AVANT QU’IL NE SOIT TROP TARD – Ces hommes et ces femmes qui nous gouvernent…

GILLIAN GENEVIEVE

Mars 2021, nous sommes à la croisée des chemins.

- Publicité -

De nos choix, de nos décisions, de notre lucidité et notre clairvoyance politique découlera la possibilité pour ce pays que nous aimons de naviguer entre les écueils qui nous séparent d’une quiétude économique et sociale retrouvée.

Il serait inutile de rappeler ici que la situation économique est grave, qu’elle risque de se détériorer et qu’à partir de là, tout devient possible socialement,  et pas nécessairement pour le mieux.

Le choix des femmes et des hommes que nous mettons à la tête de l’état et de nos institutions est le déterminant du devenir de ce pays. Malheureusement, nous l’avons trop souvent découvert récemment, pour le pire au cours de ces dernières années.

La médiocrité s’agglutine à la mauvaise foi et à la petitesse d’esprit, à l’incompétence, le manque de vision, l’absence du sens de l’état et de l’Histoire, l’absence d’un leadership fort, l’esprit de parti et de copinage, le manque de scrupule et d’éthique pour en faire un cocktail explosif qui a le potentiel d’ébranler fortement, dangereusement et durablement les soubassements de cette société mauricienne déjà en crise avant la crise sanitaire.

Ce n’est pas notre système politique, républicain et démocratique qui est en cause. Nous n’avons pas le pire des systèmes mais nous avons, à la tête de nos institutions, des hommes et des femmes obnubilés par la poursuite de leurs intérêts politiques et, trop souvent, personnels. Cela fait d’eux des vassaux et des courtisans qui n’auront que trop rarement le courage, la vision, la volonté, le désir de la remise en cause de la politique et de l’idéologie délétère qu’ils servent avec zèle et d’un leadership faible et sans hauteur de vue.

Je généralise à peine. Je caricature à peine. L’actualité, malheureusement, est là pour nous le rappeler cruellement.

Mais nous sommes dans un état de droit. Et jusqu’à preuve du contraire, ce gouvernement, élu, est légitime. Il est l’émanation de la volonté des mauriciens. Je le redis, jusqu’à la preuve du contraire.

Cela est douloureux, potentiellement dangereux pour le devenir politique, économique et social du pays mais qu’on le veuille ou non, le gouvernement actuel risque de rester au pouvoir pour encore un bon moment. Au nom des règles démocratiques. Au nom de l’état de droit. Mais au nom, également, d’un manque cruel d’alternatives politiques.

Alternance et absence d’alternatives crédibles

Les partis émergents et marginaux ne représentent pas une alternative sérieuse (surtout à court terme) de par leur inexpérience, le manque de crédibilité politique, l’absence d’un programme politique pragmatique qui prend véritablement en compte aussi bien les réalités sociales du pays que les réalités géopolitiques et économiques qui régissent le devenir du monde.

Malgré les enjeux liés à l’accroissement des inégalités dans le monde et la crise écologique majeure à laquelle on fait déjà face, malgré les mouvements citoyens réclamant un changement dans l’ordre des priorités dans la prise de décisions politiques, il est peu probable que les partis écologistes et les partis radicaux de gauche deviennent ‘main stream’ dans l’immédiat.

On est partis pour encore plusieurs années de social démocratie, de libéralisme modéré (voire ultra) malgré l’urgence climatique et la frustration sociale due aux inégalités de plus en plus criardes. Donc à Maurice comme ailleurs, nous aurons à faire avec les partis traditionnels.

On ne dirige pas un pays comme Maurice avec des rêves et des fantasmes ou de beaux discours imprégnés de bons sentiments qui ne prennent pas en compte les réalités historiques du pays, sa composition sociale, les réflexes communalistes des mauriciens aussi bien dans les régions rurales que dans les régions urbaines.

Il ne s’agit pas d’être cynique mais le mauricien reste profondément inscrit dans une certaine logique communautaire au moment du vote. Le reconnaître, ce n’est pas être défaitiste, c’est reconnaître que la construction d’une identité nationale qui transcenderait les lignes de partage qui fragmentent notre société prend du temps. Et, qu’en attendant, il est nécessaire de vivre avec, tout en faisant bouger les lignes petit à petit. Par le biais de l’éducation, par le biais de l’art et de la culture,  par un travail de transmission des données historiques et politiques.

Il y a tout un travail d’éducation à faire sur le très long terme pour que le mauricien puisse avoir la culture et le savoir politique nécessaires à un vote plus avisé, non ethno-centré et basé aussi bien sur le programme proposé que le mérite et les compétences des équipes potentielles.

En attendant, qu’on y adhère ou pas, le pouvoir est fait et défait à Maurice sur la base de l’appartenance communautaire des candidats proposés. Le mérite et la compétence sont secondaires. C’est tragique, mais c’est un fait.

À partir de là, l’exercice du vote consiste aussi pour ceux qui n’ont pas les mêmes réflexes communautaristes à identifier le parti ou l’alliance qui aurait le moins de défauts et de faiblesses. Ce sera le choix du moins pire.

PTR, MMM, PMSD : une union sacrée nécessaire

Dans le contexte actuel, un espoir était né avec l’émergence d’un accord entre plusieurs de nos partis traditionnels désormais inscrits dans l’opposition. Un espoir, malgré leur lourd passé car face au pouvoir actuel, ses dérives, son incompétence et son manque cruel d’un leadership fort, avisé et visionnaire, cette union sacrée de l’opposition représentait un espoir non pas de renouveau, mais d’un programme et d’une équipe plus compétente, moins obnubilée par les intérêts privés et ayant à cœur les intérêts du pays dans le contexte Covid ou même post Covid extrêmement grave et dangereux.

L’auteur de ces lignes a souvent espéré que nos politiques finiraient par avoir le sens de l’état et finiront par savoir mettre de côté leur ego et leur orgueil (très mal placés dans le contexte) et ainsi créer une alliance des compétences et de l’expérience et, dans un élan patriotique, arriver au pouvoir pour panser les plaies d’un pays meurtri avant de s’activer à reconstruire les conditions de la survie voire du progrès du pays.

J’attendais avec impatience un nouveau pacte social et politique avec la population, une prise en compte des revendications aussi bien politiques, institutionnelles et écologiques de la rue ( je me réfère ici à la manifestation historique du 29 août 2020 et non pas à celle du 13 février qui fut pour moi un échec) mais surtout la volonté affichée de travailler ensemble farouchement dans l’intérêt du pays et de réparer les dégâts causés par le régime en place depuis 6 ans. Et cela aussi bien des dommages structurels, économiques, politiques, sociaux ainsi que dans la sphère géo économique.

Mais l’actualité est venue balayer cet espoir d’une convergence, certes d’une alliance de circonstances mais nécessaire pour faire face aux nombreux défis qui attendent le pays. Pour une fois (avant la marche du 13 février et la démission de Nando Bodha) on avait l’impression que nos politiques s’étaient vraiment mis à l’écoute des attentes de la rue et étaient prêts à mettre de côté certains réflexes du passé pour travailler ensemble dans l’intérêt du pays.

Sens de l’état, sens de l’histoire et ego

Mais on a été rattrapé par la réalité de l’orgueil et de l’arrogance de nos politiques. Jamais prêts à se mettre en retrait pour le bien de la majorité. Toujours convaincus qu’ils agissent dans l’intérêt supérieur de la nation. Pour mieux masquer leurs egos. N’est pas Charles de Gaulle qui le veut.

Avoir le sens de l’état, avoir le sens de l’histoire, être conscient qu’incarner le pouvoir, c’est incarner la république qui émane de la volonté souveraine du peuple, savoir se retirer quand la majorité vous a clairement fait comprendre en deux fois que vous n’êtes plus celui qui incarne sa destinée, exige une certaine hauteur de vue que ne possède pas la majorité de nos dirigeants. Gouvernement et opposition confondus.

Il ne s’agit pas ici d’être dans la caricature de cette pensée ambiante exigeant le départ des dinosaures. Cette exigence est arbitraire, dépourvue de sens, abjecte envers les anciens et d’une puérilité confondante dans la croyance que la jeunesse est pourvue de toutes les vertus et des qualités requises pour incarner le pouvoir et la sagesse requise dans son exercice.

Non, il ne s’agit pas de considérer que cette idée de sang nouveau est d’une nécessité absolue ; il s’agit de reconnaître, pour certains, de prendre conscience qu’ils ne sont pas en adéquation avec les attentes de la majorité et qu’ils doivent savoir se renouveler voire céder la place.

Le pouvoir use et l’avoir incarné pendant une quinzaine d’années ne peut qu’avoir des conséquences sur la psyché et la lucidité politique. Pour un regard neuf, on repassera. Et avoir pour qualité première d’être membre de la caste majoritaire ne peut pas tout justifier. Bien qu’il est nécessaire de reconnaître la pertinence de cette donnée dans le jeu politique à la mauricienne.

Implosion et désarroi

L’implosion de cette alliance, de cette union sacrée et nécessaire des forces de l’opposition, est extrêmement malheureux dans le contexte actuel et prive notre pays d’une alternance (j’utilise ce terme délibérément car je ne considère pas nécessaire une réforme totale du système politique mauricien sauf dans certaines de ses dimensions comme pour le financement des partis et un partage plus équitable du pouvoir comme proposée par l’alliance PTR-MMM en 2014) qui aurait pu, par l’association des compétences et un assainissement de la gestion de l’état aider le pays à s’en sortir.

Aujourd’hui le désarroi au sein de la population est grand. Et dangereux. Pour le devenir social et économique du pays. Et politique. Car face au vide ou le manque d’options, c’est toujours le grand vertige qui prend le dessus ; on perd de sa lucidité politique et on vote contre ou par dépit, et pas pour un projet de société ou un programme électoral pertinent.

Le pays paye cette approche du vote depuis 6 ans déjà. Et risque de le payer encore plus dans les années à venir si les forces de l’opposition n’arrivent à trouver un terrain d’entente et qu’un certain leader ne prenne pas conscience que le temps de se retirer est arrivé.

Demain…avant qu’il ne soit trop tard

L’heure est vraiment grave. L’avenir s’annonce sombre. À tous les niveaux.

Notre pays va mal. Et il est mal géré. Et dans plusieurs sphères nous allons droit au mur. L’équipe gouvernementale et son leader ne sont pas à leur place à la tête de ce pays face aux crises qui nous attendent. Et cela, pas uniquement à cause des scandales qui les éclaboussent presque au quotidien. Il est évident que l’absence de compétences, de vision et de leadership est ce qui caractérise ce gouvernement actuel. Il faudrait d’urgence autre chose.

L’auteur de ses lignes est convaincu qu’elle se trouve du côté des partis traditionnels dans l’opposition : le MMM, le PMSD et même le Parti travailliste. Il s’agira pour eux, d’urgence de travailler à un programme commun et à se trouver un leader qui cocherait toutes les cases pour être Premier ministre de cette île Maurice à la réalité si particulière.

Pour la survie de notre pays, je souhaite que cette union sacrée se concrétise et nous offre un vrai choix au cours des prochaines législatives. Et je souhaite, pour ce pays, que cela se concrétise au plus vite. Que se concrétise au plus vite la possibilité de cette alliance et…des élections.

Avant qu’il ne soit trop tard.

03.03.2021

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour