XLD persiste et signe : « Eleksion derier laport »

Donnant la réplique au Premier ministre et ministre des Finances, Pravind Jugnauth, en fin de matinée à l’Assemblée nationale, le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, a réitéré la thèse que « ce budget constitue un prologue aux élections générales ». D’entrée de jeu, pour soutenir ce scénario, il a puisé une première indication dans les Budget Estimates, à savoir des donations de Rs 180 millions à la Commission électorale, et ce en écartant que ce budget puisse servir aux élections villageoises prévues à la fin de l’année. Puis, il s’est engagé dans des analyses de l’approche adoptée par le Grand argentier, notamment en repoussant les mesures économiques « difficiles » et susceptibles de susciter mécontentement et controverses, comme les difficultés de l’industrie sucrière reléguées au second plan et le vieillissement de la population. Il s’est également attardé sur les “Give-Aways” budgétaires, et ce sans se soucier des effets à long terme ou encore ce qu’il a qualifié de “Half-Baked Projects”, dont l’enveloppe de Rs 1 milliard pour camoufler le problème du chômage chez les jeunes.

- Publicité -

Xavier-Luc Duval a trouvé que « l’unique mesure économique que contient le budget est de vendre le pays aux étrangers ». Il faisait allusion à la décision annoncée par Pravind Jugnauth de mettre en vente la nationalité mauricienne contre le versement de Rs 35 millions (USD 1 million) au Mauritius Sovereign Fund et le passeport mauricien contre Rs 17 millions. Tout en avançant que cette braderie de la nationalité mauricienne pourra rapporter, au maximum, Rs 3,5 milliards, il a mis en garde contre des risques à la réputation de Maurice et aux conséquences néfastes sur le secteur de l’immobilier. Le leader de l’opposition a qualifié le Budget de « trompe-l’œil » et ajoute que « ce budget n’est pas un Economic Statement du gouvernement mais plus un exercice de communication qui a pour objectif des “WOW effects” ».

Avant les débats budgétaires, l’Assemblée nationale a rendu un hommage à la mémoire de l’ancien Clerk, André Ponpon, décédé. Pour le leader de l’opposition Xavier-Luc Duval, le budget comprend évidemment du bon, du moins bon et du mauvais. Il a choisi de se concentrer sur le mauvais. C’est ainsi qu’il a relevé qu’il « y a une baisse des performances économiques ». Les problèmes auxquels font face les secteurs économiques vitaux n’ont pas été résolus. Le manque de leadership, selon lui, se fait sentir. Les incitations fiscales sont mal inspirées. De plus, il a souligné que le « maintien exagéré du secret peut mettre la démocratie en danger ». Il estime, par ailleurs, que les prélèvements excessifs sur les prix du carburant sont nocifs. D’autre part, il constate que le budget « contient des mesures qui ont été cuites à moitié » et ne permet pas d’améliorer les services publics. « Le budget comprend Seven Paths to Nowhere » a-t-il dit comme pour parodier le leitmotiv dans le budget de Pravind Jugnauth.

Le dernier budget constitue une indication claire que les élections générales sont derrière la porte. Xavier-Luc Duval en a voulu pour preuve la provision de Rs 180 M prévue pour la commission électorale pour les élections villageoises. « This is the last budget of this government », a-t-il dit. En vérité, ce montant sera consacré au financement des élections générales. « Villages elections are not held on the eve of the general elections. Tout le monde le sait », a-t-il poursuivi. En gros, le budget ne tient pas en considération les effets à long terme. Il ne s’attache qu’aux mesures à court terme. La seule mesure économique contenue dans le budget consiste à vendre le pays à des étrangers. En gros, le budget, loin d’être un énoncé économique, est un simple exercice de communication, misant sur des effets sensationnels sous des applaudissements orchestrés, proposant des mesures qui n’ont pas été bien planifiées et laissant côté les mesures urgentes. « C’est un trompe-l’œil qui ignore complètement la réalité économique et les problèmes des différents secteurs face à la compétition internationale », a-t-il déclaré. « The real engineering and re-engineering of the econmic sectors are nowhere to be seen », soutient le leader de l’opposition. Il a commenté la politique du gouvernement en matière de la roupie. « Les chiffres du budget démontrent qu’au seul item de la TVA, les recettes augmenteront de 10%. D’où viennent ces 10%. Il y a l’inflation et la dépréciation de la roupie. Pour le dernier exercice financier, la Banque de Maurice a essuyé des pertes ds Rs 5,6 milliards. This money is used to depreciate the rupee and to take care of the excess liquidity. The budget relies heavily on inflation and depreciation of the rupee », s’est-il appesanti. S’agissant de la performance économique, Xavier-Luc Duval constate que la majorité des indicateurs économiques se sont dégradés depuis 2014 et en particulier, l’année dernière. Ainsi, l’inflation est passée de 3,2% en 2014 à 5% en 2018. La dette publique est passée de 60,7% du PIB en 2014 à 62,9% en 2018. « La dette ne tient pas compte des Rs 5 milliards de dédommagements qui doivent être payées à Betamax avec des intérêts de Rs 400 000 par jour. Rs 10M ont été prêtées par la BoM et les banques commerciales à l’ex-BAI qui seront finalement à la charge des contribuables. Il faut également prendre en compte les prêts garantis par le gouvernement et qui ne figurent pas dans le budget. Quant aux investissements privés, ils se situaient à 14,4% en 2014 et sont tombés à 13,2% en 2017 et 12,6% en 2018. Les investissements directs étrangers sont passés de Rs 18,5 milliards en 2014 à Rs 17,4 milliards en 2018. » Le leader de l’opposition a annoncé sa décision pour écrire au Fonds monétaire international pour exprimer ses appréhensions à l’effet que« the public sector debt is being underestimated ». « We are on the way to Greece », a-t-il rajouté. Concernant les IDE, ils étaient de Rs 18.5 Md en 2014 ; Rs 17.4 Md en 2018, comprenant la vente d’actions Rs 6 Md. Seulement un maigre montant de Rs 108 M est consacré à la fabrication comparée à Rs 1 Md en 2014. Concernant la facilitation des affaires, Maurice après avoir chuté de la 20 place à la 49 place en 2017, se retrouve à la 25 place selon l’indice de la Banque mondiale. Il a estimé, par ailleurs, que l’amélioration des statistiques concernant le chômage « est subjective ». Des milliers et des milliers de nouveaux fonctionnaires ont été recrutés, soit 5 600 en un an seulement.

Malheureusement, ce recrutement n’a pas entraîné une amélioration visible des services, a affirmé le leader de l’opposition. Pour la construction, la situation semble s’améliorer en raison des investissements dans les projets d’infrastructures gouvernementales alors que l’investissement privé reste faible. Xavier-Luc Duval a affirmé qu’il « a toutes les raisons de douter des chiffres figurant dans le budget de cette année ». Il a qualifié de « rubbish » la croissance de 3,9% indiquée pour l’année se terminant au 30 juin de cette année et les prévisions de croissance de 4.1% l’année prochaine. « Nous avons toutes les raisons d’être insatisfaits de la gestion économique de l’actuel ministre des Finances. Toutes les raisons de craindre pour l’avenir », a-t-il lancé. Sucre Au chapitre de l’industrie sucrière, Xavier-Luc Duval a souligné la baisse de 50% du prix du sucre. Selon lui, les planteurs de sucre sont voués à la faillite. Et les problèmes qui ont commencé au dernier trimestre 2016 ont empiré de mai 2017. « Le Joint Technical Committee n’a pas donné les résultats escomptés faute de consultation avec les syndicats, entre autres. Si la MCIA est vraiment efficace, pourquoi devoir instituer ce genre de comités ? » Il a estimé que la taxe sur le sucre importé rapportera Rs 85 M de revenus supplémentaires dans la caisse du gouvernement.

Ce qui est nettement inadéquat. Actuellement, 4 000 emplois sont menacés dans le secteur sucrier. Xavier-Luc Duval a également évoqué les difficultés rencontrées par l’industrie du thon où « 5 000 emplois sont à risque » et il a déploré qu’aucune mention n’ait été faite dans le budget. Il a ajouté qu’un opérateur majeur dans ce secteur a laissé comprendre que si les pertes interviennent de nouveau cette année, il mettra la clé sous le paillasson. Il est d’avis que le Premier ministre aurait dû initier une campagne intense de lobbying à Bruxelles au sujet des problèmes découlant du quota de thon. « L’industrie textile est clairement en déclin. Les exportations sont en baisse. Les emplois sont passés de 90 000 pour se situer actuellement à 50 000. Les exportations sont de Rs 3.5 Md de moins en 2017 par rapport à 2014. Les principaux opérateurs ont délocalisé leurs activités. Cette industrie est en train de mourir lentement mais sûrement sans qu’il y ait de mesures crédibles proposées par le gouvernement. Nous devons travailler sur l’augmentation de la productivité du travail, encourager les investissements dans la technologie, créer, innover, attirer des cerveaux nouveaux et jeunes dans l’industrie », a déclaré le leader de l’opposition. Les incitations fiscales mal avisées Sur le plan touristique, le taux de croissance a régulièrement diminué. Il est passé de 11% en 2015 et 2016 à un maigre taux de 5,2% en 2017 et 2,7% en 2018. Alors que le taux de croissance de cette industrie est de 13% aux Maldives et de 14% au Sri Lanka. « Cela malgré une campagne vaste et coûteuse sur les médias étrangers pour les 50 ans d’indépendance », a rappelé XLD. Et celui-ci de poursuivre : « Nous devons être perçus comme une destination insulaire … une destination de villégiature. L’accent doit être mis sur la propreté, l’environnement, la protection de nos plages contre l’érosion. Une grande attention doit être accordée à la sécurité et au “law and order” et nous devons offrir une panoplie de divertissements. Il faut relancer la confiance. Rebooster nos efforts de promotion. » Alors que les investissements sont en baisse à Maurice, on accorde, selon XLD, des incitations fiscales aux promoteurs pour le développement immobilier en Afrique – essentiellement au Sénégal et en Côte d’Ivoire. Cela, à un moment où le Sénégal, sous la pression du FMI, a révoqué toutes les incitations fiscales données pour le développement des propriétés dans les zones spéciales. « C’est de la folie », a déclaré XLD. Ce dernier a dénoncé le secret excessif autour de plusieurs projets dont Agalega. « Les termes et conditions de l’accord conclus avec les Indiens ne sont toujours pas connus », a-t-il déclaré. À ce chapitre de son intervention, le leader de l’opposition a dénoncé l’Excessive Secrecy, adopté par le gouvernement dans des affaires. Il a fait état du refus du gouvernement de révéler le moindre détail sur ce qui a été conclu avec l’Inde au sujet d’Agalega. « Le gouvernement a refusé systématiquement de révéler toute information sur Agalega. The people are entitled to know what agreement has been made on his name ». Il a poursuivi en évoquant l’opacité entourant le contrat alloué à Larsen & Toubro pour le projet de Metro Express. « We are being told that it’s a fixed price. We don’t know what is fixed and what is not fixed », dit-il en ajoutant que « I’m going always to fight for transparency ». “More dangerous” Il n’a pas manqué de faire état du Safe City Project avec l’installation de quelque 4 000 Intelligence Surveillance Cameras. « The Safe City Project is more dangerous than the biometric card. It’s financed by Mauritius Telecom. What is the real cost. We don’t know. What’s the guarantee government has given? We don’t know », a-t-il avancé. « La construction de 6 800 maisons sera effectuée à partir d’un autre SPV, une entité chinoise des plus inconnues. Les célébrations de la fête nationale ont été financées par un SPV. Des milliards de roupies sont dépensées par le CEB à travers ses compagnies privées qui échappent au contrôle budgétaire. Ce qui se passe concernant le recrutement est totalement irresponsable. Dans une démocratie, où la responsabilité est la base, où la transparence est essentielle pour lutter contre la corruption, tout cela est clairement inacceptable. Il y a des mesures qui sont néfastes pour le pays. Comment peut-on permettre aux bateaux étrangers de pêcher près du rivage, privant notre pauvre pêcheur de son droit de gagner sa vie, de nourrir sa famille, de payer l’éducation de ses enfants ? », s’est-il demandé. “Stealing less subsidies” Xavier-Luc Duval a critiqué la politique d’octroi des passeports et de la citoyenneté. « Notre citoyenneté et nos passeports sont à vendre pour un montant d’un million de dollars et de 500 000 dollars respectivement. Ces mesures sont très impopulaires. Les restrictions de visa ont été levées en Europe, au Royaume-Uni et en Inde en raison de la bonne réputation de notre pays. Nos citoyens, quand ils voyagent, sont respectés. Des précautions extrêmes doivent être prises, car un mauvais incident peut suffire comme raison pour un pays ou des pays d’annuler notre entrée sans visa. Mais ce qui est vraiment nuisible, c’est la vente de notre citoyenneté. Les implications sont énormes dans toute la société mauricienne, plus particulièrement en ce qui concerne les prix des biens immobiliers, les terrains et les maisons. Nous sommes un pays surpeuplé. De plus, la majorité des terres est détenue par quelques familles. Le reste d’entre nous doit rivaliser pour ce qui reste. En ouvrant la porte à des centaines d’étrangers extrêmement riches capables d’acheter de nombreuses propriétés, de grandes portions de terres sont menacées. What is the point of nationality? It is the possibility to be able to buy property in Mauritius. Il y aura un risque de spéculation foncière et une flambée des prix de terrains très réelle. Cette mesure doit être annulée. Les étrangers doivent acheter dans notre propre pays. » Le leader de l’opposition a aussi abordé le volet des prix pétroliers. « Taxes are excessive on petrol and mogas. Que s’est-il passé avec le budget? Simply they are stealing less subsidies. That’s what has happened », trouve-t-il en s’appuyant sur le bilan de la State Trading Corporation, soit Rs 1,2 milliard d’Excess Subsidies. « Le secret excessif est dangereux pour notre démocratie, et montre une attaque dangereuse sur notre droit à l’information. Nous achetons tous nos besoins en pétrole auprès des raffineries de Mangalore. Le contrat vaut des milliards de roupies par an. Quel est le véritable coût d’achat ? Il est clair qu’avant le renouvellement l’année prochaine, il faut un appel d’offres international complet pour tester l’accord. Je dépose une copie de l’accord avec Mangalore. Quand quelqu’un nous dira pourquoi, au moment de la crise Betamax en décembre 2017, on a refusé de donner des détails sur le coût d’achat et de fret» , a-t-il déclaré en plaidant pour une grande transparence. Dans la dernière partie de sa réplique au discours du budget, le leader de l’opposition s’est montré très critique par rapport à la décision d’allouer Rs 1 milliard contre le chômage des jeunes. « The whole jamboree of providing Rs 1 billion for 1 000 jobs here, 300 jobs there, is not a good measure », a-t-il dit. Et de regretter l’absence de toute mention du secteur de l’éducation tertiaire, avec une nette détérioration de ce secteur. Xavier-Luc Duval a commenté la situation dans les secteurs de la santé, de la Culture et du Sport. « Le sport est malade », a-t-il dit en regrettant l’annulation de l’événement Porlwi by Light.

En conclusion à son intervention d’un peu moins de 90 minutes, Xavier-Luc Duval maintient que « this budget misses the target. This budget misses the whole point and does not deal with the economic prosperity and well-being of the population ». Il dénoncera le fait que le budget ne tient pas compte des répercussions d’un Trade War international sur l’économie en se demandant « has this budget noted the dark clouds on the horizon with the trade war? ». À la reprise des travaux à l’Assemblée nationale, cet après-midi, le ministre de l’Agro-Industrie, Mahen Seeruttun, devait répondre aux critiques du leader de l’opposition.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -