COURT OF INVESTIGATION | Naufrage et Oil Spill du « MV Wakashio » – Alain Donat : « Les protocoles COVID-19 ont retardé la Salvage Operation »

L’audition du directeur de la Shipping Division, Alain Donat, a pris fin hier devant la Court of Investigation, instituée pour faire la lumière sur le naufrage du MV Wakashio survenu le 25 juillet dernier au large de Blue-Bay. Il a concédé devant le président de ces travaux, l’ancien juge Abdurafeek Hamuth et ses deux assesseurs, les Marine Engineers, Jean Marie Geneviève et Johnny Lam Kai Leung, que les protocoles sanitaires en raison de la pandémie COVID-19 ont retardé la Salvage Operation du navire japonais battant pavillon panaméen, avec des retards de sept à huit jours accusés dans le cadre de cet exercice. Le No 1 du Shipping Division a aussi déploré qu’il n’y ait pas eu de grand progrès depuis les derniers naufrages survenus près des côtes mauriciennes et que les autorités compétentes doivent se pencher sur des moyens pour réagir plus rapidement au cas où de tels événements devaient se reproduire.

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Alain Donat est catégorique à l’effet que les protocoles mis en place dans le cadre de la pandémie de COVID-19 ont retardé les premiers constats devant avoir lieu sur le MV Wakashio à la suite du naufrage au large de Pointe D’Esny. Il reconnaît que les Salvors de la compagnie Smit Salvage se sont plaint de cette situation. Il a expliqué en réponse aux questions de Me Rajkumar Baungally, le représentant de l’Attorney General’s Office, que les retards accusés étaient de sept à huit jours car tous ceux qui arrivaient à Maurice devaient impérativement passer par Port-Louis pour les tests de la COVID-19 alors qu’en temps normal, la Salvage Team aurait dû être mobilisée sur les lieux du sinistre en l’espace de 48 heures suivant le naufrage dans la soirée du 25 juillet 2020. « Si l’équipage était infecté, il n’y aurait pas eu de sauvetage… », a avancé Alain Donat, indiquant que le ministère de la Santé ne voulait prendre aucun risque que ce soit au niveau du navire ou des renforts déployés.

Alain Donat a mis en exergue que le MV Wakashio n’avait aucune chance d’être renfloué et que le plan initial de Smit Salvage était de stabiliser le vraquier, de pomper l’huile et de le renflouer. Il a toutefois précisé que les Salvors n’ont pas soumis de plan de renflouement, car la situation allait évoluer avec la détérioration des conditions du navire au fil des jours, notamment au vu des dommages démontrant pas moins de sept dégâts structurels. C’est ainsi, selon ses explications, qu’il a été décidé de pomper le fioul qui se trouvait à bord.

Par ailleurs, Alain Donat a justifié le plan de saborder le MV Wakashio. Selon lui, pas grand-chose n’a changé du côté des autorités maritimes de Maurice depuis les derniers naufrages survenus au large des côtes mauriciennes. Pour lui, il s’agit d’un sujet complexe à aborder, notamment quant aux dispositions d’être en présence d’une Response Team. Selon Alain Donat, les technologies évoluent très rapidement dans le domaine maritime et, désormais, des logiciels permettent de visualiser le navire en version numérique. « There are special tools that are being used by the naval architects », a-t-il indiqué, tout en affirmant que Maurice doit se pencher sur la question d’une équipe spécialisée en mesure d’effectuer une première évaluation en cas de ce type d’accident. « Personne n’y a pensé mais on est wise after the event », a laissé entendre l’ancien juge Hamuth en direction d’Alain Donat.

Contrairement aux naufrages précédents, Alain Donat estime que la gestion de l’accident du MV Wakashio a été « unsuccessful » dans la mesure où la situation s’est détériorée. L’Assistant Solicitor General a tenté de comprendre du directeur de la Shipping Division si ce qui s’est passé était envisageable. « Was it foreseeable that Wakashio was going to be different? Is there any way risks are calculated ? », a demandé le représentant de l’AGO. Alain Donat lui a répondu que le sujet est complexe et que c’est pour cela qu’on a des Salvors. Et de souligner également que Maurice n’a ni Salvage Engineers et encore moins des Naval Architects qui auraient fait un premier constat.

À leur tour, les Marine Engineers, assesseurs de cette Cour d’investigation, ont eux aussi posé des questions au directeur de la Shipping Division sur les dessous de la Salvage Operation. Jean Marie Geneviève a demandé à Alain Donat de rechercher des précisions auprès de Smit Salvage sur les calculs effectués en ce qui concerne le « stress » du MV Wakashio qui a résulté dans ces dommages structurels et aussi d’entamer des procédures auprès du ministère de tutelle pour recourir à l’avis d’un expert et évaluer ces observations.

Le Marine Engineer a insisté auprès d’Alain Donat qu’on pouvait dépêcher une équipe de la National Coast Guard pour un premier risk assessment sur le navire, du moins corroborer toutes les informations que les autorités mauriciennes recevaient du MV Wakashio. « We cannot override the Salvage », lui a répondu Alain Donat mais Jean Marie Geneviève lui a fait comprendre que les paramètres sous les conventions de l’UNCLOS donnent des permissions appropriées aux pays au regard des « casualties » en leurs territoires maritimes. « We are not talking about intervention. You have a ship in your territorial waters with a tier-3 risk. I am talking about going on board and make sure what the master has reported is correct », a soutenu l’assesseur.

À l’issue de l’audition d’Alain Donat, Alan Jacobsen de la société Seatronics (Mauritius) Ltd, spécialisée dans les équipements électroniques marines, a été appelé à la barre des témoins. Il a expliqué que la licence de l’Electronic Chart Display and Information System –(ECDIS) qui sont les cartes de navigation –, était arrivée à expiration et que le Voyage Data Recorder similaire à la boîte noire d’un avion s’était éteint 5 à 10 minutes après l’échouement afin de conserver les données. Il a donné des garanties à la Cour d’investigation qu’il n’y a eu aucune « tampering » de ces logiciels soumis au CCID aux fins d’enquêtes. Selon l’expert, la boîte noire contient les données des dernières douze heures avant le naufrage du navire.

Le dernier intervenant d’hier a été le Port Master, le capitaine Gervais Barbeau, qui est revenu sur les actions prises à son niveau sur le naufrage du MV Wakashio. Il a expliqué que les remorqueurs du port ne sont pas suffisamment puissants et adéquats pour assister les navires échoués comme le MV Wakashio. Il a soutenu que son contrôle s’arrête aux activités portuaires.

Gervais Barbeau a déclaré que, le jour du naufrage, le commissaire de police, Khemraj Servansing, l’avait appelé pour demander des remorqueurs en assistance mais qu’il ne pouvait agréer à cette demande car les équipements disponibles n’ont pas les capacités requises dans le cadre d’une telle opération. Il a toutefois affirmé avoir fourni 300 mètres de barrages flottants à la National Coast Guard (NCG). « Quelques-uns, nous en avons gardé au port au cas il y a un incident », a-t-il ajouté.

Avant de conclure la séance d’hier, le président de la Court of Investigation, l’ancien juge Abdurafeek Hamuth ainsi que ses deux assesseurs ont informé les hommes de loi concernés qu’ils effectueront une descente à la NCG dans le Sud-Est, la semaine prochaine et que la date de la prochaine séance d’audition sera communiquée ultérieurement.

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