nouvelle loi est votée, le nombre de syndicats dépassera le cap de 410.

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