Le transfert à grande vitesse d’un montant de Rs 45 millions excluant les frais bancaires le 28 octobre dernier par la Mauritius Investment Corporation (MIC) sans respecter la moindre condition qu’elle s’était elle-même imposée – qui a été révélé par Le Mauricien dans son édition de samedi dernier –, a été confirmé par le nouveau gouverneur de la Banque Centrale, Rama Sithanen, qui rencontrait la presse pour la première fois depuis sa nomination. « This is a clear case of defrauding public funds », a-t-il déclaré, samedi. Il a dénoncé une connivence entre la Banque centrale et la MIC dans ce cas spécifique. Le gouverneur s’est, par la même, élevé contre des malversations relevées au niveau du Silver Bank, qu’il a qualifiées de « lost case ».
À propos de la fraude de Rs 45 millions, Rama Sithanen a reconnu devoir opérer sur une corde raide. « Je dois naviguer dans un couloir compliqué pour maintenir l’équilibre entre mon devoir de confidentialité, de réserve et de professionnalisme et la nécessité d’être transparent autant que faire se peut tout en prenant en compte que la confidentialité est la pierre angulaire des activités bancaires », a-t-il fait comprendre, ajoutant que « c’est un cas qui a sauté à l’œil très vite alors que nous avons commencé à entreprendre des exercices sur les transactions tombant dans la catégorie des Very High Risks. »
Le plus frappant est que la transaction a été effectuée alors que la date des élections avait déjà été annoncée, une période où les officiers restent sur leurs gardes et évitent de prendre des décisions. « This is a clearcut case of defrauding public funds », dénonce-t-il. Il avance que beaucoup de choses ont eu lieu ce 28 octobre, date à laquelle le décaissement a été effectué, et ce qui a été dénoncé par des membres du conseil d’administration de la MIC, voire la présidente de la corporation.
Des membres du conseil d’administration de la MIC affirment n’avoir pas été mis au courant de cette transaction avec en toile de fond Pulse Analytics, engagées dans des sondages pro-L’Alliance Lepep aux dernières élections. « C’est un cas où les décisions du Board ont été modifiées. Tout le montant a été déboursé d’un seul coup. De plus, les conditions imposées par rapport au Use of Funds ont été ignorées. Je promets que la BOM fera tout son possible pour récupérer l’argent Defrauded de la MIC mais les procédures appropriées seront suivies. Nous avons la capacité de mener un Audit Trail. Je pense qu’une partie peut être récupérée, mais une autre a déjà quitté le pays.  Les officiers de la MIC ont fait une déclaration à la police.  L’argent a été décaissé d’un seul coup », a-t-il dit.
Quant à l’ancien directeur de la MIC, Jitendra Bissessur, Rama Sithanen a avancé qu’il n’était pas au pays. À son retour, il a démissionné de la MIC et avait voulu reprendre ses fonctions à la BOM.  Mais sa demande n’a pas été approuvée en raison des allégations contre lui et du fait qu’une enquête est en cours. « Il doit assumer ses responsabilités », a affirmé Rama Sithanen, qui fait ressortir qu’il a déjà impliqué d’autres personnes dans la transaction controversée.
En ce qui concerne le cas de la Silver Bank, Rama Sithanen a évoqué le même mécanisme d’opération entre la Banque de Maurice et le ministère des Finances pour faire des choses qui n’auraient pas dû se produire. Le gouverneur de la Banque centrale a affirmé ne pas vouloir donner de l’espoir à ceux qui seront affectés par la décision – qui devra être prise, précise-t-il – car le cas de la Silver Bank est un « lost case ».
Il a fait état des interventions pour que des prêts soient accordés à des personnes qui ne le méritaient pas. « Ce qui a été fait est Unfair. De plus, un comité du ministère des Finances avait approuvé le placement de l’argent de l’État dans cette banque sachant qu’il y avait une connivence », dénonce-t-il.  Il a fait part de son étonnement de la démarche du ministère des Finances alors que la banque venait d’ouvrir ses portes et que d’autres institutions bancaires avaient des offres au ministère des Finances.
D’un point de vue général, Rama Sithanen a indiqué que les « loans and advances » de la banque sont estimées à Rs 8,3 milliards alors que l’Impairment Provision est de Rs 8,1 milliards. Ce qui explique qu’aucun prêt ne pourra être récupéré. Un repreneur s’est déjà manifesté, mais qui ne semble pas être sérieux, a fait comprendre le gouverneur de la BOM.
Parmi les clients de la Banque figurent la municipalité de Curepipe, la NIC, la SIFB et le ministère des Finances. Ce dernier dispose d’un montant de Rs 522 millions à cette banque. Les chances de les récupérer sont très faibles.  Pour Rama Sithanen, la complicité entre le ministère des Finances et cette Banque est évidente. « Il faut prendre des décisions tôt ou tard », a-t-il dit.
Un large volet de la conférence de presse a été consacré à la MIC. Rama Sithanen a indiqué que la MIC a soutenu quelque 70 compagnies tombant dans quatre catégories. Une bonne partie des compagnies respectent leurs engagements. D’autres ont des problèmes sur lesquels se penche la MIC. Il existe toutefois une petite catégorie qui s’est livrée à des abus.
Il s’est appesanti sur le fait que les Rs 81 milliards dont dispose la MIC n’ont pas été puisées des réserves de la Banque centrale, mais cette somme a été créée par un jeu d’écriture.  Cela a eu un impact sur la dépréciation de la roupie, la consommation et l’inflation. 31% des Rs 81 milliards ont été investies dans Airport Holdings Ltd, soit quelque Rs 25 milliards. En contrepartie, 49% des actions de AHL ont été vendues à MIC.  27% sont des Secured Redeemable Debentures dont la grande partie est allée au secteur hôtelier et du tourisme.  10% ont été consacrés à l’achat des terres et finalement, 3% ont été dirigés vers l’achat des actions. Il reste actuellement un montant de Rs 23,6 milliards divisé en deux composants, à savoir une partie Uncommitted et une autre partie Committed for disburse.
Rama Sithanen a aussi affirmé avoir eu des discussions avec des représentants du Fonds monétaire international en fin de semaine dernière durant laquelle il a été question de la MIC. Indépendamment des propositions du FMI, le gouverneur de la Banque a observé vouloir se concentrer sur le Core Business de la Banque centrale. Des réflexions sont en cours concernant la création d’un Alternative Institutional Arrangement for MIC.