Soweto Gospel Choir : la ferveur vocale d’un autre peuple arc-en-ciel…

En donnant un concert à Maurice, nos voisins sud-africains du Soweto Gospel Choir sont venus partager un des pans les plus vivaces et populaires de la culture de leur pays. Et à écouter ces voix si merveilleusement maîtrisées, on se rend compte à quel point la pratique du chant, si répandue en Afrique du Sud, permet des prodiges. Bien sûr, il n’y a pas dans ce chœur la seule influence du gospel et des religions chrétiennes, mais tout autre chose qui relève des traditions artistiques si variées de ce pays arc-en-ciel que la renaissance post-apartheid a permis de laisser s’épanouir et mieux se faire connaître à travers le monde.

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Qu’ils soient simples membres du chœur ou solistes, le Soweto Gospel Choir rassemble de magnifiques artistes. Issu des chœurs d’églises du fameux South West Township (Soweto), et formé en 2002 – 12 ans après la libération de Nelson Mandela – le Soweto Gospel Choir porte à travers le monde l’énergie et la vitalité d’une nouvelle Afrique du Sud, restaurant magnifiquement l’image du township qui avait tant fait tristement parler de lui pour les terribles répressions que ses habitants ont continuellement subies aux heures les plus sombres de l’apartheid. Bien sûr, l’impitoyable répression de ce régime a généré aussi une créativité souterraine d’autant plus puissante qu’elle portait en elle le germe de la revendication culturelle et identitaire, et surtout la lutte contre l’injustice d’un système politique abjecte. Ce chœur est nourri aussi de cette puissance combative, qu’il transforme pour le plaisir du public en une ferveur assez éblouissante.

Pour ces chants où l’interprète donne toute sa voix, la balance des sons aurait mérité un peu plus de subtilité pour permettre, par exemple, aux membres du public situés sur les côtés d’apprécier les nuances de ces voix extraordinaires plutôt que d’en prendre plein les oreilles. Sans doute est-ce là la difficulté de ce type de salle à plus de 2 000 places, où l’on a tendance à privilégier la puissance pour atteindre les derniers rangs. Ceux qui y étaient assis auraient peut-être aussi apprécié que les deux écrans géants soient mis à profit pour leur donner une vue plus proche sur les artistes, plutôt que d’être seulement réservés aux discours lénifiants comme souvent qui nous ont été servis avant le concert. Mais passées ces petites misères, le concert valait indubitablement le déplacement.

Répertoire arc-en-ciel

Il est clair que par le choix du répertoire, qui allie les chants traditionnels sud-africains, les tubes les plus symboliques comme leur élégant Asimbonanga, la fameuse chanson de Johnny Clegg réinterprétée ici dans une polyphonie vocale tout à fait rassérénant, les standards du gospel hérités des traditions afro-américaines qui allient si bien gospel, jazz et blues, sans compter la référence à l’une des plus grandes stars de la soul music, avec une version de I feel good (ou I got you, de James Brown) peut-être moins extravagante mais tout aussi émouvante par la magie de toutes ces voix concertantes. Et puis, ce chœur se devait aussi de célébrer la diva Miriam Makeba avec une interprétation épatante, très rythmée et cadencée de Pata Pata.

Sans aucunement sombrer dans le didactisme, ces artistes chantent, jouent la comédie et dansent pour le pur plaisir de donner du bonheur au public et d’impliquer ce dernier. Au-delà d’un répertoire savamment métissé, leur talent réside dans un supplément d’énergie, d’humour et de générosité dans leurs interprétations. Les danses qui imprègnent leur jeu de scène donnent un aperçu en pointillé de différents styles sud-africains (le pas guerrier où les hommes font un petit saut genou levé, le gumboots, pour ne prendre que ces exemples), et parfois des références à d’autres contrées du continent avec un bref passage de soukousse, proposé par des femmes dont les tenues ondulaient avec grâce et chatoyance.

Ils ont fait rire aux éclats, et sans doute aussi pleurer de joie, et ils ont fait danser les plus hardis dans une salle remplie aux trois quarts au rez-de-chaussée, la mezzanine étant restée vide, sans doute par défaut de communication suffisamment longtemps à l’avance. Pour le final, qui a consisté très solennellement à interpréter l’hymne national sud-africain, tout le monde s’est levé d’un seul homme, un peu comme si l’île Maurice se reconnaissait dans ce chant fait des cinq des langues officielles de l’Afrique du Sud, ce chant qui marie dans une forme de résiliente beauté, le passé colonial afrikaner et un chant liturgique africain.

Africa Day au J&J samedi — Jugnauth : « La décolonisation de Maurice n’est pas terminée »
L’Africa Day a été célébré de belle manière samedi avec un concert de haute facture donné par le Soweto Gospel Choir au J&J. Le Premier ministre a, à cette occasion, rappelé que la décolonisation de Maurice « n’est pas terminée puisque l’archipel des Chagos qui fait partie du territoire mauricien est toujours sous le contrôle des Britanniques ».
Le Premier a, dans son discours, souligné la volonté de Maurice qui fait partie de l’Afrique de poursuivre l’intégration économique en approfondissant les relations économique et commerciale avec les pays du continent. Il a rappelé les projets de création de zones économiques spéciales avec plusieurs pays africains dont le Ghana, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, entre autres. Il a souligné les efforts de Maurice de poursuivre la décolonisation du pays en exerçant « notre droit de souverainement sur l’archipel des Chagos en solidarité avec tous les pays africains ». Ce dossier sera bientôt entendu publiquement par la Cour internationale de justice.

Le ministre de Culture, Pradeep Roopun, ainsi que le président du Centre Nelson Mandela se sont également adressés à l’assistance pour souligner la coopération entre Maurice et le continent africain.

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