Deux religieux d’exception, les pères Laval et Souchon

ALAIN JEANNOT

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Le 13 septembre 2013, nous quittait, sur la pointe des pieds, le père Henri Souchon. Son inerte enveloppe charnelle avait été découverte, chapelet en mains, le lendemain matin, au couvent de Bonne Terre.

Le destin faisait ainsi la part belle à ce « Père Laval contemporain ». Car, c’est à la même date que le missionnaire médecin arrivait à Maurice en 1841 à bord du Tanjore.

Le parallèle entre le parcours de ces deux hommes au cœur d’or interpelle.

Si le Père Laval a passé ses 23 dernières années de pastorale à la Cathédrale St-Louis, dans la capitale, le Père Souchon a aussi oeuvré à Port-Louis, mais à la paroisse de L’Immaculée Conception. Il en a été le curé pendant 41 ans.

Les époques étaient déterminantes dans les deux cas. Car si le Père Laval s’est installé à Port-Louis 3 ans après la fin de la période d’apprentissage, le Père Henri Souchon a adopté la capitale deux ans après l’indépendance.

Le Père Laval est considéré comme l’apôtre de l’unité nationale contribuant grandement, par son évangélisation, à faire que l’ancien esclave pardonne à son ancien maître et accueille, dans le sillage, le travailleur étranger.

En contrepartie, le Père Souchon a, lui, porté le manteau de champion du dialogue interreligieux et de l’interculturel dans un pays, qui commençait à voler de ses propres ailes, et si vulnérable à la division. Mariages mixtes et autres messes de Divali n’avaient pas de secrets pour Henri Souchon !

Si le Père Laval était médecin avant de se faire prêtre, le Père Souchon, lui, a préféré entrer en religion que d’épouser la profession légale, ayant refusé une bourse d’études pour être avocat.

Henri Souchon était un homme des médias ; une dimension que ne partageait pas le Père Laval qui préférait garder la discrétion parce que les dirigeants britanniques avaient à l’oeil les prêtres français qui pouvaient être rapatriés à tout moment. En étant médiatisé, le père Souchon s’est, sans doute, aussi exposé au mécontentement de ceux qu’il interpellait, mais il ne pouvait être expulsé de son pays, au contraire de son confrère Laval.

Épaulé par ses confrères et ses auxiliaires, Jacques Désiré Laval fut à l’origine de la construction de dizaines de chapelles et d’églises si bien que, lorsqu’il mourut, l’ile  Maurice en comptait 50. Or, à son arrivée en 1841, il n’y avait que 5 sanctuaires religieux catholiques. En contrepartie, Henri Souchon a restauré plusieurs églises anciennes dont Saint Sacrement, construite à l’époque de Laval, et Saint François d’Assise, doyenne de nos lieux de culte.

Le Père Souchon a contribué à faire entrer la culture créole dans les églises à travers le sega Per Laval de Serge Lebrasse auquel il est associé, alors que son illustre prédécesseur, Jacques Désiré Laval, a appris la langue créole pour évangéliser, dans leur langue, les esclaves libérés.

Henri Souchon est intimement lié à l’éducation. Il a contribué à doter plusieurs écoles de salles spécialement dédiées pour le ressourcement et la rencontre des enseignants. Il a aussi fondé une école qui porte son nom et qui accueille depuis 2006 les naufrages du certificat de fin d’études primaires pour qui il n’a jamais cessé de plaider.

Le Père Laval a aussi eu un vif intérêt pour l’éducation après avoir abordé la priorité qui consistait à « sauver la famille ». Le temps et les circonstances n’ont pas été favorables à ce qu’il soit directement associé aux écoles. Cependant, sa contribution à la relance de l’église est indéniablement liée à l’éducation car cette dernière gère plus de 60 écoles primaires et secondaires à travers l’île.

Ce ne sont là que quelques pistes de réflexion et de comparaison sur la vie de ces deux hommes dont les noms riment à jamais avec progrès, humanité et amour du prochain et du Créateur.

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