Hommage à un chantre de la culture mauricienne

Un hommage unanime a été rendu en cette fin de semaine sainte pour les Chrétiens à Serge Lebrasse, décédé jeudi à l’âge de 92 ans, et dont les funérailles ont eu lieu hier en présence du vice-président de la République, Eddy Boissézon, de personnalités connues du domaine de la culture et du séga mauricien, ainsi que du monde politique, notamment l’ex-Premier ministre, Navin Ramgoolam. Le président de la République, Pradeep Roopun, ainsi que le Premier ministre, Pravind Jugnauth, se sont fait également un devoir de rendre un dernier hommage à ce chantre de la culture et de la musique locales.

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Serge Lebrasse, tout comme Alphonse Ravaton (Ti Frère) et Joseph Reginald Topize (Kaya), fait aujourd’hui figure d’immortel pour sa contribution dans la promotion du séga mauricien. Ces artistes disparus devraient figurer dans un Hall of Fame, dont la création pourrait être envisagée au Musée intercontinental de l’esclavage, tenant compte que le séga, sous ses différentes formes, puise son inspiration dans l’esclavage et l’engagisme à Maurice. Serge Lebrasse laisse un patrimoine inestimable en matière de séga et de chansons créoles, et dans lesquelles il évoque tous les aspects de la société mauricienne.

Pour comprendre sa contribution, il faut savoir comment cet enseignant et saxophoniste a fait fi des préjugés qui prévalaient dans les années 1960 pour arriver à amener les « gens biens » d’alors à accepter le séga dans leur cercle familial, et du coup imposer le respect pour la langue créole. Le succès de Serge Lebrasse ne se limitait d’ailleurs pas à Maurice. La chanteuse française Isabelle Aubret, connue pour ses interprétations de Jean Ferrat, avait ainsi adopté dans son répertoire une chanson de Serge Lebrasse, intitulée Allez baba Anou Danse. Si le compositeur mauricien était fier de cette reprise, il ne devait pas cacher son regret de n’avoir jamais touché de droits d’auteur pour cette chanson en raison de son inexpérience concernant les contrats à cette époque. Dans tous les cas, Serge Lebrasse fait partie de ceux qui, à travers leurs œuvres artistiques, ont contribué à l’unité de la nation mauricienne.

Cet hommage à Serge Lebrasse nous a permis de faire une diversion bienfaisante par rapport à la situation sociale et politique du pays. Le constat du département d’Etat américain, dans son dernier rapport concernant la situation des droits de l’homme à Maurice, est d’ailleurs accablant. On peut y lire les commentaires suivants : « Les problèmes importants en matière de droits de l’homme comprenaient des rapports crédibles sur : des traitements cruels, inhumains et dégradants infligés par le gouvernement; des arrestations arbitraires; des ingérences illégales dans la vie privée; de graves restrictions à la liberté d’expression et aux médias, y compris la censure; une grave corruption du gouvernement; l’absence d’enquête et de responsabilité pour violences sexistes et crimes impliquant des violences ou des menaces de violence ciblant des membres de groupes raciaux ou ethniques minoritaires. »

« Le gouvernement n’a pas toujours pris de mesures pour poursuivre et punir les fonctionnaires qui ont commis des abus ou se sont livrés à la corruption, que ce soit dans les services de sécurité ou ailleurs dans le gouvernement. L’application des poursuites et des peines était incohérente, et parfois politiquement influencée, ce qui a conduit à l’impunité », lit-on. Accusera-t-on le département d’Etat américain de faire des accusations non avérées, comme cela a été le cas pour les remarques pertinentes faites par le cardinal Piat ? Personne ne peut nier que la perception que projette le gouvernement, tant sur le plan local qu’international, n’est pas très réjouissante.

Tous les spectateurs ont été témoins de la brutalité avec laquelle le Speaker a traité un ancien Premier ministre et leader du MMM, Paul Bérenger, qui a été expulsé à coup d’insultes par un Speaker déchaîné, intimant le sergeant-at-arm de l’entraîner de force vers la sortie. La situation est désespérante. « Faut-il pleurer, faut-il en rire ? Fait-elle envie ou bien pitié ? Je n’ai pas le cœur à le dire… » chantait le chanteur français Jean Ferrat.

 

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