Changements

— Allô ! Bonjour m… tante, comment tu vas ? Comment ça se passe en Australie ?

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— Je vais plutôt bien mon enfant. En tout cas, je vois que tu as bien retenu la leçon…

— Quelle leçon tante ?

— Que les gens bien, comme nous, ne doivent pas parler comme les gens ordinaires et dire matante au lieu de tante.

— Ayo.… tante. Tu sais, le monde a changé et la manière de parler aussi. Il n’y a rien de mal à dire matante au lieu de tante.

— C’est pas parce que le monde changé qu’il faut faire pareil. Il faut savoir garder ses valeurs.

— Ayo… tante, on ne pas avoir une bagarre sur ce sujet-là, encore une fois.

— Je ne suis pas en train de me bagarrer, mon enfant. Je suis en train de dire que les gens bien, comme nous, doivent garder leur manière de vivre et de parler…

— Ayo tante… allons changer de conversation…

— C’est parce que les gens comme nous, laissent faire, changent de conversation et ne respectent plus notre manière de vivre que les autres sont en train de prendre tout et par tout.

— De quels autres tu es en train de parler ?

— Je veux parler de ceux qui ne sont pas comme nous et qui sont en train de prendre notre place. Parce qu’on les laisse faire en disant c’est le changement, c’est l’évolution. Ça même que les gens comme nous sont derrière le soleil, comme disait ma nénène.

— Tante, on ne dit plus nénène…

— Ayo, ne commence pas avec moi là, je te dis ! Finalement, je crois que tu as raison…

— Ah bon ?! Sur quoi ?

— Allons changer de conversation. Tu me demandais comment ça va ici en Australie. Ça va mieux, beaucoup mieux après ce confinement qu’on a eu pendant deux ans toi.

— Mais tous les pays ont eu leur confinement sanitaire, tante.

— Oui, mais tous les pays ne l’ont pas appliqué et surtout respecté comme ici. En Australie, les Australiens respectent la loi, à commencer par les ministres. C’est pas comme chez vous où le ministre de la Santé se fait filmer sans masque en train de chanter et de danser !

— Tu as vu ça ? On t’a envoyé ce clip-là ?

— J’ai vu d’autres où on voit d’autres ministres dans des activités qui sont tout sauf ministérielles ! Tu sais que je ne voulais pas venir en Australie, moi. Mais quand je vois comment les ministres mauriciens se comportent aujourd’hui, je suis bien contente que ton oncle ait insisté pour qu’on émigre.

— Tu vas me dire que les ministres australiens ne font pas des… couillonnades eux ?

— J’ai pas dit ça. Mais quand ils font leurs couillonnades, ils ne se font pas filmer pour que ça se retrouve sur Facebook ! On n’a pas besoin de savoir si des ministres aiment les sucettes, les savates dodo ou les grosses papayes !

— On dirait que tu es plus au courant des affaires de Maurice que moi !

— Mais tout ça est sur internet mon enfant.

— Qu’est-ce tu as pensé de l’affaire Djokovic ?

— Voilà une affaire où tu as vu que le gouvernement australien means business. Les Australiens ont été enfermés chez eux pendant deux ans. Moi-même je n’ai pas vu mes enfants et mes petits-enfants pendant des mois et des mois et des mois, et pourtant ils sont en Australie même.

— Ils n’ont pas eu le droit de venir te voir ?

— Il fallait respecter le confinement et on l’a fait. Même la messe on suit à la télévision. On a respecté la loi et puis on s’est fait vacciner et monsieur Djokovic arrive sans vaccin et veut prendre part au tournoi. Pour qui il se prend ? Parce qu’il sait bien jouer eu tennis il a tous les droits et peut faire son grand mari ?

— On dirait que dans certains cas tu causes comme les gens ordinaires, tante.

— Quand je suis en colère, j’avoue que je me laisse un peu aller. Mais ce n’est qu’une exception qui confirme la règle que les gens bien, comme nous, doivent savoir se tenir et comme disent les Anglais, mind their language.

— Tu es d’accord qu’on’ait expulsé Djoko ?

— Et comment que je suis d’accord ! On n’aurait même pas dû le laisser entrer en Australie. Le gouvernement a eu raison de ne pas céder et de faire respecter les lois qu’il avait fait voter. Mais dis-moi un coup, c’est vrai qu’on a découvert qu’une villa située dans les staff quarters d’une propriété sucrière avait été transformée en laboratoire pour faire de la drogue ?

— Tu as entendu ca ?

— Oui. J’ai vu ça. On me dit que le propriétaire de la villa vient d’une grande famille bien comme il faut ?

— Oui, c’est une famille connue.

— Je n’arrive pas à croire, toi : un membre d’une famille comme ça impliqué dans le trafic !

— Tante, le monde a changé et les gens aussi. On trouve des fraudeurs, des voleurs, des violeurs, des drogués, des trafiquants et même des proxénètes dans toutes les communautés maintenant.

— Mêmes des proxénètes, tu veux dire des…

— Oui, je veux dire des maquereaux. Tu n’as lu l’histoire de la Biélorusse sur les réseaux sociaux ?

— Quoi ! Non. Raconte.

— Une Biélorusse est allée faire une déclaration contre un couple qui l’a fait venir à Maurice, l’a séquestrée et l’a obligée à se prostituer.

— Tout ça il y a à Maurice maintenant ?

— Oui, tante, et tu sais qui sont les proxénètes qui ont fait venir la Biélorusse : un couple de Franco-Mauriciens !

— Ne me dis pas, toi ! Il y a maintenant des blancs qui font ce… métier-là ! Ayo, finalement, je suis bien contente !

— De quoi ?

— Que ton tonton m’a obligée à quitter Maurice pour émigrer en Australie !

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